J'avais déjà écrit une critique de Doctor Who, que j'ai remaniée quelques années plus tard avant d'en faire une critique de l'épisode du nouvel an 2021. Certains points de cette critique seront d'aillleurs sûrement des répétitions. Toujours est-il que la fin de l'ère Chibnall/Jodie et la tendance (bien pratique) à avoir des fiches SC pour tous les épisodes hors-saison de DW me donnent l'occasion de faire un point d'étape et de revenir sur l'ère qui vient de s'achever.

J'ai une relation compliquée avec DW. De la nostalgie primaire de l'ère Davies (à la fois fun et passionante malgré son aspect cheap) exacerbée par les frasques de Moffat (et pourtant j'ai là aussi une certaine nostalgie des personnages et certainement pas de ses scénarios prétentieux et bancals), en passant par Torchwood, tentative d'univers étendu déconnante et pourtant attachante, je me fais tantôt hater tantôt laudateur.

Toujours est-il qu'après le départ de Moffat l'ennemi de toutes choses, l'ère Chibnall aura été, avec ses qualités et ses défauts, un véritable bol d'air frais : level up de la mise en scène, soundtrack épuré (moins enchanteur que les compositions de Murray Gold, qui commençait tout de même à fatiguer avec ses fanfares cheesy), retour aux sources avec une approche plus terre-à-terre des personnages, en écho à l'ère Davies sur laquelle Chibnall avait travaillé (il a d'ailleurs créé Torchwood).

L'occasion de voir le Docteur se régénérer en femme (ce qui peut agacer, cela dit j'ai bien aimé le Docteur de Jodie, surtout après celui de Capaldi qui même s'il était classe n'était qu'un personnage Moffatien à la Sherlock) et de rencontrer des personnages auxquels on peut à nouveau s'identifier et qui n'ont pas une vie tout droit sortie d'une banque d'images, contrairement à l'ère précédente (oui, j'ai dit que j'avais une nostalgie pour Amy, Clara et compagnie, ça ne veut pas dire qu'ils étaient bien écrits).

Nouveauté au passage et c'est ce qui marquera l'arc de Jodie, le Docteur se retrouve avec un groupe étendu de compagnons - la fameuse "mif" -, groupe très inclusif (jeunes, vieux, handicapés), ce qui ne m'a pas dérangé car c'est amené naturellement. Encore une fois, on est dans le réel et pas dans les banques d'images, et ça fait un bien fou.

Le rapport aux gens du commun dans cette ère est d'ailleurs assez original : on nous présente régulièrement de potentiels personnages secondaires ayant vocation à être développés au moins le temps d'un épisode, en nous exposant leurs petits tracas du quotidient, pour les tuer tout de go. C'est assez glauque, mais démontre aussi une volonté d'affirmer que tout le monde est important, dans la droite lignée de la philosophie du Docteur.

Autre gros point fort : l'aspect réaliste des ennemis, y compris les ennemis historiques ; mention spéciale aux Sontariens, à la fois hilarants et cauchemardesques.

Cette ère aux airs de parenthèse n'aura cependant pas été exempte de défauts, loin de là. Passé quelques épisodes moyens voir mauvais, et après une première saison prometteuse suivie d'une seconde absolument géniale, l'ère Chibnall s'est embourbée dans la troisième saison nommée Flux qui, si elle n'atteint pas le niveau de foutage de gueule abyssal de Moffat, ne tient absolument pas la route. Troisième saison suivie d'épisodes spéciaux assez mauvais, jusqu'au présent Power of the Doctor.

Un épisode qui reprend une tare récurente de l'ère Chibnall, celle d'ajouter pléthore d'éléments inutiles au récit, avec l'assurance de perdre le spectateur et de s'aliéner celui qui prendra le temps d'analyser ce que c'est que ce bordel. Par exemple ici, nous avons le Maître, en Russie, en 1916, déguisé en Raspoutine. Et ça n'apporte rien à part l'effet "waouh" d'un puzzle éclaté dans l'espace-temps. C'est revenu deux ou trois fois durant cette ère.

Une ère qui aura repris deux éléments marquants de la précédente : le Maître et les cybermen. Un choix discutable au vu de la redondance, et exécuté très maladroitement à l'endroit du Maître qui a soudainement le pouvoir de génocider les foutus Seigneurs du Temps. Mais c'était l'histoire que Chibnall voulait raconter, et il naviguait sans doute moins à vue que Moffat, étant donné que lui et Jodie avaient prévu de ne rester que trois saisons.

Notons au passage un énorme faux-raccord concernant le Maître, même si là ça tient plus du montage chaotique que du faux-raccord : il vole le corps du Docteur puis change de vêtements et retire la boucle d'oreille, pour un peu plus tard retrouver l'attirail féminin de 13 le temps de quelques plans. Commment ça a pu passer ?

Pour le 100ème anniversaire de la BBC, nous avons droit à un épisode de régénération d'1h30, et au retour de Docteurs "classiques" et de leur compagnons, au forceps d'ailleurs mais étant donné les circonstances, on pardonnera ce fan-service aussi rare que savoureux, qui a du ravir les britanniques qui suivaient la série dans les 80's. Et même si je ne fais pas partie de ces derniers, j'ai vraiment aimé voir 7 et Ace se donner la réplique, et encore plus 7 et 8 se tacler gentiment.

Cet épisode est dans l'ensemble une belle fin pour l'arc de Jodie. Elle s'en va paisiblement, laissant ses compagnons former un groupe type alcooliques anonymes, illustrant ainsi cette thématique du Docteur marquant la vie de toute personne lambda à travers les décennies (la "mif étendue").

L'épisode s'achève avec le retour annoncé de Ten, qui en trois épisodes passera le relais au désastre ambulant qui a été choisit pour incarner le 14ème Docteur à l'occasion du 60ème anniversaire de la série. L'occasion de voir le retour de Davies aux manettes et ce que son évolution personnelle, mais aussi celle de la production, apporteront, notament en termes marketing (on a déjà l'annonce d'une diffusion à l'international via Disney+ ainsi qu'un nouveau logo immonde ; on ne sait pas encore qui sera à la B.O.).

Je suivrai sûrement la transition, mais je me sais incapable de voir et d'entendre le machin qui va interpréter 14 sans avoir envie de le taper. Une bonne occasion pour dire au revoir à cette série certes fascinante, mais bien trop incohérente et qui se précipite dans les travers progressistes de notre époque.

Nevare
8
Écrit par

Créée

le 29 oct. 2022

Critique lue 61 fois

2 j'aime

Nevare

Écrit par

Critique lue 61 fois

2

D'autres avis sur The Power of the Doctor

The Power of the Doctor
GuillaumeL666
7

Merci Jodie c'était cool

Les épisodes spéciaux de Doctor qui aboutissent sur une régénération du docteur sont un prétexte pour en mettre plein les yeux aux fans de la série et les brosser dans le sens du poil avec des...

le 17 févr. 2023

Du même critique

Les Enquêtes de Morse
Nevare
9

Raffiné, complexe, éblouissant, patient.

Pour commencer, je n'avais pas regardé Inspecteur Morse, ni sa suite Inspecteur Lewis, je ne savais même pas que ces séries existaient ; et après le visionnage de la première saison des Enquêtes de...

le 17 mai 2014

9 j'aime

Inspecteur Morse
Nevare
8

How Hopeless Under Ground Falls The Remorseful Day...

Après avoir été enchanté, éberlué, estomaqué, et plein d'autres trucs positifs par ce qui est désormais ma série préférée de tous les temps, Endeavour (Les Enquêtes de Morse en VF), j'ai décidé de...

le 5 déc. 2014

7 j'aime