Sorti de son âge d'or, Kaurismäki cherchait encore des moyens d'interpréter la place de la Finlande entre les continents ; quant au fait de la quitter, il en fait une action à la fois aisée et dénuée de sens.


Contredisant toutes les cartes, c'est alors avec l'Estonie que le pays partage sa plus grande frontière ; longtemps un eldorado dans la mythologie kaurismäkienne, le pays devient cette fois presqu'aussi accessible que la Finlande l'est pour les Russes, qui se croyaient encore chez eux. Chose étrange que de jouer la carte du choc culturel quand le vrai choc tient au fait que l'on a devant soi un bloc presque solide où se mêlent URSS, Estonie et Finlande dans une sorte d'entente paresseuse.


Tournant toujours résolument le dos à la Suède, Kaurismäki fait de son peuple celui des méchants : entre les gens d'Helsinki (tous des rockeurs !) et ceux qui les méprisent, les Finlandais sont lugubres et silencieux, ne semblant pas s'être faits à l'idée de n'appartenir à aucune Europe ; ni du Nord ni de l'Est, ils sont les éternels boudeurs de deux continents et cela tombe presque sous le sens de voir en eux les plus ennuyeux compagnons de voyage.


C'est un nouveau road trip discret (sans doute un peu trop) mais toujours sur fond d'absurde que Kaurismäki développe. Un jour ou une semaine, difficile de savoir le temps qui est passé, peut-être aussi parce que le film trouble avec son propre format de 62 minutes.


Quantième Art

EowynCwper
6
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le 17 juin 2020

Critique lue 153 fois

Eowyn Cwper

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