Récompensé notamment du Prix spécial du jury au festival de Gerardmer et du Prix spécial du jury au festival de Sundance en 2008, Teeth met en scène Dawn, une adolescente qui essaie tant bien que mal de contenir sa sexualité naissante. Militant activement dans un groupe prônant la chasteté avant le mariage, ce qui lui vaut d'ailleurs quelques moqueries de certains camarades, elle redouble d’efforts pour refouler tout désir sexuel, mais voit bientôt cette abstinence être de plus en plus mise à rude épreuve. Non seulement elle tombe amoureuse du séduisant Tobey, mais elle doit également endurer les provocations à répétition de son demi-frère Brad, dont la sexualité est loin d'être bridée. Etrangère à son propre corps, la vie de la prude jeune fille bascule quand elle découvre la curieuse particularité de son vagin : ce dernier est en effet tapissé de dents acérées. Ce qu'elle prend d’abord pour une damnation va rapidement s'avérer être une arme redoutable.


Pour son premier long-métrage, Mitchell Lichtenstein nous plonge dans l’univers un brin effrayant d'une Amérique conservatrice et puritaine. Celle qui remet en cause la théorie de l’évolution darwinienne. Celle qui ne voit aucune objection à présenter le plan de coupe d'un pénis dans un manuel scolaire, mais qui dissimule honteusement celui de la vulve à l'aide de jolis autocollants dorés.


Ambassadrice des vertus de l'abstinence avant le mariage, Dawn va se laisser gagner malgré elle par le désir charnel. Ironiquement, c'est lors d'une de ses conférences qu'elle fait la connaissance de celui qui sera l'objet de ses désirs. Ce qui débute par une simple attirance physique pour le garçon, va se poursuivre sous formes de rêves érotiques, qui vont la pousser finalement à accepter un rendez-vous galant. Et les deux tourtereaux de se retrouver seuls dans un coin de nature idyllique, propices aux premiers ébats.


Mu par une montée de sève incontrôlable et faisant fi des hésitations de Dawn, Tobey décide de violer la jeune fille. Mais le garçon plus que pressant se retrouve pour ainsi dire, coupé sèchement dans son élan. Pris d'une douleur atroce, quelques secondes lui seront nécessaires pour réaliser qu'une partie de son anatomie vient de lui dire au revoir.


Et l'horreur d'émerger au sein d'un long-métrage qui nous a jusqu'ici épargné les effusion de sang. Si le spectateur connait le secret de Dawn, le réalisateur a su faire monter l'angoisse et jouer avec notre principale attente, à savoir : qui sera la première victime ? Nous plaçant alors dans une posture voyeuriste plutôt inconfortable.


Quelque peu traumatisée par cette première expérience, et visiblement seule pour gérer ça (il faut dire qu'entre un frère aux moeurs dissolus, une mère malade et un père complètement transparent, elle n'est guère aidée), Dawn décide de consulter un gynécologue. Pour ce qui est sans nul doute la meilleure scène du film, parfait mélange de malaise, d'absurdité et d'horreur.


De retour chez elle, Dawn cherche à en savoir un peu plus sur l'étrangeté qui la frappe, ayant certainement en tête le serpent à sonnette, cas de mutation spontanée évoqué lors d'un de ses cours de biologie. Nul doute pour le spectateur que la centrale nucléaire, présentée dans le premier plan du film et située non loin de sa maison, n'est pas étrangère à la mutation subie par Dawn. Tout comme elle n'est sûrement pas étrangère à la maladie dont souffre sa mère.


En effectuant des recherches sur internet, Dawn tombe sur le mythe du vagina dentata, le vagin denté, qui nous est alors explicitement présenté. Présent dans de nombreuses cultures, ce mythe


Dans les nombreuses cultures où apparaît le mythe du vagina dentata, l’histoire se déroule toujours à peu près de la même manière: un homme, c’est-à-dire le héros, doit conquérir une femme possédant ce vagin.


Ici, lichtenstein inverse le principe, puisqu'il fait de de la fraîche et pure Dawn la véritable héroïne. Après la peur et le déni, cette dernière va chercher à accepter sa différence et la transformer en aptitude. D'autant plus qu'aucun des garçons qu'elle croise n'est réellement sincère dans ses intentions, tous ne cherchant qu'à parvenir à leurs fins, par tous les moyens. Ce parcours initiatique va faire voler en éclats sa pudibonderie et la dévoiler à elle-même, libérant son pouvoir et ses pulsions castratrices.


Sans atteindre l'excellence d'un Carrie par Brian De palma, Lichteinstein parvient néanmoins à saisir une partie du malaise adolescent, la peur liée à la découverte de son intimité. La métaphore du vagin denté lui permet de dénoncer l'hypocrisie et l'obscurantisme du puritanisme américain, qui apparait finalement comme un des principaux problèmes. Rien que pour ça, le film mérite d'être vu.


Dommage que la seconde partie apparaissent un poil redondante dans son déroulé, donnant l'impression de voir un court-métrage étiré à l'excès. Vidé de son potentiel horrifique au profit d'un humour facile, la satire s'avère également moins incisive qu'espérée.

Fatal_Horror
8
Écrit par

Créée

le 9 juin 2021

Critique lue 199 fois

Fatal_Horror

Écrit par

Critique lue 199 fois

D'autres avis sur Teeth

Teeth
Kenshin
7

Purity Ring.

Je n'ai pas peur de le dire, ce film est réussi. Pourquoi? Ce film est un film écolo et c'est assez évident, que je me demande même pourquoi je souligne ce point. La mutation génétique de Dawn (un...

le 2 mai 2013

21 j'aime

2

Teeth
Ezhaac
7

Jess Weixler, pressentie pour Irreversible 2

Avec sa chouette direction photo, sa mignonne actrice et ses personnages si cul-bénis qu'ils en deviendraient presque attendrissant, on pourrait prendre Teeth pour un film gentillet, de loin. Mais...

le 30 nov. 2010

13 j'aime

1

Teeth
Pravda
6

(en)rage dedans

L'actrice principale Jess Weixler, inconnue au bataillon pour moi, est une bonne surprise. John Hensley, en bad boy caricatural à souhait n'est pas crédible deux secondes. L'esthétique soignée du...

le 6 sept. 2012

9 j'aime

Du même critique

Jusqu'en enfer
Fatal_Horror
8

JUSQU'EN ENFER | Critique damnée

Après un "petit" détours du côté des productions Marvel, le temps d'une trilogie Spiderman remarquée, Sam Raimi revenait au genre qui l'a fait connaître, l'horreur, avec le bien nommé Jusqu'en enfer...

le 25 oct. 2020

2 j'aime

The Void
Fatal_Horror
9

THE VOID | Critique en mode terreur cosmique

A la tête de ce long-métrage, nous retrouvons donc Jeremy Gillespie et Steven Kostanski, tous deux membres de Astron-6, un collectif spécialisé dans les productions à faible budget mêlant...

le 10 oct. 2020

2 j'aime

Relic
Fatal_Horror
9

RELIC | Critique vacillante

Premier long-métrage de Natalie Erika James, Relic vient tout juste d'arriver dans les salles, précédé de critiques plutôt élogieuses outre-atlantique, évoquant Mister Babadook de Jennifer...

le 12 sept. 2020

2 j'aime