Avec le nombre impressionnant de festivals fantastiques et d'épouvantes à travers le monde, il y a quelque chose d'assez énigmatique dans le fait que les films de genre qui fonctionnent le mieux au box-office ne soient que des remakes, sequels, ou prequels alors qu'à l'inverse, il y a une véritable production indépendante de films de qualité faisant parti de ces festivals à la recherche d'un succès mérité. Initié par un Tobe Hooper fauché dans les années 70 dans une période où le Nouvel Hollywood était inatteignable, Massacre à la Tronçonneuse a été une telle claque pour le genre qu'il a marqué des générations entières, crée le genre "slasher" et s'est vu ancré dans la culture populaire. Trente-six millions de dollars plus tard (en 1974, c'est un carton au box office !), la saga est crée et "Texas Chainsaw Massacre" est devenu un nom au potentiel redoutablement lucratif. Presque trente ans plus tard et trois suites oubliables, Marcus Nispel réalise un remake appréciable qui propulse Jessica Biel sur le devant de la scène. Un véritable succès international qui inspire aux producteurs l'idée d'une suite, ou plutôt d'un prequel intitulé Le Commencement, trois ans après. Si le métrage est mauvais, il est toujours aussi rentable. L'occasion pour Leatherface de revenir à un moment où la 3D est encore à son apogée. Une manière de rentabiliser encore plus la saga, avec cet opus se voulant comme la suite directe de l'original de Tobe Hooper.

Ce projet 3D est donné à un réalisateur sans expérience dans le cinéma de genre. Un de ces gars qui accepte n'importe quel projet, histoire d'entamer un projet personnel par la suite, embauché par des studios qui espèrent dépenser le moins pour le salaire du réalisateur. A l'origine de Takers, médiocre polar sur fond de hold-up, John Luessenhop n'est pas un novice puisqu'il s'agit de son troisième long-métrage. Mais avec ce projet qui ne lui tient absolument pas à coeur, le réalisateur s'est contenté du cahier des charges, ressassant les pires clichés du genre, sans une volonté annexe de proposer une nouvelle expérience et d'outre-passer les limites du genre, à l'instar de ce qu'avait réalisé Rob Zombie sur les deux premiers volets d'Halloween.

Pour autant, dès le prologue, il y a une volonté de la part du réalisateur de rendre un vibrant hommage au film phare de Tobe Hooper. Mais il le fait d'une manière tellement grossière que ç'en est ridicule dès les premières minutes du fim. Ainsi, le long-métrage démarre sur des séquences clés tirés de l'original et se poursuit directement quelques jours après, dans l'espace-temps, suivant la famille de psychopathe qui avait marqué les esprits dans l'opus originel. John Luessenhop ne manque de faire des références, notamment à travers ce shérif qui se nomme Hooper et sans compter une séquence du film où l'une des interprètes est filmé sous le même angle qu'une scène célèbre de l'original (http://image.noelshack.com/fichiers/2011/16/1303248082-texas8.jpg).

Seulement, ce n'est pas en caressant le fan de cette manière que le film va se révéler être de qualité. Car la structure de l'intrigue sombre rapidement dans un classicisme désormais insupportable pour les amateurs de genre. Tant dans la mise en scène, jamais originale et faisant davantage figure de médiocre Direct-to-video, que dans la construction des personnages dont les stéréotypes oscillent entre le tombeur black, le camé, la "libertine" et l’héroïne principal au destin sombre. Vides de toute construction psychologique,, ces personnages n'inspirent jamais d'empathie ou de sympathie tant ils se révèlent n'être présent que pour servir de viande fraîche. Dans une forme de "m'enfoutisme" totale, cette version 3D ose même multiplier les incohérences temporelles (suite du premier volet, mais les personnages ont des smartphones dernière génération), les personnages évincés sans raison (à la fin du film, où sont passés l'avocat et le fils policier du maire de la ville ?) ou l'absurdité d'un scénario qui sombre dans une histoire totalement invraisemblable, là où l'original s'inspirait d'un fait macabre réel, donnant cette impression oppressante que ça pouvait arriver.

Le postulat de départ pouvait susciter un intérêt, avec des citoyens qui veulent se faire justice sur cette famille de dégénérés dont Leatherface n'en que la victime. Des actions non sans conséquences qui renvoient le spectateur à l'époque moderne suivre les péripéties d'une fille survivante du massacre et adoptée par deux des vigilantes. Le scénario ne s'entête nullement à créer de la cohérence, il stimule seulement le désir pour les spectateurs d'assister à un spectacle morbide sans volonté de proposer davantage. Ainsi, les gens un tant-soi peu réfléchi et ayant vu l'original s'indigneront devant la présence d'une douzaine de personnes dans la famille de dégénéré du premier opus (quatre à la base), le road-trip qui s'engage vers une maison héritée par une grand-mère inconnue, un Leatherface empathique présenté de manière presque "attachante", le fait que l’héroïne ne sache pas faire trois pas sans tomber ou qu'elle n'a, comme seule idée, que de se cacher dans un cercueil ou bien qu'en moins de 20 minutes, elle soit atteinte d'un fulgurant syndrome de Stockholm. Du traumatisme psychologique lié à la mort de ses amis, elle va passer du statut de victime à celui de grande sœur protectrice du monstre qui a massacré ses amis et tenté de la tuer, rien que ça ! Une nouvelle situation qui enterre définitivement le film dans le mauvais goût et les méandres cinématographiques.

Si des remakes du genre ont été relativement bien retranscrits à l'écran, et je pense à Alexandre Aja et sa "Colline à des Yeux" ou aux "Halloween I & II" de Rob Zombie et en attendant la nouvelle adaptation d'Evil Dead, force est de constater qu'il est regrettable de voir que des films de genre originaux tels que The Lord of Salem (Rob Zombie), You're Next, The ABC of Death et consorts n'aient pas autant de succès au box-office que ces suites de saga sans saveur. Au final, une véritable insulte à l'oeuvre originale de Tobe Hooper. Un condensé de clichés, de facilités scénaristiques, d'une technique 3D malhonnête et dispensable, et d'une intrigue risible et totalement incohérente, où même le potentiel "nanardesque" du film semble très limité. Il est dommage que des films comme celui-là ou American Nightmare cartonne au box-office tandis que des réalisateurs indépendants se battent pour concrétiser des projets personnels qui parfois se révèlent bien plus intéressants aussi bien sur le plan divertissement qu'artistique.
Softon
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le 28 avr. 2013

Modifiée

le 31 juil. 2013

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Kévin List

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