Sortir du dogme pour affronter la réalité : Quand l’Amérique est au bord de la crise cardiaque.

Magnifique joyau de Darren Aronofsky, The Whale est à la fois d'une simplicité remarquable de par son propos et sa réalisation, tout en étant d'une richesse subtile et rare dans ses thématiques comme dans ses symboliques. C'est un petit film qui cache un grand film, voir même un très grand film, simple, racé, évident.

à l'image évidente du come-back incroyable de Brendan Fraser dont le jeu est d'une justesse impressionnante, c'est un véritable plaisir de le retrouver même si, comme un catalyseur grotesque de la métaphore du film lui même, oui, il a grossi, et bien s'il à grossi et qu'il a certainement très peur d'être jugé pour cela, il sera encore plus grossie, il sera énorme, difforme, en jouant le rôle d'un obèse répugnant et grotesque. Son apparence est alors celle d'un monstre handicapé, qui plus est homosexuel, présenté d'entrée de jeu par la première scène du film, dégoûtante, écœurante, horrible et en un instant, nous voilà projeté sans aucun détour possible dans le quotidien ce personnage : Ce méfier des apparences et des clichés. Savoir juger au delà des apparences, le premier degré est évident et même si oui, cela fait parti du message, il à bien plus à comprendre dans "The Whale".

Personnellement, j'ai trouvé le film décapant, furieusement génial et tout à fait à l'image du cinéma d'Aronofsky, je vais donc vous faire part de mon analyse car oui, ce très grand film, ne parle pas juste d'un obèse au grand cœur de la meilleur des manières et au delà de son titre qui est à la fois, le sujet et pas le sujet, ici les contraires cohabitent de la meilleur manière pour illustrer la montagne qui cache la forêt.

Je vais tenter de vous expliquer mon point de vue de la plus simple des manières, mais elle ne pourra ce faire sans une grande partie spoiler :

Spoiler "On" Commençons par l'évidence, cette rédaction est la synthèse de Moby Dick, qui envoi le message meta du film : Ce livre me fait penser à ma propre vie.

Ici il est question de l’Amérique moderne avec un grand A comme personnage principal, non pas de traiter des extrêmes de la violence physique, mais celle de la violence passive et psychologique. D'une certaine manière ce réçit me rappelle "La métamorphose" de Kafka, qu'il faut également savoir lire comme la "méta-morphose". Nous allons plonger ensemble dans le ventre de cette baleine qui a dévoré le monde au point de se retrouver au bord de la crise cardiaque. Sous ce prisme, on pourra y découvrir un dialogue interne entre les différentes facettes de ses personnalités, toutes multiples, toutes séparés les une des autres par leur besoin d'amour, à la fois égoiste mais aussi utopique, ils sont pourtant tous à l'abandon depuis leur rupture de leur communication : l’Amérique est un pays fragmenté depuis tellement longtemps pour oser regarder la vérité en face. Tous ces personnages sont condamnés sans cette réunion de famille qui dresse le bilan, tous sont perdu et comme un miroir de notre monde moderne, le cinéma leur offre ici une possibilité : la rédemption par la vérité, ce qui devient un catalyseur méta incroyable pour le spectateur. La baleine cache autre chose que l'évidence de l'apparence, elle cache même l'évidence de son propos, avec son premier degrés.

"Le roman Moby Dick d'Herman Melville raconte sa vie en mer. Au début, le narrateur Ismaël est dans une petite ville côtière, partage son lit avec un certain Queequeg. Ensemble ils vont à l'église puis ils montent sur la navire du pirate "Achab" à qui il manque une jambe et qui rêve de tuer une baleine nommée Moby Dick qui est blanche. Au fil du livre Achab affronte des épreuves. Il a dédié sa vie à tuer cette baleine. C'est triste car Moby Dick ne ressent rien et ignore qu'Achab la traque. Ce n'est qu'une pauvre grosse bête. J'ai de la peine pour Achab, car il pense que sa vie sera meilleur s'il tue cette baleine mais en réalité ça ne l'aidera pas du tout. J'étais triste en lisant ce livre et touchée par les personnages.

Je me suis sentie si triste en lisant ces chapitres ennuyeux qui font le portrait des baleines car je savais que l'auteur tentait de nous distraire de sa pauvre histoire, un court instant. Ce livre me fait penser à ma propre vie et me réjouit pour mon..."

Le film, le titre, le sujet, le personnage principal, la rédaction, tous donne le sens de ce qui doit apparaître comme l'évidence pour tuer l'évidence et en même temps rappeler l'évidence : voir au delà des apparences. Ça je pense ça tout le monde l'aura compris. Mais il veut aussi dire, ce récit est une métaphore en lui même, celle des apparences et du danger qu'elle représente, la peur de notre apparence et du regard des autres... Nous tue et plonge notre environnement dans les ténèbres.

Un seul décors, la maison à l'image de l'abandon du personnage, perdu quelque part dans l'obscurité teinté de point de lumière, comme des lampes à huile dans un port malmené par la tempête. Galerie des premiers personnages par ordre d'apparition autour de Charlie :

- Le jeune américain, Thomas, qui a grandi dans le dogme d'une secte (religion), en fuite pour ce sauver lui même et tenter d’appliquer des principes qui s'entre choque avec la réalité de ce qu'on lui a appris, il représente l'innocence manipulable qui cherche à ce libérer par ses valeurs.

- La femme asiatique Liz est une prisonnière devenu gardienne de la situation, syndrome de Stockholm ultime de l’immigration. Ce personnage est le plus perdu, déraciné et en manque de repaire, elle cherche à reprendre le contrôler de sa vie, ami, elle le soigne en souvenir de son frère, mais vengeresse, elle est complice de sa dégradation, dévoué pour le meilleur et pour le pire, ne faisant plus la différence. Chose troublante qui appuie le syndrome : elle est fille adopté du couple fondateur du dogme religieux qui a dévoré son frère.

- Le personnage principal, Charlie, intelligent et sensible, passe son temps à s'excuser. Il s'excuse d'avoir essayé de ne plus ce mentir, d'être lui même et d'être devenu lui même : Une personne débordant d'amour qui a accepté son homosexualité sans réfléchir, aveuglé par l'amour mais qui a justement, perdu le contrôle de son amour, détruisant son environnement pour devenir au yeux des autres et de lui même : un monstre.

Tous sont perdu, tous on perdu le contrôle, tous sont à la dérive.

Le contexte : C'est au moment ou la fin du monde / la fin du personnage, l'une fiction représenté par le dogme, l'autre réelle représenté par le personnage, que la vérité vas éclater. 7 jours, comme dans le dogme de la création / 7 jours pour changer le monde. Puis un écart sur "l'extérieur" dit réel, pas aussi anodin qu'il n'y parait : ici l'on parle des les élections américaines, Donald Trump donné favori. L'autre dogme, celui de la société : politique, face à la réalité sociale. C'est ici selon moi que l'indice sur ce puissant message montre le cœur et le miroir du film : Les États Unis sont perdu dans leurs contradictions et à force de manipulation sur eux même, sont sûr le point de mourir. Vous remarquerez par ailleurs qu'à chaque fois que la télé sera allumé, nous serons devant cette élection et "ce n'est pas du tout un hasard" sauf une fois ou nous aurons une petite pub/blague non dénué de cynisme.

Pause : Donc voilà comment en à peine 12 minutes, ce film très simple en apparence est instantanément plus dense que ce qu'il n'en parait. La montage qui cache la forêt : Ces 7 jours, sont l'occasion pour tout les personnages de ne plus mentir, ni à eux, ni aux autres. Car face au mensonge, l'aveuglement d'amour ou de haine ne suffira pas. Alors comment faire pour ne plus ce fuir soit même, renaître, reprendre le contrôle de qui nous sommes ?

Les deux derniers personnages sont la clé du récit, permettant le retour de la lumière.

- Sa fille, Ellie, refait surface sur l'appel de son père. Elle représente la nouvelle génération libéré par son intellect mais dans la souffrance, celle qui essaye dès le départ de pas reproduire le "pattern" responsable de la déchéance de tous les autres. C'est la véritable nouvelle génération (Thomas étant un produit de l'ancienne); Ellie affronte la réalité, la confronte, joue, la manipule sous toute ses formes ouvertement tout en la détruisant instantanément, elle dénonce la manipulation en prouvant aux gens qu'ils sont manipulables. Elle est la lumière qui nous montre que nous sommes faible et perdu dans nos propres dogmes sociaux à cause de notre dénie de nous même. Elle s'efforce elle de n'en avoir aucun, de trouver la vérité, qu'elle que soit les moyens : les photos, les réseaux, son agressivité, sa spontanéité, sa rébellion, son intelligence, tout est un outil pour dénoncer la manipulation pour faire éclater la vérité. Elle écoute tout, attentivement, c'est un combat et pour être impartiale elle est seule, et comme tout être humain abandonné elle en souffre d'autant qu'elle n'oublie rien. Elle soigne, qui veut être soigner, il rappelle que pour guérir il faut en avoir la volonté.

La dernière partie, la retour de sa femme qui représente la dernière partie de la vérité. Elle l'aime toujours malgré tout, l'héritage de chacun est exposé, argent et amour. Les vieux démons ne servent plus à rien, seul la vérité compte, les égos ce livrent à cœur ouvert. La mère crois que son éducation et la situation familiale sont la source de la colère de sa fille, au point de penser qu'elle est maléfique. Le dernier dogme s'effondre dans cette dernière ligne droite, les apparences et les croyances. Le contact ce rétabli une fois les dogmes franchis pour laisser place à la vérité la plus simple. La plage et la sainte trinité ressurgi, l'équilibre précaire d'un bonheur qui n'aura pas durée à cause du mensonge des apparences.

La fin du mensonge, prends sa forme la plus élémentaire en allumant la webcam, ne plus fuir et faire face à la réalité. Sincérité, réalité et honnêteté est le seul chemin de la rédemption car l'amour ne ce suffit pas à lui même. Écrire et un moyen de ce connaître, écrire et ré-écrire et le seul moyen de s'approcher de la vérité. La révélation est donc le texte, écrit par sa fille. Elle qui est libéré des dogmes, libre depuis son plus jeune âge. Cette rédaction c'est toi, jeune génération. "Ce livre me fait penser à ma propre vie et me réjouit pour mon..." Père / Âme... Il n'y à pas de bonne réponse c'est au spectateur de compléter dans cette union méta.

Un message pour briser la division : contrer le syndrome de la transmission du bourreau : "Tu es une fille géniale". Nous ne devons plus nous humilier, nous mêmes, les autres et nos enfants. Nous devons briser le cercle du dogmatisme de la soumission, prendre confiance avec honnêteté, veiller les un sur les autres, ne pas s’abandonner. Il n'y a qu'a cette condition que l'on retrouve la paix, représenté par la trinité.

Spoiler "Off"

J'ai terminé, j'espère que cette interprétation vous aura plus, j'ai personnellement trouvé ce film tellement fort et poignant, qui en dit finalement long sur notre monde comme presque chaque film d'Aronofsky. Il ne dresse pas simplement un état de fait mais donne les clés pour en sortir grandi. Selon moi, c'est peu être le plus grand réalisateur de notre époque. Un artiste d'exception qui signe une fois encore avec the Whale, un chef d’œuvre tout cela dans son plus simple appareil, seulement un décors et quelques personnages, il touchera dans son âme toutes les personnes qui oserons plonger dans son récit.

Clockwork-Blue-Orang
9

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le 6 nov. 2023

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