Variation des thèmes et des esthétiques rohmeriennes, Vénus & Fleur est le second long-métrage d'Emmanuel Mouret, après deux courts et un moyen-métrage. Questionnements amoureux portés par une innocence surjouée, l'objet ne séduit guère, et le verbiage à l'œuvre, dans la lignée du maître, n'en atteint pas les profondeurs et n'en égale jamais les douces nuances. Vénus & Fleur est un film vide, tous les mots qu'il contient fuient à mesure que le scénario s'étiole, un film aussi négligeable que l'attention du réalisateur octroyée à la technique et à la mise en scène. Je veux bien pardonner les erreurs de jeunesse, mais je reste persuadé que nombres de films d'étudiants savent gérer plus d'ambition que ça.


Niveau technique, rien de bien glorieux : immobilisme de la caméra, approximations colorimétriques, l'ensemble est d'une pauvreté rare – quoique pas tant que ça dans notre cinéma national. Et les flirts réguliers de la bonnette son avec le bord supérieur du cadre, s'il est possible de les excuser une fois, irritent franchement quand ils continuent de se multiplier sur la fin d'un film lent et vide. Le son n'écrit rien, se contentant de tapisser, et le montage des musiques – et notamment de la première chanson russe avant même l'apparition de la jeune fille qu'il raconte – laisse à désirer.
Les filles sont belles. Mais les pauvres Isabelle Pirès et Veroushka Knoge sont également – au choix – de très mauvaises comédiennes ou des actrices totalement abandonnées, laissées à elles-mêmes. Entre elles, le jeune Julien Imbert n'a pas plus de direction quant à son jeu et si cette errance volontaire était peut-être une volonté farouche du metteur en scène, avec l'envie de renforcer l'impression de vacances et d'incertitudes, le résultat est un ennui profond, une distance incommensurable. Un obstacle insurmontable à l'identification. Le générique de fin apporte également une autre colère : celle de réaliser que le rôle du satyre qui régulièrement vient importuner les deux jeunes filles est tenu par le producteur Frédéric Niedermayer, aussi mauvais comédien qu'insupportable intrus traité pourtant avec complaisance. De quoi nourrir les polémiques #MeToo, où sous couvert de performance, le bonhomme tripote allègrement ses employées : à vomir !


Pour une découverte du cinéma d'**Emmanuel Mouret**, jeune réalisateur français prolixe et loué des critiques, la déception est grande. Certes le duo titre pétille parfois, certes leurs courbes sont affriolantes et oui, leur légèreté empreinte évoque nos âges tendres entre certitudes et timidités. Reste qu'au final *Vénus & Fleur* ne raconte rien d'autre qu'une amitié bancale et que le seul dépassement du film, le seul trajet étudié est d'une insignifiance rare à mes yeux. Autant parfois les lenteurs de Rohmer finissent par dévoiler une sensibilité juste et lumineuse, autant cet objet qui y ressemble dans la forme, malgré les clartés méditerranéennes, n'est que vide insipide que rien ne vient relever.

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le 8 janv. 2021

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