Je profite des heures qui suivent le visionnage de cette chose informe que j'aurai oubliée dans dix jours car elle est encore plus ou moins fraiche dans ma tête.

THE FLASH, c’est le film qui arrive non pas 10… non pas 15… mais à peu près 40 ans trop tard. Il en reste néanmoins la synthèse parfaite des pires horreurs made in Hollywood de notre époque.

Tenez-vous bien, cette critique ne va absolument rien vous apprendre car vous savez déjà tout ce que je vais dire.

Symptôme #1 : génération aléatoire d'enjeu narratif

Nous sommes face à un personnage qui plonge dans le premier ravin scénaristique venu : « ça alors, je peux remonter dans le temps, et si je sauvais ma mère ? » Forcément, c'est la seule histoire que ce perso porte sur lui depuis qu'il nous a été vaguement présenté dans je ne sais plus quelle autre daube. Dire de ce film qu’il est de son époque est tellement vrai qu’il sort une semaine après Accross the Spider-verse évoquant aussi le fait qu’on ne peut pas revenir sur les traumatismes du passé gnagnagna qui nous forgent et qu’il faut les accepter et que blablabla. Combien de fois a-t-on vu ça ? Pour ma part, ça fait déjà 2 fois en 48 heures. En fait, comme tous les films americains surfant sur la vague des multivers, on ne nous raconte jamais autre chose que ça. Blockbuster super-héroïque franchisé oblige, le film commente lui-même sa propre connerie avec son prétexte méta et ses références à Retour vers le futur directement dans les dialogues "t'as pas appris dans un film que ça crée des problèmes de revenir dans le passé pour le changer ?" La fameuse technique marvelloDC de l'aveu d'échec déguisé en ironie. Le comble du comble du cynisme dans le cinéma.

Ce que le film raconte à part ça ? Strictement rien. Comme toujours, on traverse plusieurs potentielles idées intéressantes comme rencontrer son double d'une vie alternative, tenter d'innocenter son père en procès pour meurtre, ou juste courir vite, bordel... rien de tout cela ne débouche sur un traitement autre qu'une blague. Comment la mort de sa mère peut avoir à ce point influencer sa personnalité ? Pas grand-chose à part des cheveux plus longs finalement. Nul. On a juste un ado débile insupportable. Pire que tout : le héros habituellement gaffeur et étrange (presque attachant) se transforme d'un seul coup en grand frère moralisateur et paternaliste. Ils n'ont rien en commun, ne se retrouvent sur rien, n'en sont qu'à peine bouleversés. On serait tenté de croire que l'intelligence artificielle se cacherait derrière le scénario tant l'absence de connaissance de l'être humain est flagrante dans l'écriture de ce film.

Symptôme #2 : les effets numériques dégueulasses

L'imposture se fait remarquer dès le début du film, c'en est presque honnête vis-à-vis du public : Flash doit récupérer des bébés en train de tomber d’un très grand building n’abritant qu’une infirmière et ses six ou sept nourrissons. Tout un building rien que pour eux, ils ont les moyens les Américains. Alors, le héros, usant de son pouvoir de rapidité, réussit à sauver les bébés un par un. Je crois qu’on a ici un record extraordinaire de laideur. Le record n’est pas battu, il est désintégré. Les bébés ressemblent à s’y méprendre à celui des premiers courts-métrages de Pixar d'il y a plus de 30 ans (allez jeter un œil si vous avez du courage). Je ne pensais pas qu’il était possible de rater à ce point une modélisation 3D. Les visages des bébés sont tellement ratés qu’ils sont accidentellement plus crédibles en De Niro jeune que la version de-aging pourrie de The Irishman.

L'expression "bouillie numérique" n'a jamais été aussi pertinente que devant les scènes de voyage dans le temps. Le héros se retrouve dans une sorte de bulle au centre d'une étrange purée Mousseline d'images en 3D représentant des scènes du passé en cinématique de jeu vidéo. Un choix artistique extrêmement douteux qui laisse le spectateur dans l'embarras avant de comprendre qu'il n'est autre qu'une astuce incroyablement lâche pour convoquer des vieux personnages dont les acteurs n'étaient pas ou plus disponibles pour cause de contrat ou de décès. Ainsi vous pourrez y voir le sprit de Henry Cavill dans Fifa 2004. EA Sport, it's in the game.

Le reste des effets spéciaux est dans la moyenne de tous les blockbusters standardisés de notre temps, c'est-à-dire qu'ils avaient déjà mal vieilli au moment-même où Bob l'informaticien a cliqué sur "valider". On retient tout de même une proposition sympathique en début de film quand on le voit courir pour la première fois à travers la ville, agréable quand on aime les timelapses.

Symptôme #3 : l'absence totale de direction artistique

Encore un foutu désert de décor pour la scène finale. C'est fou d'avoir autant de moyens et ne pas les mettre dans ce qui est pourtant visible sur 80% de l'écran. Les explosions de toutes les couleurs sont là pour compenser le vide intersidéral de l'univers du film. Si la mise en scène dans son ensemble m'a parue plutôt soignée, on peut difficilement retenir quelque chose de la moindre séquence tant on n'y trouve aucune trace de personnalité. Pareil pour les intérieurs. Même la chambre d'ado est sortie tout droit des Sims, on ne se sert même pas du décor pour en raconter un peu plus sur les différences entre les deux versions du héros.

Finalement, ce qu'on va le plus retenir du film visuellement, c'est la laideur frappante des images numériques évoquées précédemment. Et ce ne sera pas non-plus la musique que l'on a en tête 30 secondes en sortant du film avant de l'oublier à jamais. On oublie même qu'on l'a oubliée.

Symptôme #4 : la mort n'existe pas

On a droit à nouveau à l'éternelle scène de mise à mort de nos héros qui en fait ne meurent pas parce qu'on peut toujours revenir en arrière. On n'y croit pas la première fois, on n'y croira pas les 34 d'après. Le film peine déjà tellement à nous faire accepter la mort d'un personnage, en l'occurrence la mère, en l'occurrence déjà morte, en l'occurrence depuis 10 ans, qu'on ne va pas croire une seule seconde qu'on tue Batman. Pitié passons, c'est long là.

Evidemment, quand on multiplie les épisodes en barquettes, on finit par avoir déjà tout (mal) traité. Donc les enjeux se suivent et se ressemblent. Celui-ci atteint tout de même un paroxysme quand on comprend que les deux heures passées à suivre cette aventure débile sont effacées à la fin du film. Merci pour ce mauvais moment. C’était inutile. Au revoir. Mais c'est important. Comme ça le personnage a compris. Ce que le public avait déjà compris avant d'entrer dans la salle.

Symptôme #5 : le marketing avant l'artistique

The Flash n'est pas assez connu, alors foutons Batman partout comme si ce film lui était consacré. Marvel fait revenir Maguire et ça cartonne, faisons revenir Keaton et le thème de Elfman et la jolie Batmobile. On sent le scénario articulé entièrement autour de cette opportunité marketing, particulièrement après qu'on apprend que tout le film est un épisode pour rien, qui n'aura aucune incidence sur la suite de cette magnifique saga.

Et pour couronner le tout, ajoutons un personnage féminin qui, comme lorsqu'on rajoute un perso pour de troubles raisons, n'a aucun impact, aucune signature, aucune personnalité, aucun intérêt. Elle fronce très bien les sourcils, intervient à deux ou trois moments car ses pouvoirs sont quand même bien pratiques, et ciao. De toute façon on efface tout à la fin.

"Le film qui nous rappelle pourquoi on va au cinéma" peut-on lire sur l'affiche.

Oui, clairement, d'accord avec cette phrase.

Des points positifs ?

On retient tout de même une fausse annonce logo-titre en début de film (on peut faire du méta sans faire du réchauffé finalement), Michael Keaton qui s’amuse un peu même si son Batman en pleine action relève plus de l'animation que du live-action (les effets les plus réussis néanmoins) et deux/trois blagues presque drôles que j'ai oubliées, comme toutes les autres de la franchise.

Bref, si vous avez 144 minutes à tuer, laissez-les crever en silence.

Créée

le 15 juin 2023

Critique lue 489 fois

5 j'aime

2 commentaires

Franky Latuile

Écrit par

Critique lue 489 fois

5
2

D'autres avis sur The Flash

The Flash
Marvellous
6

Across the Flash-Verse

Voyage dans le temps, Multiverse et caméos : trois recettes qui ont la côte chez les blockbusters depuis quelques années maintenant. Alors qu'est-ce qu'il y aurait de mal à mélanger les trois ?Autant...

le 6 juin 2023

29 j'aime

13

The Flash
RedArrow
4

Spaghettipoint

La fin et le début. La fin d'un DCEU qui avait démarré sur les chapeaux de roue avec "Man of Steel" avant de se crasher en cours de route, comme schizophrénique, n'arrivant jamais vraiment à trouver...

le 15 juin 2023

26 j'aime

4

The Flash
enviedefilms
8

Humain

J'ai l'impression d'être dans le multivers quand je vois les critiques entre the flash et le dernier spiderverse. Comme si seul l'apparence compte. Oui The flash est ultra dégueulasse visuellement et...

le 15 juin 2023

16 j'aime

Du même critique

The Batman
latuile
7

Coup d'latte

BOOM Voilà un blockbuster qui sait tenir notre haleine. Déjà parce qu’il mêle plusieurs genres, entre autres celui du thriller psycho à la recherche d’un nouveau fou furieux et ses trois coups...

le 1 mars 2022

39 j'aime

4

Pardon le Cinéma
latuile
6

Titre ! Titre ! (avec un édit 10/08/2023)

On pouvait critiquer des jeux pour smartphone, des chaînes Youtube et maintenant, on peut critiquer des podcasts ! Bientôt les Skyblog et les panneaux de signalisation.Ravi cependant de pouvoir...

le 10 août 2023

27 j'aime

5

Kid Paddle
latuile
10

Le Lapin de la RATP - Le Film

2027, après une longue série d’adaptations à succès (Boule & Bill, Le Petit Spirou, Kid Paddle, etc.) et la fin de la troisième phase du Pathé Cinematic Universe (Cendrion 2, Aladin 3 : Débile...

le 9 oct. 2018

11 j'aime