The Crossing
6.4
The Crossing

Film de John Woo (2014)

C'est avec une super-production, les moyens sont là, que l'on retrouve le grand John Woo derrière une caméra.


Une grande fresque à la Douglas Sirk qui revisite l'histoire trouble de la Chine allant de la guerre contre le Japon à la prise de pouvoir de l'idéologie Maoïste.


A grands renforts d'effets pyrotechniques, de batailles plutôt impressionnantes et une reconstitution historique tout à fait crédible, l'auteur de The Killer restitue parfaitement l'ambiance d'une époque troublée, parvenant à initier une vraie ambiance mélodramatique à son œuvre en proposant de suivre les destins croisés de plusieurs personnages à travers les méandres auto-destructeurs d'un pays en pleine révolution.


Du point de vue de la mise en scène pure, on retrouve la patte du très grand cinéaste, avec de purs moments de cinéma et un esthétisme de tout premier ordre. La dramaturgie est distribuée sans excès, même si l'on n'es parfois proche du pathos le plus mielleux, c'est par une sorte d'alchimie précieuse que la réalisation ne souffre presque jamais des excès inhérents à ce genre d’œuvre.
Certains critiquerons peut-être ce point de vue assumé d'un auteur qui doit composer avec le poids que représente l'atout financier d'une œuvre produite en grande partie par la Chine et une vision forcément partagée par rapport à sa propre réalité d'exilé de longue date. D'où cette permanente impression de neutralité que le film distille. Le propos par lui-même n'est jamais alambiqué et l'auteur préfère se cantonner à l'aspect humain plutôt qu'à théoriser sur les enjeux politiques. Laissant à chacun sa propre vision morale et/ou philosophiques des événements retracés.


On peut éventuellement lui reprocher quelques excès de dévouement à la sainte mission du soldat dans la guerre avec notamment le personnage du commandant Lei Yifang, interprété par la rectitude parfois trop affirmée de l'acteur Huang Xiao-Ming. A noter une excellent prestation de Takeshi Kanehiro l'acteur d'origine japonaise le plus hongkongais du cinéma de l'ex-colonie.


Au-delà de la connotation politique et tous les débats que ce genre d’œuvre peut déclencher, ce que je retiens personnellement, c'est le véritable souffle épique et une dramaturgie assumée qui n'en fait presque jamais trop et le style viscéral et souvent génial d'un vrai grand cinéaste qui explose fréquemment dans des instants autres visuellement superbes.


Alors non, ce n'est pas un chef d’œuvre, car c'est souvent emprunté et parfois maladroitement géré dans le tempo, avec des moments qui s'étirent quand d'autres aurait mérités plus d'attention, que c'est parfois un peu tiré par les cheveux quand les personnages prennent des postures un tant soit peu excessives, que certains procédés, je pense notamment à des arrêts sur image intempestifs, peuvent s'avérer pompeux, mais c'est remarquablement bien filmé et l'on retrouve souvent le génie visuel de cet immense auteur qui demeure malgré tout un cinéaste extrêmement doué pour magnifier des instants par une grâce esthétisante touchant au suprême.


Ce n'est pas du très grand John Woo mais ça demeure une œuvre qui compte, n'en déplaise aux éternels grincheux qui voit dans tout film de guerre une matière à théoriser sur des prises de position politiques ou morales.

philippequevillart
7

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Créée

le 3 sept. 2017

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