La filmographie de Sion s'épaissit avec un film en parfaite continuité avec Why don't you play in hell, tout aussi survolté, jouissif, généreux, au rythme maîtrisé de bout en bout, qui arrive à s’émanciper de toute schématisation et prône la surprise et l'imaginaire à chaque nouveau plan. Le plus drôle, c'est que Tokyo Tribe est une sorte de comédie musicale chantée presque à chaque scène, une sorte de méga-clip de rap à la fois tendre et génialement satyrique sur les cliques de gangsters, leur manières, leurs parlé, leur fausse assurance, leur sens de la famille comme de leurs rituels. La génialissime énergie qui en découle pendant ses deux heures fait un bien fou, sans jamais se complaire dans le moindre discours ou dans le n'importe quoi, Sono Sion au contraire éclate encore une fois comme l'équilibriste parfait de tous les autres films qui veulent à tout prix impressionner et choquer, il délivre une moisson tendance baston dévergondée et décharge en opéra-comique d'une puissance et d'une efficacité idéale, avec son lot de personnages tous plus savoureux les uns que les autres. Ce n'est pas aussi parfait que le précédent, mais c'est tout aussi passionnant et emporté. Faire ce genre de film - avec des émanations particulières aux grands bouleversements du Japon - tout en gardant la pêche, après avoir réalisé des films aussi différents que réussis, arriver à se renouveler de la sorte et tourner autant, c'est juste dément. Maintenant qu'il a un sacré budget et un studio entier à son service, espérons qu'il ne finisse pas par devenir une marque de fabrique (car malgré toute l'évolution technique de son cinéma, on voit encore ici le charme de l'ombre d'une caméra effleurer l'épaule d'un acteur) ... être une déité de cinéma est bien suffisant !