Commençons par expliquer un peu le phénomène; d'abord, il y a un film de S-F à petit budget, une série B qui s'assume mais essaie de présenter aussi un petit quelque chose en plus, quelques intuitions, presque du mythe... Et d'ailleurs, c'est un peu ces petits détails qui restent en mémoire, les seuls d'ailleurs, quand on a vu ce film à dix ans, parce qu'il pleuvait trop pour faire du sport et qu'un élève sort la VHS au nez d'un professeur parfaitement ignorant des interdictions alors en vigueur auprès du jeune public...

C'est l'histoire d'un cyborg qui se charcute le bras.

Difficile de dire qu'il y a toute une histoire autour, quelque chose d'un peu pessimiste sur le monde futur, un voyage dans le temps, non, de ça il ne reste que des bribes, c'est d'ailleurs ce qui sauve le film. Pour économiser, pas beaucoup de scènes futuristes, justes quelques images dans une décharge ou un tunnel, avec un tracteur en ferraille et deux chenilles, c'est parfait, infiniment supérieur à tout ce qu'il essaieront misérablement d'empiler dans les opus suivants...

Le cyborg est affligé d'un nom qui est tellement entré dans le langage commun qu'on en vient à oublier son ridicule intrinsèque, c'est là où le film est très fort en fait. Un esprit normal maintenu en hibernation pendant trente ans qui regarde ce film sans arrières pensées il va franchement s'emmerder... Parce que passé un début intriguant, une petite musique efficace, une arrière cour avec trois punks (dont Bill Paxton, bordel !), une pauvre fille un peu paumée dans un Los Angeles déshumanisé, un annuaire... Oui, passé la présentation sympatoche, c'est un peu catastrophique... Succession de fusillades et de poursuites en voitures sans trop de tentative pour raconter quelque chose, un héros mollasson qui ressemble à un bellâtre de série TV 80's, une héroïne hommasse à la coiffure du même tonneau et des tirades absolument ridicules que le mollasson essaie, très mal, de débiter avec conviction... Avec ça, des flics gâchés très vites dans une scène de massacre digne du cinéma bis, et la musique qui a vite laissé tomber son ambition pour s'effondrer dans la fange électronique la plus grossière...

Mais pour ceux qui sont un peu aveuglés par la légende, ou des souvenirs d'enfance il est facile d'oublier tous ces défauts pour se réfugier dans le point fort du film : le rôle titre. Arnie est alors absolument difforme et hideux de monstruosité corporelle, mais il sait en jouer. Après Conan, il est devenu quelque chose et le film lui offre probablement son meilleur rôle, celui d'une brute mutique inexorable et terrifiante que rien ou presque ne pourrait empêcher d'atteindre son but.

Bon, après, ça n'empêche pas que je me suis fait chier entre les cinq minutes à sauver sur l'ensemble du film... Ce type ne sait déjà pas très bien filmer, il fout du gros ralenti qui tâche pile quand il ne faut pas, n'a aucune notion de ce que c'est qu'une histoire, un rythme ou du suspense, il enquille les figures imposées sans réfléchir, et moi je m'ennuie beaucoup. Les héros sont primitifs, forcément, c'est du Cameron, limite idiots, et je n'arrive guère à m'intéresser à leur sort, je regarde ça de loin, en essayant d'empêcher mes paupières de tomber, j'attends le coup de la mère, la vision Doom, la boîte de nuit, mais en fait ça ne fonctionne pas trop, c'est bancal...

C'est dommage, parce que, quelque part, dans le tas, il y a trois bonnes idées, un côté honnête pour un film de seconde catégorie, de bons effets spéciaux et un manque de moyen relatif qui oblige à compenser par l'ingéniosité, ce que le réalisateur n'aura plus jamais l'occasion de faire, hélas...

C'est d'ailleurs probablement pour cela que ça reste le meilleur film de James Cameron.

Créée

le 22 août 2012

Modifiée

le 23 août 2012

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Torpenn

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