Toy Story 2
7.2
Toy Story 2

Long-métrage d'animation de John Lasseter, Ash Brannon et Lee Unkrich (1999)

« That was definitely Woody’s finest hour ! »

Après le succès mitigé de 1001 pattes, que pourtant j’adore personnellement, Pixar revient immédiatement au classique par sécurité en poursuivant sa saga originale : Toy Story. Il est intéressant de noter que le retour à une licence déjà établie pour une suite ambitieuse est assez inhabituelle dans le milieu de l’animation, souvent ces suites sont relayées à des studios peu expérimentés avec peu de moyens pour des sorties discrètes, ce qui n’est donc absolument pas le cas ici. Toy Story 2 doit retrouver les sommets commerciaux et critiques du premier épisode et John Lasseter en personne reprend les rennes pour y parvenir.


SCENARIO / NARRATION : ★★★★★★★☆☆☆

Afin d’approfondir ce monde de jouets, le point de départ de cette suite est l’ajout de la perspective de l’adulte collectionneur, le réalisateur principal en étant lui-même un. L’idée est très intéressante car au-delà de faire un nouvel écho à la réalité pour cette œuvre de fiction, elle permet d’une part de travailler à la hauteur de la perspective d’un enfant la notion du temps qui passe, les jouets modernes ne sont pas voués à remplacer définitivement les anciens, ces derniers trouvent tout simplement l’attention d’un autre public et représentent une époque bien particulière, un autre regard sur le vieillissement.


D’autre part, elle permet de continuer de développer l’histoire des jouets par leur origine, la collection à laquelle ils appartiennent, l’univers auquel il se rattache plutôt que de simplement se focaliser sur leurs caractéristiques et leur personnalité. C’était déjà un point majeur du premier film avec Buzz mais je trouve parfaitement approprié d’avoir approfondi et élargi l’univers dans cette direction. Le développement du jeu vidéo dans le récit en parallèle des jouets est aussi intéressant pour ancrer l’univers dans son époque et ses évolutions, tout en pavant la voie assez intelligemment à l’adaptation vidéoludique du long-métrage à une époque de popularisation du média.


Woody peut profiter de son parcours psychologique du premier épisode pour être très rapidement charismatique dans le récit, fragilisé par le temps il reste humble, voyant un camarade en danger il se porte à son secours… ce qui en fait un bien meilleur protagoniste à mon sens pour le plus grand bénéfice de ses aventures que dans le premier film. On pourrait reprocher que Buzz stagne un petit peu quant à son intrigue qui reste plus ou moins la même mais qui est présentée différemment avec cette idée de l’opposer à son ancien lui, donc je trouve que ça passe bien au final.


Accordant plus de présence féminine au casting que son aîné, la survoltée Jessie remplit assez bien ce rôle. Pour l’anecdote, les réalisateurs confient eux-mêmes que l’équipe était essentiellement masculine sur le premier film et que c’est l’arrivée d’animatrices les années suivantes qui a conduit à cette évolution. Ça ne les empêchera pas pour autant de se faire plaisir en jouant par exemple sur les clichés avec les Barbies mais ça répond parfaitement aux codes de l’univers et à l’autodérision dont ils font preuve sur leurs jouets favoris, je n’y vois donc pas un défaut.


Un twist est également très bien pensé avec un jouet surprenamment antagoniste :

Le personnage du chercheur d’or est très bien écrit pour que l’on voit en lui le personnage avisé et bienveillant qu’il prétend être au premier visionnage et que l’on comprenne le double sens derrière la plupart de ses interventions au second visionnage pour que la révélation sur ses motivations demeure cohérente malgré la surprise. C’est donc un retournement de situation surprenant, cohérent et pertinent, le premier même à mon sens pour le studio qui affichait jusque-là assez rapidement les motivations de ses personnages principaux sans essayer de créer la surprise à ce niveau.

Les multiples clins d’œil à l’univers de 1001 Pattes confirment l’anecdotique mais sympathique croisement des univers, de la même manière que le personnage du joueur d’échec devient un caméo récurent, utile au récit et dans un rôle positif, rappelant l’histoire du studio au passage. Les références à d’autres œuvres populaires parachèvent le tableau avec un plan repris de Jurassic Park, des dialogues faisant écho à ceux de Star Wars… C’est donc un bilan global très positif que je peux tirer de l’histoire de Toy Story 2 même si je garde une large préférence personnelle pour celui de 1001 Pattes.


RÉALISATION / ESTHÉTISME : ★★★★★★★☆☆☆

La première chose à dire sur la réalisation de Toy Story 2 est tout simplement le première que le film nous montre : le contexte de science-fiction que peut offrir Buzz l’éclair est davantage exploité avec cette introduction spatiale très généreuse en action spectaculaire, reprenant les techniques d’animation de foule de 1001 Pattes, et servant d’écho à la mise en scène dans le monde réel où Buzz reproduit ces idées. C’est à l’image de tout le film, plus généreux en scènes d’action et plus ingénieux quant à l’utilisation des différentes caractéristiques des jouets et de leur possible synergie.

Plus de jouets sont impliqués dans ces scènes d’action et leurs caractéristiques physiques mêlées ensemble dans un environnement urbain qui les écrase permet d’assurer un divertissement de très bonne facture, une nouvelle fois référence dans le milieu de l’animation 3D alors que celle-ci commence tout juste mais évolue à grande vitesse, et sous les coups de pression de Pixar justement en fer de lance avec ce type de long-métrage. Les animateurs profitent ainsi de ces avancées technologiques très rapides du numérique, des découvertes faites lors de la réalisation de A Bug’s Life et du budget toujours très conséquent, n’atteignant pas tout à fait la centaine de millions de dollars mais presque.


Ainsi, les animations sont plus décomposées pour des jouets très désarticulés, les pelages sont beaucoup plus détaillés rendant la fourrure du chien plus réaliste, les particules sont plus fines et nombreuses rendant la poussière très évoluée, les mouvements en arrière-plan sont plus nombreux avec cette végétation qui oscille au gré du vent… Même si 1001 Pattes me paraît être encore un cran au-dessus tant il avait pu briller sur la question, comme sur beaucoup d’autres, Toy Story 2 est très abouti sur le plan technique, confirmant Pixar comme une valeur sûre dans le domaine, qu’il change d’univers ou l’approfondisse.


On retrouve quelques effets artistiques discrets mais pertinents comme avec les couleurs qui se font légèrement moins saturées alors que le ton joyeux du film se perd, plus chaleureuses quand une personnage prend une décision qu’il croit bonne… Certains regretteront que le character-design se repose un peu beaucoup sur le premier film avec finalement peu de jouets et de personnages humains inédits à bien y regarder, mais comme je trouvais qu’il y en avait trop dans ce premier Toy Story, ça me va plutôt bien pour ne rien vous cacher.


Les effets sonores sont toujours aussi réussis pour édulcorer la violence, amplifier une ringardise… C’est surtout la musique qui a gagné en qualité d’après moi, notamment l’unique chanson du film : When She Loved Me, qui profite d’un doux accompagnement au piano et d’une très belle voix que je préfère largement à You've Got a Friend in Me. D’ailleurs, John Lasseter reconnaît la réussite en ces termes :

L’un des moments les plus forts de ma carrière restera à jamais la séance d’enregistrement entre Randy Newman et Sarah McLachlan. Il était seul au piano et elle chantait. On en avait les larmes aux yeux tant l’émotion qu’elle y a insufflé était forte.

CONCLUSION : ★★★★★★★☆☆☆

Tirant profit des avancées technologiques, intensifiant l’action et maîtrisant sans doute mieux son sujet, John Lasseter porte la saga Toy Story un cran plus haut à mes yeux avec ce deuxième épisode, largement récompensé par son succès commercial dépassant les 500 millions de dollars pour la première fois du studio. Il s’inscrit ainsi parmi les suites directes les plus réussies, occupant une place de premier choix à ce titre dans l’histoire de l’animation tout particulièrement, et positionne la saga de jouets comme la saga historique mais aussi principale de son studio.

damon8671
7
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le 19 nov. 2022

Critique lue 12 fois

damon8671

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