La défense de l'électro par le fast food de l'électro...

Les films qui portent un nom de musique déjà commercilisée sont des objets à prendre vraiment avec prudence tant leur côté random qualitatif est élevé. Ici, autant dire que la bande annonce ne m'avait pas du tout donné envie, entre zac efron roulant du sourcil entre deux beats et les demoiselles en face qui roulent de la hanche. Et le résultat est hélas un peu mitigé, mais meilleur que ce que l'on prévoyait. Plutôt que de la jouer racolage façon Projet X, le film soigne gentiment son visuel et a au moins le bon goût d'être fidèle aux ambiances des boîtes modernes sans passer de trops mauvaises musiques (car on a énormément d'électro merdique, sans faire preuve de démagogie, entre la pop et l'électro, on se tape quand même des brouettes de musiques difficilement écoutables sans alcool). Même dans son portrait des jeunes, classiques et sans surprise, le film est plutôt honnête, avec leur côté complètement lisse en journée et leur pulsions noctures, subissant la crise financière puis l'oubliant complètement (le pognon dépensé pendant ces soirées est considérable). Il est en revanche assez prétentieux dans son analyse de l'électro. La séquence où Zac Efron analyse les interactions entre danseurs et musiques en faisant carrément de l'électro une science médicale est une jolie trouvaille visuelle, un peu trop arrogante pour convaincre totalement. Elle apporte des éléments scientifiques intéressants et apparaît comme une recette de cuisine alors qu'elle n'a aucune portée dans le long terme d'une soirée, qu'un DJ est sensé tenir d'un bout à l'autre. Résultat c'est bien joli, mais si un seul DJ travaille comme ça, je veux bien m'infliger la saga twilight en entier et sans coupures.


C'est un peu aussi quand on a zac qui dit d'un autre DJ qu'il a été bon autrefois, mais qu'aujourd'hui il donne aux gens ce qu'ils veulent entendre (et que donc c'est un gros commercial qui a perdu son âme d'artiste). Ce jugement de la part d'un novice dans le milieu est logique, il faut aussi prendre en compte le grand nombre de DJ pour l'organisation de petits évènements réguliers qui eux finissent par ne plus trop se casser la tête (surtout qu'on leur réclame toujours des chansons qui ne sont pas les leurs). Vouloir faire le buzz, c'est sûr que c'est le top (les jeunes aiment bien faire le buzz), mais le manque d'humilité du milieu transpire littéralement au travers de ce film, sans que ce dernier ne pense une seule fois le dénoncer. Quand on parle de Skrillex et du buzz planétaire qu'il fait, personne n'analyse jamais musicalement ses morceaux. On part toujours du fait que parce qu'il est populaire, il a un énorme niveau. C'est vrai qu'il est une pointure et qu'il a un style reconnaissable d'entre mille (après l'écoute de 2 morceaux ou le visionnage de spring breakers, vous pourrez identifier n'importe quel remixe de skrillex), mais pour une mélodie qu'il construit, il produit tant de bouillie sonore qu'il en ruine les qualités musicales. Car ce n'est évidemment plus de musique dont il est question avec l'électro dans ce cadre. Le film est fidèle à l'esprit de l'électro qui s'extrait du registre musical (malgré l'hypocrisie de la scène de collecte de son des instruments, nous n'entendrons pas de morceaux utilisant clairement ces techniques) pour produire une piste pensée pour faire le buzz, sans autre but. La recherche harmonique ou de mélodie est ici quasiment évacuée, c'est du remplissage pour sublimer le beat à 128 bpm. Implicitement, le film a complètement réduit la portée artistique de l'électro, ici juste bonne à faire tourner le pognon, bouger les fessiers et flatter le DJ. Il n'est jamais question d'améliorer le travail existant par des remixes ou d'authentiques artistes qui ont réussi à durer dans ce registre en faisant aussi autre chose que de la musique pour club (puisque l'avenir de l'électro n'est clairement pas là dedans).


Finalement assez médiocre sur l'aspect musical, le film a au moins une facture visuelle décente et un approche plutôt réaliste du milieu des DJ de soirée, hélas avec trop peu de distance pour voir aussi ce qui fait la richesse de la musique qu'il prétend défendre.

Voracinéphile
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le 31 oct. 2015

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