• Ce sera bientôt fini, je te le promets.

  • Non, ça ne sera jamais fini.




Une première réalisation pour Dave Franco, un bon départ ?



"The Rental" marque la première incursion du comédien Dave Franco dans la réalisation, alors qu'il nous livre un film qui jongle habilement entre le drame, le thriller et le slasher. Cette fusion de trois genres offre un récit à la fois astucieux et générique, fruit de la collaboration de Franco avec Joe Swanberg au scénario. Le thriller d'horreur qu'il en résulte suit une dynamique intrigante, où nos attentes sont régulièrement bousculées par rapport à nos premières impressions, mais pas toujours dans le bon sens. La partie dramatique impliquant le quatuor principal est bien exécutée, mais elle emprunte une trajectoire prévisible, tandis que l'introduction du slasher arrive au moment opportun, mais s'avère relativement superficielle avec des scènes d'exécution basiques. Le volet thriller parvient à maintenir une tension constante, bien que parsemé de quelques instants de lenteur. Le spectateur est constamment en quête de réponses quant à la direction que prendra l'intrigue, mais la conclusion, bien qu'intéressante, reste relativement sage, trop sage. Et c'est bien là que réside le défaut principal de The Rental. En effet, bien que le film renferme des idées prometteuses, il donne l'impression que le jeune cinéaste ne pousse pas ses limites pour créer une expérience plus mémorable. Il manque un élément de folie, quelque chose de plus fort pour secouer le récit et le rendre mémorable. Les rebondissements sont présents, mais ils manquent de punch et de surprises à la hauteur du suspense pourtant habilement construit.


Toutefois, en ce qui concerne la réalisation, Franco ne manque pas de démontrer une véritable maîtrise de l'atmosphère du film. Pendant toute l'histoire, l'ambiance est imprégnée d'une sensation d'être surveillée, et la grande maison se révèle aussi inquiétante que froide grâce à la conception des décors par Meredith Lippincott. Ces éléments offrent un cadre suffisamment intrigant, magnifié par la photographie de Christian Sprenger, pour instiller un sentiment de malaise. La combinaison de l'aspect morne de l'intérieur avec l'humidité ambiante à l'extérieur, enveloppée de brouillard épais, crée un environnement crédible pour le déroulement du cauchemar, renforcé par la direction artistique de Tommy Love et la partition musicale sombre de Danny Bensi et Saunder Jurriaans. Avec tous ces atouts en main, il est d'autant plus dommage que le film ne livre pas une expérience plus percutante. On ressent l'effort de Franco pour instaurer une atmosphère anxiogène qui nous maintient en suspens aux côtés des personnages principaux, mais cela met du temps à se concrétiser, trop de temps étant donné le résultat final. L'attente est en soit gérée avec brio, mais l'apothéose tant attendue est malheureusement bien trop timide, la résolution exécutée de manière maladroite et fastidieuse, fait qu'au final ça ne vallait pas autant la peine d'attendre. Cela refroidit nos attentes et, bien que l'on ne crie pas au scandale ni à la fumisterie, on se retrouve plutôt à penser : "Quel gâchis. Tout ça pour ça, alors que ce n'est pas mauvais, mais simplement laborieux." Une proposition qui aurait pu connaître le succès au début des années 90, mais qui me semble aujourd'hui bien trop générique.


Incroyable, nous avons quatre personnages principaux à suivre, et la cerise sur le gâteau, je les ai tous appréciés. Chacun d'entre eux est interprété par des acteurs suffisamment convaincants pour rendre cette expérience crédible. Habituellement, dans ce genre de scénario avec des jeunes adultes poursuivis par un tueur masqué, il est courant de détester la plupart, voire même parfois tous les personnages, jusqu'au personnage principal, les contrastant comme de simples clichés, tous plus pathétiques, vulgaires et sexualisés les uns que les autres. Néanmoins, ce n’est pas le cas ici. Ne vous méprenez pas, nous ne sommes pas en présence d'une œuvre méritant un Oscar, mais la dynamique entre les quatre protagonistes fonctionne plutôt bien grâce à un développement dramatique et tragique bien ficelé. Certes, il y a quelques moments prévisibles liés à une tromperie sexuelle, mais ils sont présentés de manière intelligente. En effet, il ne s'agit pas d'un simple acte d'adultère commis par une seule personne, mais par deux : Charlie (Dan Stevens) et Mina (Sheila Vand), un homme et une femme, qui trompent respectivement leurs partenaires Michelle (Alison Brie) et Josh (Jeremy Allen White). Cette situation est d'autant plus complexe car Josh se trouve être le petit frère de Charlie, qu'il appelle affectueusement "Bro". Un petit frère qui tout du long va se rabaisser lui-même par rapport aux autres, se considérant comme un moins que rien, alors que pourtant, les autres ne valent pas mieux. Cette dynamique est intéressante car elle est traitée avec une certaine maturité, ce qui rend le récit crédible. On découvre que ceux qui semblent innocents ne le sont pas totalement, tout comme ceux qui semblent coupables ne le sont pas totalement non plus.


Le réalisateur, avec un regard attentif, traite son drame de manière à éviter de sombrer dans l'idéologie punitive et hystérique actuelle qui tend à diaboliser tous les hommes (blancs), surtout de la génération précédente, et à victimiser toutes les femmes. Au contraire, il subvertit ces jugements avec une touche d'ironie, non pas à travers son récit traité de manière sérieuse, mais plutôt par le dénouement. À un moment donné, le gardien de la maison de vacances, Taylor (Toby Huss), un homme blanc qui semble basique et vraisemblablement raciste, est confronté par Mina en raison de ses origines moyen-orientales. Mina lui renvoie son privilège d'homme blanc. Toutefois, à la fin, il s'avère que cet homme que l'on croyait être un sinistre voyeur, équipé de caméras de vidéosurveillance cachées partout et ayant en plus tué le chien, n'a en fait rien fait de tout cela. Il est finalement assassiné par ceux qui se croyaient au-dessus de lui, se révèlant pires. Josh, devant le cadavre de Taylor, lui dit : « On se retrouvera en Enfer », réalisant qu'ils ne valent pas mieux. C'est un constat sans appel. Dave Franco ne tente pas de nous faire croire que tout le monde est mauvais, mais il montre que les gens ne peuvent pas être simplement réduits à des étiquettes. L'idée de diviser les gens en bons et méchants ne fonctionne que dans l'esprit des simples d'esprit. Cette idée se reflète également dans le personnage du tueur, qui n'est pas celui que l'on pensait au départ, à savoir le propriétaire de la maison et le frère de Taylor. Il s'agit en réalité d'un individu lambda dont on ne sait presque rien, sinon qu'il aime semer la discorde et détruire les relations entre les personnages, déstabilisant les couples et les exposant à la confusion, comme pour les tester, avant de passer à l'action avec son marteau. Le choix de son masque représentant un vieillard souligne la volonté du réalisateur, puisque le tueur est un jeune homme portant un masque de vieillard, mettant en avant le fait que, finalement, les générations se complètent dans la bêtise.



CONCLUSION :



En conclusion, "The Rental" réalisé par Dave Franco est une proposition intrigante qui mélange habilement les genres du drame, du thriller et du slasher. Le film s'appuie sur une distribution crédible et parvient à tisser une trame narrative complexe, mais il pêche par une exécution qui aurait pu être plus percutante. Malgré un suspense bien géré tout au long du récit, le dénouement déçoit par son manque d'impact. Néanmoins, le film aborde des thèmes sociaux intéressants, déconstruisant les stéréotypes de manière subtile et montrant que les gens ne peuvent pas être réduits à des étiquettes simplistes. Une démarche en contradiction avec l'opinion morale « dominante », ce qui apporte une dimension rafraîchissante, bien que cela aurait pu être encore plus saisissant.


Pour une première, c'est pas si mal, Dave.



On passe la nuit ici, on partira tôt demain matin.


Créée

le 13 oct. 2023

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