Il fut un temps où les studios de cinéma connaissaient leur métier, où Hollywood s'appelait encore Hollywoodland et où les films, tournés en 4/3 et en noir et blanc, étaient encore muets. Aujourd'hui cette époque est révolue, effets spéciaux et performance capture sont devenus le quotidien des grosses productions pour le meilleur comme pour le pire. Il serait idiot de le regretter. Ces évolutions ont permis quelques films formidables et il n'y a rien de plus désagréabele qu'un vieux cinéphile aigri qui répète en boucle : "C'était mieux avant". Mais l'arrivée de The Artist de Michel Hazanavicius nous rappelle que pour faire un bon fim, les recettes sont toujours les mêmes que l'on vive en 1930 ou en 2011.

Il fallait pourtant oser faire un film muet sur la déchéance d'un acteur des années 20-30, George Valentin, parce qu'il refuse le cinéma parlant. Heureusement quelques courageux l'ont suivi (on peut féliciter Thomas Langman réalisateur médiocre mais producteur avisé d'avoir suivi Hazanvicius) et le pari est aujourd'hui remporté haut la main. The Artist est une réussite.

Dès le début, on est conquis par ce voyage dans le temps, par le noir et blanc, l'image en 4/3 et surtout le silence. Un silence auquel on s'habitue très vite, au point que l'une des rares scènes sonores est presque un supplice et que l'on soulagé de revenir ensuite au muet. Ce dernier n'est pas un gadget, Michel Hazanavicius l'a parfaitement intégré et en fait un outils de narration à part entière. Côté scénario, le réalisateur, également scénariste, s'est surpassé. Il rend un magnifique hommage au cinéma américain tout en dépassant le simple pastiche. The artist est un vrai film qui réunit une pallette d'émotions impressionnantes comme on le voit rarement au cinéma. A la fois drôle, tragique et émouvant, le film réserve aussi de nombreuses surprises notamment vers la fin lors d'un climax audacieux qui laisse sans voix (ça c'est fait).

Mais The Artist ne serait pas ce qu'il sans les nombreux talents qui accompagne Hazanavicius. Tout d'abord l'excellent Jean Dujardin. L'acteur est un habitué des films de Michel Hazanavicius puisqu'il incarne déjà Hubert Bonnisseur de la Bath dans les OSS 117. Mais dans le rôle de George Valentin, il livre sa plus belle performance. Le muet lui permet de s'exprimer comme jamais il ne l'a fait auparavant grâce à un jeu qui ne passe que par le corps et les expressions de son visage Mais George Valentin ne serait rien sans son duo avec Peppy Miller, interprétée par la ravissante Bérénice Béjo, elle aussi habituée aux films d'Hazanavicius (avec qui elle est en couple). Dans le rôle de cette jeune actrice qui voit sa carrière exploser avec l'arrivée du cinéma parlant, elle est juste formidable. Les deux personnages forment un superbe duo totalement complémentaire. Le reste du casting s'en sort tout aussi bien en particulier John Goodman.

A la performance des acteurs, il faut ajouter celle de Ludovic Bource, le compositeur. Car la musique a bien sûr une place primordiale dans le film. Sans dialogues, c'est elle qui doit rythmer l'histoire et donner l'ambiance. C'est ce que réussit Ludovic Bource dont la BO donnerait envie de danser avec Jean Dujardin et Bérénice Béjo. Sa musique transcende le film et est un régal pour nos oreilles durant 1h40.

On ne peut donc que remercier Michel Hazanavicius. The Artist est le plus bel homage qu'il pouvait rendre au cinéma et le plus beau cadeau qu'il pouvait faire au spectateur. Son film est pour moi le meilleur de l'année et celui que je désespérais de voir. Car si l'année 2011 nous a offert quelques pépites (Le discours d'un roi, Black Swan, Animal Kingdom ou Drive pour ne citer qu'eux), je n'avais pas encore trouvé LE chef-d'oeuvre qui me rappelle pourquoi j'aime tant le cinéma. Monsieur Hazanavicius, vous êtes décidément l'homme le plus classe du monde. Thank you the artist.
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le 4 nov. 2011

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