Ça y est, la boucle est bouclé.
Je me suis maté "Une Histoire Vraie", pas un grand défi en soit, c'est juste que je viens de regarder le dernier long métrage, de ce cher Lynch. 10 films, enfin 10 long métrages, de Eraserhead à Inland Empire.
Je tiens donc, à travers cette critique, non pas faire l'éloge d'Une Histoire Vraie car certains l'on déjà fait, le font ou le feront mieux que moi sans aucun doute.
Je tiens à travers ces quelques lignes, qui n'auront certainement aucune influence, aucune conséquence, faire un hommage à ce cher David, cet artiste incontesté du 7e art, qui est cependant largement controversé.


Je n'ai que 17 ans, je n'ai vu mon premier Lynch qu'à l'age de 13 ans, même si son nom à de nombreuses fois fait écho dans mes oreilles avant. Je ne connais alors le cinéma Lynch que depuis 4 ans (calcul très difficile, j'ai du me servir de ma calculatrice). Je ne suis donc pas comme peut -être certains membres de ce site, un fanatique incontesté de ce grand homme, je n'ai ni connu eraserhead dans les années 70, ni vu aucun de ce film au cinéma ou encore attendu son prochain long métrage à l'affiche.
Cependant, je pose toujours un regard attentif sur chaque chose que je voit. J'ai mis 4 ans à voir tous tes films David, ce n'est pas par fainéantise, loin de là, mais car j'ai pris le temps de voir et de revoir (etc) certains d'entre eux.


Aujourd'hui tu comptes parmi mes réalisateur favori. Mais ce n'est pas seulement ton style particulier, mystérieux, voir même labyrinthique qui m'émeut, qui me plait, que j'encense et qui pourtant est largement a l'origine des controverses de ton cinéma. Ce n'est pas seulement ta maîtrise incontestée de la caméra, de tes plans magnifiques, esthétiques, de tes transitions hautement maîtrisées, puissantes voir mêmes provocatrice avec les fondus en vert, jaune et rose dans Sailor et Lula.


Ce qui fait de ton cinéma l’hégémonie du 7e art, c'est avant tout pour moi la puissance de tes films.
Je ne sais pas pour vous, lecteurs, mais ce chaînon essentiel qui me permet de "ranger" un film dans des sortes de "catégories", de les noter, ce sont les émotions, les sentiments, qui créent une puissance incommensurable, qui nous permettent de vivre le film et non plus de simplement le regarder. Celles qui font battre nos cœurs au rythme de la musique, qui des fois stoppent les battements quelques secondes, les accélèrent ou les ralentissent. Les émotions qui nous prennent au corps, qui nous font hérisser les poils par leur toute beauté
A mes yeux, ce qui différencie un bon film d'horreur d'un mauvais c'est avant tout le suspens, l'agréable et effrayante sensation que le metteur en scène joue avec nos émotions, de même pour un film romantique : en est-ce vraiment un si les acteurs, le mise en scène, les couleurs ne débordent pas de sensualité ?
Un film se doit de véhiculer une force des émotions, celles qui nous font battre le cœur , celles qui nous montre la beauté des choses, leur puissance.
Lynch est capable de faire ressentir, avec tous les moyens que lui permette le cinéma, n'importe quelle émotion. Je prendrais le cas de Lost Highway pour illustrer ma thèse, car en effet les couleurs sombres et étriqués de la maison de Fred, l'ambiance froide, glaciale même, omniprésente dans la maison de Fred ainsi que les cassettes vidéos énigmatiques amène les émotions du spectateur au paroxysme. Même si à la première vision c'est le doute ou l'incompréhension qui domine le spectateur, nul ne peut nier la mise en place d'une ambiance noire par Lynch. De même, suit alors une scène d'amour, bien que décrivant un amour froid et impossible, d'une sensualité sans pareil. C'est la le paradoxe qui renforce avec brio l'esprit de Lynch et sa maîtrise de chaque plan.
Il filme le corps humain avec énormément de sensualité, de chaleur, et même s'il n'arrive pas à atteindre parfaitement la force du moment, il essaye néanmoins de la retranscrire avec le plus de puissance possible.


Je ne dis pas que son art est tout simplement parfait, mais la perfection n'existe pas et il essaie néanmoins de retranscrire la force de la vie, de l'amour, de la mort ou de la vieillesse, ou du moins sa vision de la chose.
Nul ne peut nier la présence d' humanité, dans les films de Lynch, autant dans ces films les "plus accessibles" (je n'aime pas dire ça), que dans les "plus complexes".
Ainsi, Elephant Man, ou encore Lost Highway font parti des très rare film qui m'ont fait pleurer, autant l'un par son humanité bouleversante, que l'autre par sa recherche continuelle d'un amour impossible, tant d'efforts vains dans nos vies pour finalement rester incomplets, seuls, malheureux et épris d'un désir insatiable


"Post Coitum Animal Triste"


De même Sailor et Lula, Mulholland Drive ou encore les 7 derniers jours de Laura Palmer traitent de ce sujet lourd et intense qu'est l'amour, le désir, l'insatiabilité de celui ci et finalement le malheur.


Je ne cherche pas à faire changer d'avis les gens, ni à les convaincre ni à leur démontrer quoique ce soit. Je cherche seulement à expliquer comment le cinéma de Lynch me touche, m'affecte au plus profond de mon être.
Beaucoup qualifient son cinéma de bizarre et dérangé. Si bizarre veut dire novateur et original, alors on se doit effectivement de dire que Lynch est bizarre, que son oeuvre est telle quelle. En effet, il filme de façon décousue, quasi labyrinthique et singulière des choses qui sont pourtant simple, dont le scénario pourrait tenir sur seulement quelque pages...
Filmer quelque chose de concret, de simplissime en lui donnant une forme mystique, mystérieuse, limite abstrait.
Certains diront, penseront alors que Lynch n'est qu'un fumiste, qui prend un malin plaisir à créer des scénarios trop alambiqués, sans queue ni tête en pensant à tous ces pseudo-intellos qui chercheront en vain une quelconque visée ou interprétation. Certains penseront qu'il ne s'agit là que d'un délire d'un mec, que certains pseudo-élistes se régaleront à chercher sans fin un but au film, une sorte de branlette intellectuelle
Ce point de vue est défendable, peut-être que ce n'est pas un génie, peut-être est-ce un gros fainéant ayant une trop grande estime de lui.


Mais il faut peut-être recentrer les choses en se disant que le cinéma en lui même n'a pas de visée, le cinéma se ressent, il ne sert pas seulement de support visuel.


En effet, c'est à ce moment là où le cinéma de Lynch sort du lot, il essaye de décrire des choses indescriptibles. Mulholland Drive, Lost Highway et Inland Empire ont en commun le fait qu'il traite du rêve, du désir, de l'insatiabilité du désir. Pourtant, le rêve n'est t-il pas d'une construction étrange, non conventionnelle ? Alors que Freud nous apprend que chaque rêve a un sens pour le rêveur, ne doit on pas concevoir que les films de Lynch ont un sens, une visée ? On ne pourra pas bien entendu comprendre entièrement l'oeuvre de Lynch car celle-ci lui est propre, mais sa compréhension partielle est cependant différente pour chaque individu.
C'est à ce moment la que le cinéma de Lynch montre sa puissance, il arrive à créer une ambiance propre au fond de l'histoire. Les 3 films cités sont la représentation de rêve, d'amour, de désir insatiables par le biais d'une réalisation qui incarne et reprend les codes du rêve. La forme rejoint le fond.
De plus, la construction de ses films est particulière mais ceux ci aspirent toujours à un seul but : décrire quelque chose d’indescriptible, et la mort, la vie, l'amour, la passion sont des thèmes récurrents chez Lynch, chacun de ses films sont la représentation de choses abstraites comme le mal.
Beaucoup encensent la poésie, mais la poésie n'a pas de visée, elle décrit uniquement ce que le poète voit ou ce qu'il ressent, qu'il ne voit pas, quelque chose d'indescriptible, de spirituel. Elle cherche à capturer l'instant présent et à lui donner forme. La poésie est abstraite alors pourquoi certains idéalisent les métaphores de P. Eluard d'une part et renient le travail de Lynch d'autre part, ou du moins sa pensée ?
Ne cherchez donc pas vainement à comprendre, il faut se laisser porter par la poésie de son oeuvre aussi singulière soit elle. Si vous ne comprenez pas, re-regardez les, ou du moins n'allez pas chercher sur Wikipedia des pseudo-révélations...


Enfin, si certains restent réticent à la pensée du réalisateur, sa manière de présenter ses idées, ils ne pourront pas remettre en question son travail de metteur en scène. Effectivement, Lynch reste à mes yeux l'un des meilleur directeur d'acteur que je connaisse. Il sait tirer profit au maximum de ses acteurs : Bill Pullman et Naomie Watts ne brilleront, à mes yeux jamais autant que dans ses œuvres.
Il sait agencer les corps, les filmer de manière à capter la puissance de l'homme et surtout de la femme. A travers ses gros plans, et ses très gros plans, il capte chaque regard, chaque mouvement, décrit avec grâce et sensualité. Il arrive à mettre en avant l'unicité de chaque être (il a même réussi à rendre, à mes yeux, Laura Dern irrésistible). Sa proximité avec, les acteurs, la description de chaque partie de leur corps crée une vague de beauté insoutenable. Contrairement à James Cameron avec un certain "Terminator", Lynch exulte dans la mise en scène du corps et est capable de faire ressortir la passion, le coté sauvage dans chaque scène de cul.
Sa façon de filmer, si intime avec ses acteurs, donne à chacun de ses films un coté humain sans pareil, chacune de ses œuvres déborde d'humanité, que ce soit un hommage ou une critique de celle ci.


Enfin, afin de terminer cet éloge de, pour moi, ce grand artiste, ce génie, je dirais qu'avant même d'être un cinéaste accompli, il est avant tout un cinéphile et un mélomane.
Nul ne peut comprendre entièrement son oeuvre, sans même entrevoir les nombreux clins d’œil qu'il fait à ses maitres, au cinéma. Autant dans Lost Highway, ne comprenant le rôle du personnage énigmatique avant d'avoir vu Le Septième Sceau de Bergman que dans Sailor et Lula, avec les nombreuses références au Magicien D'Oz.
De plus, à l'image de son oeuvre, il montre dans ces films ses goûts musicaux symbole de son éclectisme. En effet, seul suffit Sailor et Lula pour illustrer le propos, passant du jazz, au métal, au rock, à la pop. Tantôt la musique utilisé comme bruit de fond, tantôt puissante forte et crescendo accentuant les émotions du spectateur.
A mes yeux, rien de plus beau que cette scène dans la nuit sombre, Nicolas Cage au volant, Laura Dern près de lui et Wicked Games qui résonne en fond...


PS : je m'excuse auprès de ceux qui attendait une critique sur le film en particulier... (Je la ferai certainement à la suite de mon pavé, un jour, si j'ai le courage)

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le 28 déc. 2016

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