Visions
5.2
Visions

Film de Yann Gozlan (2023)

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Histoire de poser cartes sur table tout de suite : j’ai tenu une heure. Pas plus.
Pourtant la bande-annonce ouvrait la voie à quelque chose de potentiellement audacieux. Les premiers visuels étaient séduisants et laissaient supposer une certaine expérimentation formelle. Et puis Yann Gozlan était un nom pour lequel je projetais certaines promesses depuis Boîte noire
…Seulement voilà, quand un film ne s’articule sur aucune démarche singulière, c’est quand même compliqué de le suivre.
Très compliqué même.


Alors pourtant, certes, on sent l’envie de faire du cinéma propre, clinique, à l’ancienne, comme j’aime.
Tout n’est pas moche dans cette histoire même si, personnellement, rien ne m’a vraiment séduit. Ça reste surtout de belles vues sur de belles plages, ou bien des beaux cadrages dans des grands espaces minéraux. De l’esthétisation souvent stérile. Rien de plus.
Il y a dans tout ça un petit côté « belles images bien lisses » qui ne colle clairement pas avec le sujet ; sujet qui lui-même peine à éveiller l’intérêt tant il serait à classer sur le podium des pires conventions du cinéma.


« Tout va bien dans la vie d’Estelle qui a un super métier, un super époux, une superbe voiture et une superbe maison… Jusqu’à ce qu’elle rencontre par hasard un amour de jeunesse ; amour qui va raviver la flamme de la passion, et faire tout s’écrouler, jusqu’à la santé mentale d’Estelle elle-même. »
Non mais franchement…
Quand espère-t-on que je m’émoustille pour un sujet comme celui-là si, en parallèle, il n’y a pas de vraie proposition artistique de faite ?
D’un côté il y a donc cette mise en image très conventionnelle qui ne parvient jamais à opposer la vie sous contrôle d’Estelle d’une part et sa passion libératoire de l’autre. Et puis en parallèle de ça il y a cette intrigue qui n’a aucun scrupule à passer par toutes les évidences possibles.
C’est interminable et sans surprise. Au bout d’un moment ç’en fut trop. J’ai fini par craquer avec cette abominable scène où Estelle tente de rentrer sur le droit chemin et vient l’annoncer à son amante, Ana.


« Ana. Désolée de te l’annoncer comme ça, mais je viens te dire qu’on ne se reverra plus. J’aime Guillaume. J’aime notre vie. Ce qu’on fait là m’emmène droit dans le mur.
– Non, reste. Si c’est à cause de ma nana que tu as entendue au téléphone, sache que tout ce que je lui ai dit c’était pour te rendre jalouse. Je peux lui retéléphoner et la quitter ici et maintenant si tu veux.
– Et après tu me demanderas de faire la même chose avec Guillaume ? Hors de question.
Tiptiptiptip. Allô ma chérie ? Oui, j’ai rencontré quelqu’un d’autre. Je te quitte. Bises. Tut… A ton tour maintenant. Dis-le, à Guillaume.
– OK. »


Quooooooooooa ?
Pardon, mais pourquoi ?
Juste avant tu étais deg’ de ce que tu venais de faire à Guillaume ! De l’autre tu es tombée sur ces photos chelous qui suggèrent qu’Ana navigue dans des trips un peu malsains. Pourquoi se retourner comme ça d’un coup ? Parce que la passion est trop forte ?! Manque de pot, ce film n’a jamais été foutu de me la retranscrire cette foutue tension !
Et c’est quoi ce vieux plan à base de téléphone ?! L’ami Gozlan croyait-il franchement qu’on allait se faire prendre par ce vieux coup du « Mouhaha ! En fait je n’ai pas appelé ma chérie ! J’ai parlé dans le vide ! Tu es tombé dans mon piège ! Niark ! Niark ! »
Voilà. C’est là où je me suis levé et que je suis parti.


Une heure ! Cette scène à la con survient au bout d’une heure de film ! A la moitié !
Non mais merde quoi ! Faut vraiment n’avoir rien à dire dans son film pour en être encore que là à la moitié du métrage !
Et les « visions » dans tout ça ?! A la moitié du film on en est encore réduit qu’à quelques flashs de rêves anxieux. Ceux-ci sont-ils amenés à devenir à un moment donné plus que ça ? Peut-être. Sûrement même. Mais le fait est qu’au bout d’une heure – la moitié du film – je n’en ai déjà plus rien à foutre.
Je n’y crois pas. Je ne suis pas dedans. Je me fais chier. Je n’ai plus qu’une seule hâte : c’est ce que ça se finisse.
C’est d’ailleurs pour ça que j’ai fini par sortir : pour que ça se finisse.


Alors j’entends qu’en me cassant ainsi j’ai peut-être loupé un final qui rattrape un peu le tout. Je l’entends. Pourquoi pas…
Mais, chez moi, quand un film a réussi à m’assécher comme une dorade en plein Sahara, c’est fini : il n’y a plus rien à espérer.


En vrai, je ne comprends pas ce genre de film…
…Ou plutôt, je crains malheureusement trop les comprendre.
Déjà Boîte noire ne brillait pas par son originalité ou son propos. Il était juste un thriller maitrisé qui avait pour mérite d’avoir su appliquer sa formule avec une certaine habilité. J’ai l’impression qu’on a retenté le coup avec Visions : on reprend une formule consacrée et on espère que le tour de main de Yann Gozlan saura en faire un film propre et efficace.
Le problème c’est que, là, sur ce coup-ci, on n’a pas su se rendre compte à quel point on avait sombré dans le convenu. C’est plus que propre, c’est javélisé.


Alors après, je pourrais entendre qu’on me reproche d’attribuer une note aussi sévère – 2/10 – pour un film fade mais propre malgré tout. C’est vrai…
En toute objectivité, je reconnais pleinement qu’il est effectivement loin d’être immonde ce Visions, d’où sûrement les notes plus clémentes – mais pas forcément plus généreuses – de mes éclaireurs adorés.
J’ai d’ailleurs hésité un bref instant à monter d’un petit point, histoire de… Mais seulement voilà, il y a quand même un point que je ne pouvais pas ignorer non plus concernant ce long-métrage de Yann Gozlan, c’est que le concernant, je me suis quand-même taillé en cours de route ! Or il me semble bien qu’il s’agit là de la toute première fois que c’est arrivé cette année. Et ça, l’air de rien, je pense que ça dit quand même quelque chose.


A un moment donné, je pense que c’est un piège que de n’appréhender les œuvres qu’au seul regard de critères purement objectifs. Si je m’appuie sur l’exemple de ce Visions, on a certes affaire ici à un film qui n’est honteux en rien, mais eulement voilà, il est totalement creux. Il est une machinerie qui tourne à vide. Pour moi c’est très vite devenu un interminable tunnel d’ennui.
Que vaut une œuvre qui aspire à ne rien dire de particulier et qui ne semble mue que par une simple logique mécaniste ?
Moi, je trouve que ça ne vaut pas grand-chose.
Alors après, c’est certain, tout ce que je dis là est bien subjectif, entendons-nous bien,
Mais qu’on n’espère pas de moi une quelconque clémence quand je me suis fait chier à ce point.

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le 12 sept. 2023

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