Woaw.
J'ai vu une oeuvre à la croisée entre Fast and furious, Crank, Taxi, Vidocq, et les films de Luc Besson, et qui combine tout leur mauvais goût.
Ça s'appelle TORQUE.
En gros, le film présente des affrontements entre plusieurs groupes de motards, mais passons sur l'intrigue débile, pourvue de twists bidons et de motivations brouillonnes, car Torque mise tout sur sa mise en scène.
Le réalisateur, Joseph Kahn, se spécialisait jusque là dans le clip, et ça se voit : son premier long-métrage est un clip d’1h20, qui nous assène une grosse charge de mauvais goût à chaque instant, et ce dès le premier plan, pour ne jamais s’arrêter par la suite.
Il y a de l’action non-stop, tous les évènements s’enchaînent sans aucun répit, dès qu’un personnage quitte l’écran un autre arrive, stoppant sa roue de moto juste devant la caméra.
Tout doit aller vite, vite, très vite, toujours plus vite, et donc il y a forcément des faux-raccords de partout. Le héros grimpe sur sa moto, le plan suivant il a ses lunettes de soleil sur le nez ; pas le temps de le montrer les enfiler, ça ralentirait l’action !
Autant dire que les personnages, déjà peu développés par l’écriture, n’ont jamais le temps de réellement exister, ni les scènes de durer suffisamment pour avoir un minimum de substance. Même quand un personnage est un deuil, contemplant un instant le collier de son frère défunt, on ne s’attarde dessus que pendant trois plans (soit environ 2 seconde de film, quoi).
Les reaction shots sur les personnages secondaires, totalement inexistants, semblent avoir pour seule fonction de faire varier le montage.
Et les seuls plans qui durent plus de 4 secondes sont des panos ou des travelling compensés, un effet par ailleurs totalement gratuit, comme à peu près tout le reste.
Pendant les combats à mains nues, on ne comprend rien du tout à ce qu’il se passe… mais pour le reste, je dois admettre que Kahn a fait beaucoup d’efforts pour qu’il y ait des trouvailles visuelles dans tous les plans… Par rapport à un nanar comme Vidocq, on voit dans Torque que le réalisateur a une plus grande maîtrise de ses outils, il ne filme et ne monte pas n’importe comment… mais le résultat est quand même d’un mauvais goût extrême.
Torque mise tout sur les effets qui auront un impact instantané, peu importe que les personnages et leurs rapports n’ait aucune cohérence et aucun fond : il faut avant tout qu’ils débordent de coolitude en permanence.
Qu’ils soient gentils ou méchants, qu’ils soient bikers, flics, ou gangsters, tout le monde doit être jeune et branché à fond, ramenant leur attitude à une accumulation de clichés, qui a l’effet inverse que celui escompté : les personnages sont ridicules au point d’en éclater de rire.
Les moues bougonnes, les airs prétentieux, et les poses forcées pour les mecs, les positions toujours lascives et le léchage de lèvres constant pour les filles, et les looks excessifs pour tout le monde (il y a une flic fringuée comme Niobe dans Matrix reloaded ! Elle serre la main d’un type, en regardant ailleurs… trop cool quoi). Rien n’est naturel, c’est un show permanent.
Et les punchlines sont complètement randoms et tombent automatiquement à plat, elles font rarement sens, et il y a comme une fixation sur les mots "cul" et "merde". Je ne sais pas si on peut qualifier l’"humour" comme tel. C’est ahurissant.
Ce que je ne comprends pas, c’est que les héros de Torque se moquent des automobilistes, qu’ils considèrent comme des idiots… ("cars suck" indique un panneau en début de film, subtil) mais tous les bikers font preuve d’une beauferie semblable : ils chopent des meufs avec leurs compétences au guidon, et les filles sont toutes à un moment ou un autre présentées comme des objets sexuels (oui, même la copine du héros : il y a cette scène où la méchante lui tape le cul, sans raison).
En même temps l’affiche et la bande-annonce clament fièrement "par les producteurs de Fast & furious, SWAT et XXX", ça en dit long.
Paradoxalement, à vouloir aller vite par tous les moyens, Torque finit par paraître plus long qu’il ne l’est… car c’est un peu éprouvant à force.
Et encore, les 15 dernières minutes semblent dire "vous n’avez encore rien vu", faisant exploser les limites du n’importe quoi et du CGI raté.
Bref, Torque est un nanar magnifique, magique même. Le genre d’OVNI devant lequel il est impossible de décrocher, et qui fournit à chaque scène une raison de rire et d’halluciner.
EDIT : un ami blaguait au début du film en imaginant qu'un camion qu'on voit est celui de Duel. Et en fait... c'est vraiment le camion issu de Duel !