John Schlesinger est un cinéaste passionnant, qui m'intéresse beaucoup, mais il ne jouit pas - encore ? - en France de la réputation qu'il mérite et qu'il a dans le monde anglo-saxon. En 2012, la France sort donc enfin ses trois premiers films, jusqu'ici inédits, réalisés entre 1961 et 1965. Celui-ci est le premier. Situé dans l'Angleterre du tout début des 60's, pas encore franchement atteint par la vague pop, mais ça ne va pas tarder, A Kind Of Loving se consacre à filmer un couple. Deux jeunes gens qui travaillent dans la même entreprise - il est dessinateur industriel, elle est secrétaire -, lui l'aborde, elle accepte, ils sortent au cinéma, puis s'embrassent. S'aiment-ils ? on ne le sait pas plus qu'eux. Ils s'aiment bien c'est certain, ils se désirent aussi, mais c'est sans doute les conventions qui les ont fait se rapprocher. Ils sont à l'âge où cela se fait de sortir avec des jeunes gens de son âge, de se mettre en couple. Et puis voilà, Ingrid (prénom que ses parents lui ont donné à cause de Bergman) tombe enceinte de Victor (jeune et déjà excellent Alan Bates). Et les conventions, une fois de plus, font qu'ils doivent se marier. Sans argent, et donc sans fête, sans réception. Et puisqu'ils sont sans le sou, ils vont vivre chez sa mère à elle, une vieille mégère aigrie et désagréable, qui a sans doute tous ces défauts-là à cause d'une profonde tristesse et d'une grande solitude. Et évidemment, la cohabitation se passe mal. Poussé à bout, Victor se casse. Mais tout seul, il est encore plus malheureux. Poussé par ses parents, il va retourner auprès d'Ingrid, et ce clash leur donne la force de quitter le foyer de maman pour s'installer tous les deux. Un appart' qui n'est pas loin du taudis, mais il faut bien commencer. Et puis au moins, ils sont ensemble, et peuvent tout recommencer.
C'est assez hallucinant de voir à quel point Schlesinger, dès son premier film, est déjà un très grand metteur en scène. Ce film est très emprunt de la culture début 60's et rappelle dans sa forme, des œuvres des 4 coins du monde : les premiers Truffaut (des Mistons à Tirez sur le Pianiste), Forman, ou de Palma. Le cinéaste parvient à merveille à capter des choses essentielles dans les rapports de couple, sans tomber dans l'analyse psychologique ou le didactique à deux balles. Avec beaucoup de finesse et de non-dits, il scrute aussi une société en pleine mutation, et la difficulté qu'on les jeunes gens à s'y retrouver, à s'y épanouir et plus encore à s'aimer.
FrankyFockers
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le 5 oct. 2012

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