par Elysabeth François
Film qui marque le retour à Hong Kong du génial Tsui Hark, démiurge omnipotent de la production cinématographique locale pendant les années 80, Time and tide tranche nettement avec son diptyque hollywoodien en tandem avec Van Damme (Double team et Piège à Hong Kong). Après avoir mis en scène les aventures presque burlesques du "légionnaire belge" (on se souviendra notamment de la course-poursuite en pousse-pousse dans Piège à HK), Tsui Hark tente ici de renouer avec un cinéma plus ambitieux en multipliant les prises de risque formalistes, au point d’accumuler les effets jusqu’à la boursouflure. Ployant sous le poids de l’afféterie visuelle, ses personnages se débattent alors vainement au sein d’un récit curieusement impersonnel pour le réalisateur de Lovers ou Green snake.
Alors que le début du film nous promet l’Apocalypse, Time and tide enchaîne sur une histoire des plus conventionnelles, programmant pendant plus de deux heures la confrontation fatale entre ses héros, Jack et Tyler. D’abord complices -ils sont tous les deux sur le point de devenir pères-, ils finiront pas être séparés par le cours des événements, en l’occurrence le retour d’anciens associés de Jack. Elliptique à outrance, le récit de cette amitié contrariée n’intéresse que très peu le cinéaste qui enchaîne les scènes et les plans comme s’ils allaient de soi. En résulte une œuvre des plus opaques au niveau du scénario et, par conséquent, une mise à distance (volontaire ou involontaire) des personnages réduits à l’état de vagues effigies. Car ce qui semble mouvoir la démarche de Tsui Hark, c’est l’organisation abstraite d’une série de combats, centrée sur la notion de chaos général qui irrigue le film. On est alors en droit d’attendre du cinéaste qu’il nous en livre une représentation inédite à la hauteur de nos espérances.
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