Bill, âgé d’une vingtaine d’années, père de deux fils, et Matho, 12 ans, vivent dans la réserve indienne de Pine Ridge, dans le Dakota du Sud. Le film suit leur vie quotidienne, leurs difficultés, leurs souffrances, leurs jeux, leurs espoirs et leurs déceptions.

Sur les terres de Danse avec les loups, la mise en scène prend, dès les premières minutes, le contre-pied de son célèbre aîné. Contrairement à ce que peut laisser croire la toute première scène, on ne verra dans War Pony que très peu de grands espaces emblématiques, de prairies à perte de vue, de traditions et de rites ancestraux. Les premières minutes balayent complètement l’image des amérindiens tirée des vieux illustrés. Entièrement convertis à l’American Way of life du XXIe siècle, aux sodas et aux consoles de jeu, ces enfants restent pourtant à l’écart de l’Amérique d’aujourd’hui. La fatalité de cette condition la rend bouleversante.

Car c’est en effet ce qui frappe tout au long du film. La misère de la réserve, filmée sans misérabilisme et quasi sans fascination (à l’exception de la scène du vandalisme du site d’élevage de dindes), semble devoir être le quotidien des protagonistes tout au long de leur vie. Ni la débrouille, ni le trafic, ni même la bonne volonté ne leur permettent d’en sortir.

Et lorsqu’un mentor potentiel se présente, il ne fait que maintenir son protégé dans une situation de soumission (Bill n’avait d’ailleurs jamais semblé véritablement dupe).

« A présent, je suis un autre homme ». L’espoir d’une vie renouvelée, honnête et digne, incarnée par un chien se dérobe tout au long du film. Le caniche qui devait permettre ce nouveau départ, voire même cette nouvelle naissance, sera volé puis tué.

Éclairé par une lumière jaunâtre assez typique de ces films sur l’Amérique profonde, War Pony témoigne aussi de la violence de ce monde qui jette trop tôt les enfants dans un monde d’adulte sans autres perspectives que l’illégalité. Ni la discipline, ni l’amour, ni la volonté ne permettent d’y échapper.

Le film peut à cet égard sembler trop pessimiste ou manichéen dans sa représentation des rapports entre les indiens et les blancs. On pourra lui reprocher un propos fataliste. Mais on y discerne tout de même une lueur d’espoir à travers l’innocence de Matho et la volonté de Bill. Il suffirait que quelqu’un leur tende la main pour qu’ils puissent vivre la vie meilleure dont ils rêvent.

Tsi-Na-Pah
8
Écrit par

Cet utilisateur l'a également ajouté à sa liste Les meilleurs films de 2023

Créée

le 2 juin 2023

Critique lue 34 fois

2 j'aime

Tsi-Na-Pah

Écrit par

Critique lue 34 fois

2

D'autres avis sur War Pony

War Pony
Aude_L
6

L'Indien Marlboro

Que reste-t-il des amérindiens aujourd'hui ? Qu'est-ce que l'appartenance à un clan, une famille, un pays ? War Pony questionne son sujet avec une pertinence et une clairvoyance qui nous font passer...

le 18 janv. 2023

12 j'aime

War Pony
Floridjan
7

Caméra d'or méritée

C'est un film étrangement beau, étrangement dur, étrangement triste, étrangement poétique, pas complétement désespéré, y a parfois presque une lueur d'espoir à l'horizon du Dakota.Le cinéma US...

le 15 mai 2023

11 j'aime

3

War Pony
Cinememories
6

En auto-stop

Si l'aura d'Elvis tourne autour du biopic attendu sur la croisette, il ne faudrait pas négliger la présence de sa petites fille, déjà connue à l’écran et qui fait son incursion dans la réalisation...

le 28 juil. 2022

5 j'aime

Du même critique

Les Trois Mousquetaires - Milady
Tsi-Na-Pah
8

La fleur de lys infamante

Malgré des moyens relativement considérables et de belles qualités à faire valoir, ce deuxième épisode des Trois Mousquetaires de Martin Bourboulon a été accueilli assez froidement. Comme si le...

le 21 janv. 2024

1 j'aime

Le Traître et le néant
Tsi-Na-Pah
7

Une infinité de paradoxes

Après Nicolas Sarkozy (Sarko m’a tuer) et François Hollande (Un président ne devrait pas dire ça), il était naturel que Gérard Davet et Fabrice Lhomme s’intéressent à leur successeur : Emmanuel...

le 15 oct. 2023

1 j'aime

BAC Nord
Tsi-Na-Pah
7

"Je comprends pas comment on est arrivé là."

En septembre 2020, les producteurs de BAC Nord dévoilaient la bande-annonce du prochain film de Cédric Jimenez pour une sortie prévue en fin d’année. Mais la recrudescence des cas de Covid-19 avait...

le 19 sept. 2023

1 j'aime