Premier film à sketches du cinéma français, Un carnet de bal souffre malheureusement des écueils du genre, à savoir les inégalités des sections.
Une jeune veuve, que joue Marie Bell, va retrouver un carnet vieux de vingt ans où elle avait noté les dix hommes avec qui elle a dansé lors de son premier bal. Elle va se mettre en tête de les rencontrer pour voir ce qu'ils sont devenus, et qui, renouer avec l'un d'entre eux...
Le résumé explique bien pourquoi c'est découpé en plusieurs sketches, mais la présence de six scénaristes explique aussi que le tonalité de chacune d'entre elles diffère quelque peu. Mais ce qui revient souvent, c'est une forme de mélancolie ; d'une part de cette femme, qui vit à travers les histoires de ces hommes ce qu'elle n'a pas vécu, sans doute enfermée dans un mariage trop sage. Et d'autre part, de ces prétendants qui ont l'air d'être passés à côté de quelque chose de plus grand. Certains ont réussi leurs vies, d'autres non, mais je retiens surtout l'histoire avec Raimu.
Ce dernier joue le maire d'une petite ville qui va se marier avec celle qui fut sa femme de ménage. En quelques scènes, et la perte d'un bouton de col, l'acteur nous fait revivre l'esprit de Pagnol, où un petit rien est un grand drame. Puis vient le mariage, et les retrouvailles nostalgiques avec la jeune veuve, pour une scène bouleversante entre Raimu et celui qui incarne son fils adoptif où un frisson de César se fait ressentir ; ces quinze minutes (environ) de la présence de l'acteur sont juste magnifiques, prouvant qu'il fut un des plus grands du cinéma français.
Évidemment, tout n'est pas du même acabit (Louis Jouvet, Harry Baur, Pierre Richard-Wilm), mais il y a certaines histoires plus tragiques, et d'autres où la légèreté fait son apparition, à l'instar de la scène avec Fernandel, très touchant et pour une fois n'en faisant pas trop.
Outre certaines histoires pas toujours fortes, il est dommage que Marie Bell ne soit pas celle qui intéresse le plus le réalisateur ; elle est une sorte de relais entre chacun des hommes, et elle apparait comme une feuille vierge. Néanmoins, il y a une très belle scène, celle du bal vingt ans plus tôt, qui fonctionne comme un rêve, avec les scènes tournées à l'envers puis qui apparaissent à l'endroit dans le film.
Cela dit, je suis peut-être sévère avec Un carnet de bal, ce qui est toujours le danger de tout film à sketches, mais rien que la présence de L'IMMENSE Raimu vaut le coup de le voir, en plus de proposer une réflexion sur nos souvenirs vingt ans plus tôt.