Quand on regarde la filmographie de Robert Rodriguez, on ne peut que constater que, bien qu’il se soit perdu depuis plus de deux décennies, entre ses films pour enfants (la saga Spy Kids, Shark Boy and Lava Girl, c’est nous les Héros), ses délires qui divisent (Machete et sa suite, Sin City et sa suite) ou encore son catastrophique et récent Hypnotic, son début de carrière est quand même assez excellent. Entre le diptyque El Mariachi / Desperado, le très fun Une Nuit en Enfer, et son The Faculty qui ne vieillit pas, ça a quand même de la gueule. Aujourd’hui, c’est sur ce dernier qu’on va s’attarder, un croisement improbable entre L’Invasion des Profanateurs de Sépultures, The Thing et le teen Movie façon Breakfast Club, le tout calibré pour surfer sur la mode Kevin Williamson que tous les producteurs s’arrachaient suite au succès du premier Scream de Wes Craven dont il a écrit le scénario.


Scream premier du nom a eu le succès qu’on lui connait et a donné naissance à tout un tas de rejetons et autres ersatz plus ou moins heureux qui parfois singeaient le film de Wes Craven, parfois tentaient un peu d’originalité en essayant de se détacher de leur modèle comme c’est le cas de The Faculty, pourtant lui aussi scénarisé par Kevin Williamson, après un premier jet de David Wechter et Bruce Kimmel en 1990. L’ombre de Scream est là, avec ce meurtre dès l’introduction, ce groupe d’étudiants bien stéréotypés, l’obligatoire scène devant le bahut, le who’s who dans tout ce bordel. Sauf que rapidement, avec son histoire d’extraterrestres, son envie de proposer un divertissement résolument fun et son côté sale gosse, The Faculty développe son univers bien à lui et, 25 ans plus tard, on prend autant de plaisir à le revoir. The Faculty est plus un thriller de science-fiction qu’un film d’horreur et, pour un film malgré tout clairement destiné aux ado, il est bien plus intelligent que la moyenne ne serait-ce que par toutes les références au cinéma ou à la SF de façon générale qu’il comprend, jusque dans certaines blagues. Ces références sont nombreuses, de L’invasion des profanateurs de sépultures, Men in Black et X-Files qui sont ouvertement cités, à d’autres plus discrètes mais néanmoins présentes telles que The Thing, Terminator 2, Hidden ou encore Scanners. Mais surtout, ces références sont assumées comme le prouvent ce test avec la drogue qui renvoie directement au test du sang dans le The Thing de Carpenter. Elles ne sont pas là gratuitement mais pour servir le propos du film de Rodriguez. Le film est également bien plus intelligent que la moyenne car il joue intelligemment avec les stéréotypes habituels, l’exemple le plus frappant étant le personnage du gros sportif qui au fil du film va se remettre en question et changer du tout au tout, et ses personnages forment au final une allégorie de la jeunesse. Intelligent, il l’est aussi car, contrairement à plein d’autres films de cette époque qui ont suivi Scream (Souviens-toi l’été dernier, Mortelle St Valentin, Urban Legends, …), il ne se prend pas au sérieux.


Le casting est très bon. On retrouve tout un tas de têtes connues mais qui à l’époque ne l’étaient pas forcément et qui, à l’instar de Josh Harnett (Pearl Harbor, 30 Jours de Nuit), Elijah Wood (la trilogie Seigneur des Anneaux) et dans une moindre mesure Jordana Brewster (la saga Fast & Furious) et Clea DuVall (Argo, Identity), connaitront la consécration par la suite. A cela, on ajoute un casting de vieux briscards (Robert Patrick, Daniel Von Bargen) ou encore l’actrice fétiche du réalisateur, Salma Hayek, et on obtient une belle brochette des plus convaincantes. Le travail de Robert Rodriguez est également à saluer, avec une lente montée en puissance de la tension et un sentiment de paranoïa qui va faire son apparition. Attention, cela n’atteint jamais des sommets, loin de là, Rodriguez semble conscient de ce qu’il est en train de tourner. Mais pour ce genre de film, c’est déjà un plus non négligeable. Il va jouer intelligemment sur le « qui est infecté », essayant de parfois brouiller les pistes afin de laisser planer l’incertitude chez le spectateur (et chez les personnages). Rodriguez n’abuse pas des effets visuels numériques qu’il sait pas encore complètement au point, surtout quand on ne bénéficie pas d’un gros budget. Il utilise les CGI avec parcimonie et heureusement, car ils ont malgré tout pris un coup de vieux. Là aussi il va se montrer malin, construisant une maquette de son monstre pour les gros plans lors du final, ou préférant jouer avec des effets d’ombre / lumière pour suggérer plus que montrer (le côté tentaculaire du monstre). The Faculty est amusant, aussi bien par ses personnages, ses quelques gags, que la manière dont sont traités les adultes (professeurs, parents, police), tous devenant plus inquiétants, voire parfois plus ridicules les uns que les autres au fur et à mesure que le film avance. C’est son côté sale gosse qui ressort, ridiculisant les figures d’autorité, mettant la drogue comme seul moyen aussi bien de survie que pour détecter « l’infection », célébrant pour l’occasion un petit trafiquant de drogue en guise de héros.


Plus de 25 ans après sa sortie, The Faculty tient toujours aussi bien la route et se classe dans le haut du panier des rejetons de la saga Scream. C’est fun, bien plus intelligent qu’il n’y parait, et on passe un très bon moment.


Critique originale avec images et anecdotes : https://www.darksidereviews.com/film-the-faculty-de-robert-rodriguez-1998/

cherycok
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le 15 févr. 2024

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