Je suis un peu partagé sur le cinéma d'Apichatpong Weerasethakul, car si j'ai aimé l'onirisme de certains de ses films, d'autres m'ennuient un peu et là si j'ai beaucoup aimé, peut-être son long métrage que j'ai le plus apprécié avec Cemetery of Splendour, je crois que je préfère malgré tout lorsqu'il parle des rêves avec sa manière limite naturaliste de filmer ces évocations fantomatiques.
Il pose sa caméra, la laisse tourner, les gens parlent de tout et de rien et se mettent à aborder leurs rêves, leurs croyances et tout à coup les scènes prennent une profondeur supplémentaire notamment dans Cemetery of Splendour puisque ça s'accompagnait de quelques expérimentations visuelles enivrantes.


Si je suis sans doute passé à côté de beaucoup de choses, j'ai vraiment adoré la première partie du film, malgré un petit moment métafilmique durant le générique d'ouverture où les personnages ont conscience d'être des acteurs... c'est un peu étrange. Cette première partie montre un hôpital, un petit hôpital, fonctionner, recevoir ses patients, discuter avec eux. Et si l'on a vu d'autres de ses films on sait que Weerasethakul a beau faire du cinéma contemplatif c'est extrêmement bavard. On est très loin du mutisme d'autres réalisateurs contemplatifs. Ils parlent, de toute, de rien, de spiritualité...


J'aime le calme, la sérénité qui s'en dégage, les décors ouverts. Toutes les fenêtres sont systématiquement ouvertes, on voit la jungle en arrière plan. On sent que ça tout vit, que tout ça respire, qu'on a des vrais gens, des gens qui hésitent. Puis, au milieu du film, le film semble recommencer, les décors sont blancs, l'entretien qu'on a vu au début du film reprend, avec les mêmes questions, les mêmes réponses, sauf que cette fois il n'y a plus aucune hésitation. On a changé de paradigme, on n'est plus dans le petit hôpital. Tout est froid.


Et c'est peut-être là que j'ai un peu moins aimé, certes le réalisateur veut condamner cette vision de l'hôpital qui devient une sorte d'usine impersonnelle, pour le spectateur ça fait limite écho à un paradis perdu... Mais forcément c'est moins plaisant à regarder, moins enivrant, moins charmant.


Donc d'un côté l'objectif est rempli... de l'autre ben c'est difficilement appréciable en tant que tel cette seconde partie (sans être chiante ou mauvaise).


Mais en tous cas c'est très intéressant, notamment formellement avec ces longs plans séquences au début du film où on laisse le temps aux personnages de vivre, d'expliquer leur problème, ce qui les amène à l'hôpital, à consulter, etc. Puis après la beauté du blanc maladif de l'hôpital se manifeste et emporte finalement toute la vie.

Moizi
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le 4 mars 2018

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