Un sacré petit bout de femme, l’Agnès, que l’on découvre ici peu de temps avant sa mort.


Ce que j’aime dans ce film, c’est qu’il part à la rencontre de gens ordinaires, qu’on ne voit jamais, des invisibles qui méritent pourtant d’être connus et montrés. Des gens bien, souvent. Y a pas que des cons dans ce foutu pays. J’en ai rencontré un il n’y a pas longtemps, fortuitement. Il ne m’a pas sauvé la vie mais m’a sorti d’un bourbier dont je pouvais difficilement m’échapper seul. Un type bien, un anonyme. Un gars qu’on croise parfois mais à qui on accorde à peine un regard. Pas forcément besoin de traverser la France comme Varda et JR, il y a parfois des trésors tout près.


Dans ce film, AV et JR comme ils se surnomment eux-mêmes, accompagnés à la musique par M, s’intéressent en effet à des gens ordinaires, qui semblent heureux qu’on leur prête un peu d’attention, pour une fois.


AV et JR, la petite vieille punchy et le grand échalas plus réservé derrière ses lunettes noires, égayent en effet des villages très simplement, avec des collages de photos, souvent des portraits, mais ça peut aussi être des poissons sur un château d’eau, ou les yeux et les pieds d’Agnès sur des trains de marchandise. Il s’agit de mettre un peu de beauté dans ce monde, de désenlaidir des lieux ordinaires, comme des usines, en y mettant en avant des photos d’individus, ou de groupes, il s’agit de donner un peu plus de vie, un supplément d’âme, à des lieux parfois en perdition, comme cette rue de corons où il ne reste qu’une habitante, ou ce quartier non fini à Pirou. Nos auteurs s’intéressent à ce qu’on ne voit pas, à ce qu’on ignore le plus souvent, des lieux, mais aussi des individus, avec leurs visages. A qui ils ont apporté un peu de fierté, ce n’est pas rien.


Alors oui, le film est écrit, peut-être un peu trop, alors oui, AV et JR, en dépit de leur entente et de leur malice, ne sont pas de bons acteurs et leurs paroles sonnent parfois faux. Alors oui, même si la démarche est tournée vers l’autre, on n’échappe pas à une forme de nombrilisme.


Mais on s’en fout, AV et JR se sont amusés, ils ont fait des choses sympa, ils ont rencontré des gens et les ont un moment rendus heureux, et nous on a passé un bon moment, on s’est baladés avec eux dans différents de coins de France, on a aussi rencontré des gens. Et puis on voit Agnès Varda chanter « Ring my bell », ça, ça vaut tout l’or du monde, on n’a pas perdu sa soirée.


Merci JR, merci Agnès, bon vent à tous les deux.

socrate
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le 11 mai 2019

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socrate

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