Transes
6.6
Transes

Documentaire de Ahmed El Maânouni (1981)

Les "Rolling Stones de l'Afrique " ?

Casablanca, années 1970.


Après une décennie post-indépendance de grande turbulence politique et contestataire marquée par de l’agitation populaire et deux tentatives miraculeusement ratées de coup d’état militaire, une chape de plomb répressive s’est abattue sur le pays désormais étouffé par une atmosphère de peur et de paranoïa, ouvrant la période qu’on nommera plus tard « années de plomb ».


Au milieu des quartiers populaires de Casablanca s’élevait une voix qui cristallisera l’expression de la douleur populaire et d’un rêve d’ailleurs. Nass El Ghiwane, légendaire groupe de musique qui mêle chants traditionnels teintés de psychédélisme et variété proche-orientale, devient malgré lui le représentant d’un certain espoir populaire. Avec des textes très littéraires et poétiques qui décrivent des réalités sociales autant qu’ils narrent des légendes populaires, la notoriété du groupe a largement dépassé les frontières nationales et a fait d’eux un patrimoine de la culture arabe.


On ne s’y attend pas forcément avant d’aborder ce documentaire qui se propose de suivre les quatre membres du groupe, mais voilà un film étonnant et même unique qui arrive à non seulement saisir la puissance de leur musique, mais de faire de celle-ci son principal matériau cinématographique. On a en réalité un énorme collage formel non linéaire d’images d’archives, de concerts, de scènes plus classiquement de documentaire, de scènes réelles, voire des envolées poétiques et même complétement mystiques lors des étonnantes scènes de transes collectives.


Honnêtement, je ne m’attendais pas à un truc aussi inventif et avant-gardiste formellement qui arrive à restituer l’ambiance artistique de ces années-là, à dessiner ici et là quelques scènes drôles et surtout une réflexion à la fois concrète et universelle de la condition d’artiste et du métier d’artiste et sa place dans la société.


Je comprends du coup qu’il fasse l’objet d’un petit culte et d’une certaine fascination tellement il arrive à brasser énormément de choses et à saisir un certain esprit d’une époque … Scorsese avait vu juste, une fois de plus.


PS : Par contre Marty, rien à voir avec les Stones musicalement. A la limite en forçant beaucoup, on peut leur trouver un petit côté The Doors.

Mr_Purple
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le 27 avr. 2021

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