Tuer !
7.2
Tuer !

Film de Kenji Misumi (1962)

Véritable champ d’expérimentation au visuel léché, Kiru est un Misumi caractérisant parfaitement l’œuvre d’un cinéaste dont l’œuvre demeure incontournable dans la cinématographie du film de sabre nippon. Style tranchant, cadrage innovant, expérimentations esthétiques, et ultra violence couleur sang. L’action-painting matérialisée.


Tuer, est un film court et concis, car allant toujours à l’essentiel, l’action-réaction au service d’un visuel chiadé et millimétré qui ne s’embarrasse jamais des apparats de la rationalité explicative.
L’intro nous propose une narration s’apparentant quasiment au conte. La naissance du héros et son rapide basculement dans l’univers impitoyable d’une société où l’honneur et les rituels s’y liant, sont les premiers attributs. On peut sacrifier tout le monde, même les êtres les plus chers, à cette mascarade rituelle à la rectitude maladive.


Le héros de Tuer, interprété par Raizo Ichikawa, l’acteur Œdipien par excellence du cinéma japonais, est une victime de cette société masochiste du shogunat. Le fameux Shingo, dont l’habileté au sabre est jalousée au plus haut sommet, est la fierté d’un père qui en fait n’est pas le sien, un vieux samouraï qui l’a adopté après que sa mère a été exécutée par son propre père. Toute la filiation œdipienne est déjà mise en avant dans ce chambra dont le héros est en quête d’une identité qu’on lui a caché.


Visuellement le film est somptueux. Chaque plan est admirablement orchestré pour tirer le meilleur d’un scénario anecdotique dont la mise en application n’est pas la principale idée de Misumi, mais un moyen de mettre en exergue ce façonnage de l’impression restitué par un style quasi mystique. Car c’est bien d’ellipses et de surimpressions qu’est construit ce chambara à la métaphysique rituelle, s’affranchir de la (sur-)narration pour la remplacer par l’imagerie dédiée. Du grand travail d’esthète névrosé, obsédé par la stylisation.
En ressort un film direct et franc du collier. De ces œuvres ne lésinant pas sur l’obscure idée que le cinéma est avant tout visuel, conceptuel.

philippequevillart
8

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le 20 juin 2018

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