En guise de propos liminaire, je tiens à dire que je suis allé voir l’œuvre de Thomas Salvador dans un mélange de curiosité pour un long-métrage centré autour d’une idée pour le moins original dans le paysage cinématographique gaulois , et de sollicitude pour le cinéma français en général, pour la bonne cause donc. Et puis un titre pareil, ça interpelle à tarte. C’est ainsi que muni de mes deux compères, l’ami Chereau et l’ami Hardyvic, je m’engouffre dans une salle obscure de Montparnasse, et nous voilà partis pour 1h20 d’un film qui s’annonce rafraichissant, à la fois original et intimiste développant une histoire d’amour simple et belle. Hélas, ce ne fut pas tout à fait le cas.
Cela démarrait pourtant de la meilleure des manières avec la mise en place immédiate d’un cadre provincial fort appréciable dégageant une immense sérénité et promettant un rythme contemplatif apaisant. L’arrivée de notre grand échalas mutique de super-héros dans le Sud de la France permet une kyrielle de longs plans de nature, les clapotis de l’eau, le bruissement du vent dans les arbustes, un crépuscule. Puis vient la rencontre amoureuse et les premières complications. Croisements de regards durant une petite fête de village, sourire de Vimala Pons, et paf le premier baiser. Bon soit, ça va un peu vite pour moi surtout que j’ai du mal à comprendre ce que la ravissante Lucie trouve au Vincent prostré, à moins que Thomas Salvador ne soit persuadé de son charisme naturel… Un premier raccourci trop facile. Reconnaissons tout de même que cette scène de zoubi est particulièrement réussie, un jeu d’approches successives subtiles, et une tension électrique au bout des lèvres avant la fougue de l’étreinte amoureuse. Puis arrivent les scènes de couples et c’est là qu’on commence à remettre sérieusement en doute les talents d’écritures du jeune réalisateur. Il semble vouloir peindre l’intimité de deux amants, de deux êtres humbles et rayonnants dans leur simplicité et dans leur spontanéité. Sauf que l’énergie espiègle de la jeune femme contraste violemment avec le silence narcotique d’aquaman. J’ai d’abord pensé que le mutisme de Vincent était uniquement la preuve d’une introversion et qu’il cachait une intelligence transparaissant dans ses yeux. Et en fait je me suis rendu compte que ce n’était pas un type simple, mais un simplet. Cela se confirmera plus tard quand après avoir échappé aux policiers, il se rend directement chez sa copine pour se rendre compte que les agents ont pensé la même chose, bah oui triple con, ou quand il reste dans son camion en attendant de se faire retrouver par les forces de l’ordre. Il en va de même pour la créature féminine. En s’évertuant à représenter les personnages les moins sophistiqués possible, il va trop loin et les amoureux franchissent la limite de la stupidité teintée de niaiserie. L’immense sensualité d’un plan décrivant le glissement de deux corps nus l’un sur l’autre est annihilée par la réplique conclusive la plus conne et le rire le plus demeuré : « la caresse la plus longue du monde ouarf » alors que ça se passait de mots putain. La grâce de la demoiselle est supplantée par une puérilité hautement agaçante si bien qu’au lieu d’être touché par la relation amoureuse, on éprouve juste de l’indifférence voire… de la consternation. Ils n’ont rien à se dire, ils doivent se faire chier grave quand même. J’en viens alors à me demander si l’absence de dialogues dans le film n’est pas autant la dissimulation de la nullité de monsieur Salvador qu’un choix artistique. Et puis la course poursuite d’une intensité sans égale puisqu’inexistante, parlons-en. Je ne demande pas un pastiche de scène hollywoodienne bien lourde mais au moins un peu de tension ça fait pas de mal non plus, à part reprendre des éléments bidons de films d’agents secrets genre la goutte d’eau qui perle sur l’officier depuis le pont, on a pas grand-chose à se mettre sous la dent.
J’aimerai aussi revenir sur le """"""concept"""""" du long-métrage. Certes, il n’est pas trop trop mal exploité et on nous offre quelques scénettes amusantes, je pense à la destruction du mur ou le mouillage de main. Pourtant, on ne voit pas bien où le sieur Salvador veut en venir, il ne prétend tout de même pas dénoncer le rejet des différences ? On ne va pas me faire avaler ça, non. C'est bien gentil de vouloir se jouer des codes de la superproduction Marvel mais c'est mieux d'avoir un message à faire passer derrière et de pas uniquement avoir pour objectif de développer une ambiance paisible sans effets spéciaux à outrance, ce qui tout à fait louable mais qui ne suffit pas à intéresser le spectateur qui finit par sombrer doucement dans les abysses de l'ennui.
Mais alors après une telle diatribe, pourquoi un 5 ? Et bien parce que c’est court, que la photographie est relativement jolie et que certaines scènes sortent du lot comme la reprise du baiser à l’envers de Spiderman qui ici prend plutôt la tournure d’un 69.
Woe
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le 25 févr. 2015

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Woe

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