Lettre ouverte à Mr Nolan

Cher Monsieur Nolan,

Permettez moi tout d'abord de me présenter. Je suis l'un de vos -nombreux- spectateurs les plus admiratifs et j'ai eu le grand privilège de découvrir sur une période de 7 ans votre adaptation couplée à votre vision du personnage mythique de la franchise DC Comics, l'incontournable Batman. Vous avez par cette initiative repris un projet qui sera passé par de nombreuses mains, parfois très créatives, mais parfois et trop souvent même, désastreuse. Par votre talent de metteur en scène et votre esprit bien huilé, vous avez eu la bonne idée d'imaginer un véritable univers pour ce personnage et avez adopté une ligne de conduite suivie et respectée jusqu'au bout. J'insiste sur ce dernier point qui selon moi reste l'élément qui pérennisera votre succès annoncé. Vous vous êtes littéralement emparé du dessein de ce personnage et l'avez parfait à votre façon en créant une atmosphère que vous avez méticuleusement travaillée et en imposant un ton dont vous êtes l'un des seuls (si ce n'est le seul) à connaître le secret.

Vous savez mieux que quiconque à quel point relancer une franchise en partant muni de simples éléments de base est tâche ardue et lorsque l'on regarde Batman Begins, permettez moi de vous dire qu'il s'agit pour vous d'une réussite. Vous avez relevé ce défi de manière remarquable en livrant une oeuvre dans laquelle nous nous retrouvions tous et prenions du plaisir à (re)voir évoluer ce super héros que nous chérissons tant. Certes, de la trilogie, il ne s'agit sûrement pas de celui qui s'est imposé comme la référence ultime mais il est celui qui est venu poser la première pierre de cet édifice de rêve. Vous avez par ce film redonné espoir à tout un monde qui se contentait jusqu'alors de revisionner, faute de mieux, l'oeuvre d'un certain Tim Burton et réconcilié une foule de fan qui s'était sentie jusque là trahie. J'ai d'ailleurs toujours fait partie de ceux là. Votre maîtrise technique et scénaristique ont redonné un souffle, un sens voir même une vie à ce héros qui ne méritait pas de se faire autant massacrer dans ces précédents portages. Là, nous avions enfin une réelle histoire, un point de vue qui nous a permis à tous de réfléchir et de débattre avec ferveur de l'identité du personnage que l'on ne connaissait que grâce aux bandes dessinées. Vous vous êtes ouverts à tous, vous n'avez oublié personne et avez de main de maître réuni tous les amateurs et férus de super héros.

Et puis, la suite Monsieur. Vous vous êtes tout simplement permis d'offrir au monde entier le peut être plus grand film de super héros de l'histoire avec le désormais célèbre The Dark Knight. Avec le premier film, nous savions que nous vivrons de belles aventures en visionnant vos films et que nous ne serions pratiquement jamais déçus. Mais nous étions absolument à mille lieux de nous imaginer que vous reviendriez avec une force de frappe encore plus intense que votre premier coup. Vous avez simplement confirmé avec ce deuxième film toute l'intelligence qui vous anime en assemblant un puzzle aussi riche qu'original. En respectant tous les codes du personnage et en appliquant minutieusement vos principes, vous êtes parvenus à réaliser l'exploit de faire un film qui mêle aussi bien la terreur et l'espoir, la violence et la modération ou encore le sérieux à la dérision. Encore une fois et grâce à votre esprit, c'est tout bonnement le contraste entre le bien et le mal que vous avez mis en avant, mais cela tout en finesse ; jamais nous ne ressentons que le rendu est poncif. L'idée majestueuse de redéfinir le Joker, le méchant le plus mythique, marquant et improbable de la franchise a beaucoup aidé dans ce sens et à fait de vous un visionnaire suprême. Lorsque l'on regarde évoluer votre méchant, on se retrouve bouche bée devant tout le travail que vous avez accomplit pour faire de lui ce qu'il est, cet être presque surnaturel, satirique au possible et dénué de tout sens moral. En face, il y'a toujours votre Batman, qui aurait très bien pu disparaître sous cet orage du Joker que vous avez vous même invoqué, mais qui reste impérial, authentique et qui reste dans ce style si particulier que vous lui avez attribué à savoir sobre et froid en même temps. Permettez moi de vous le dire, juste comme ça et de façon aérienne, vous êtes un génie. Vous êtes un génie d'avoir pu monter aussi haut, d'avoir su mettre en oeuvre un scénario aussi simple mais en même temps si profond, d'avoir su créer cette dichotomie qui nous a donné l'impression de suivre en même temps deux films.

Au final, après avoir réussit autant d'exploits, il fallait clore votre chapitre afin de vous permettre de vous retirer sereinement dans l'idée d'avoir fait ce qu'il y'avait à faire. Par la même, cela me donnera l'occasion de conclure cette lettre. J'ai attendu avec énormément de ferveur votre dernière prestation pour aussi moi même me sentir libéré. Tout le monde savait qu'il serait difficile d'égaler votre deuxième cru, que vous aviez tellement donné et qu'il vous serait impossible de livrer un final qui pourrait même le surpasser. Et encore une fois, vous avez prouvé à tout le monde à quel point vous avez toujours su rester maître de votre projet. Vous le saviez avant même d'écrire le script de The Dark Knight Rises que vous ne pourriez aller au delà. Alors, vous avez simplement décidé de nous offrir une conclusion, sobre tout comme votre personnage, sans aucune complexité tout en restant fidèle aux éléments qui auront fait le succès de la série. Votre image est toujours aussi belle et n'a pris aucune ride, vous savez manier vos acteurs tout comme vous savez diriger vos techniciens. Vous savez exactement ce que vous voulez et ce que vous vouliez c'était faire preuve de modestie, nous dire qu'une fin ne doit pas forcément être à nouveau une démonstration mais qu'une fin se doit d'être réussie sous peine d'anéantir tout le travail abattu jusqu'alors et de sortir par la petite porte. Certes, votre dernier film ne mettra pas tout le monde d'accord (vos aptitudes de cinéastes le font déjà) et même si cette longue attente que nous avons vécu avec en tête votre deuxième réalisation peut se voir désenchantée, il n'en reste pas moins que lorsque l'on visionne votre final, on sent que l'on aura été servit jusqu'au bout par votre capacité à créer de l'action. Vous le faîtes de manière atypique et vous comprendrez sûrement que je fait référence à cette scène de combat intense entre le Batman et le nouveau méchant Bane ; à ce moment, on a l'impression que le temps s'arrête, on retrouve nos yeux d'enfants et on ne peut qu'admirer. Les personnages phares sont restés ce qu'ils sont et les nouveaux ont apporté leur vent de fraîcheur. Sur ce point, il faut reconnaître que vous avez toujours de façon très subtile et nuancé su les réutiliser et je prendrais pour exemple votre Jonathan Crane/Epouvantail. Vous l'avez fait évoluer au fil des trois films et avez toujours trouvé le moment où vous pouviez le placer et dans ce troisième film, il est vraiment agréable de le retrouver dans cette posture de juge imposé complètement déluré.

A la fin, vous révelez un nouveau personnage que vous élevez (je n'en dirais pas plus sur lui), vous créez à nouveau l'espoir qu'un jour une nouvelle trilogie refasse surface. Et ce nouveau personnage, vous l'incluez parfaitement, c'est à vraiment se demander comment vous faîtes. Je sais que vous ne serez pas aux commandes si ça se fait mais il est certain que celui qui prendrait la relève saura d'où il pourra nourrir son inspiration.

Je ne pourrais jamais assez vous remercier de m'avoir tant comblé avec ce récit que vous m'avez conté avec brio. Jamais je n'oublierais que vous êtes le seul qui ait réussit à aligner trois films de super héros de très grande classe dont un deuxième qui est déjà rentré dans l'histoire. J'espère simplement qu'à l'avenir, d'autres se sentiront aussi créatifs que vous l'avez été et iront de leur propre initiative.

Sachez que pour vous et votre entreprise, j'éprouve un profond respect.