Un vieux professeur, vivant seul dans sa maison romaine remplie de livres d’art, de tableaux et de souvenirs, est dérangé par l’intrusion de Bianca Brumonti, une comtesse qui insiste pour louer le deuxième étage de sa maison, afin d’y loger son étrange tribu : sa fille Lietta, Stefano, le fiancé de cette dernière ainsi qu’un gigolo, Konrad. A titre de loyer, elle lui offre un tableau, une pièce unique qui manque à sa collection. Dès lors, sa vie se trouve bouleversée par l'irruption de cette famille extravagante dont tous les codes moraux sont renversés. Le professeur est ulcéré par la vulgarité de ce monde aristocratique en voie d’embourgeoisement, dépourvu de culture et d’éducation. Mais il est aussi fasciné par l’intelligence de Konrad, cachée sous son cynisme de prostitué, et se lie d’amitié avec le jeune homme, qui devient pendant une courte période le fils qu’il n’a jamais eu.

Œuvre testamentaire de Visconti déjà miné par la maladie – il mourra deux ans plus tard - Violence et passion, tourné en 1974, est un huis clos où évolue, dans l’ambiance feutrée d’un appartement cossu de Rome, un professeur ( magnifique Burt Lancaster ) collectionneur de portraits de famille anglais du XVIIIe siècle – des conversation pieces –, attaché à ses habitudes au point qu’il ne peut envisager de changer quoi que ce soit dans l’ordonnance de sa vie et celle de ses collections. Jusqu’à ce que déboule subrepticement dans son existence la marquise Brumonti, interprétée par une Silvana Mangano aussi souveraine que dans Mort à Venise, épouse d’un riche industriel sans doute fasciste, qui entend bien s’installer dans sa demeure. Pour parvenir à ses fins, elle va utiliser toutes les ressources de sa séduction avec, pour seul objectif, celui de vaincre ses dernières réticences. Si bien que le vieil homme va bientôt voir son univers basculer dans un désordre cynique à souhait et cette famille prendre avec impertinence possession des lieux et mettre à mal ses habitudes. Mais, au fil des jours, ce dérangement va le distraire et l’amuser, d’autant que l’amant de la marquise, le séduisant Konrad ( Helmut Berger irrésistible ) détient un lourd secret.

Admirablement interprété par des acteurs au faîte de leur talent, filmé dans des décors d’une beauté décadente et précieuse et d’une mélancolie profonde, ce film est un hommage à l’art, à un passé soudain vulnérable que la modernité ne cesse plus de désenchanter. Un chant d’adieu bouleversant.
abarguillet
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le 5 juil. 2013

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