"Symphonie pour un massacre" est sans doute un poil opportuniste, tout du moins énormément dans l'air du temps, que ce soit dans le choix du titre, vraiment hasardeux (on cherche encore la métaphore de la symphonie) et entièrement destiné à surfer sur la vague du succès de Verneuil avec "Mélodie en sous-sol", ou encore dans le ton un peu décalé du film noir revisité à la française, un peu dans la lignée d'un "Le Doulos" de Melville. Mais Jean Rochefort alors imberbe n'apparaît pas du tout comme ridicule comparé à Jean-Paul Belmondo, bien au contraire.


Dans cette histoire de grosse magouille réalisée par 5 truands qui tourne mal, il ne faut pas trop regarder dans les coins et dans les détails. Il y a même quelques passages carrément obscurs : comment Jabeke trouve le compartiment de Giovanni dans le train, comment Valoti parvient à comprendre le jeu de Jabeke à l'aide d'un journal de Lyon... Manque d'attention de ma part ou faiblesse d'écriture, je ne saurais trancher. Reste que le plan orchestré par Rochefort ne paraît pas immédiatement convaincant, que ce soit dans ses accès de violence ou dans sa manière d'attiser la haine entre ses complices. Ce qui fait l'originalité de ce polar, sans doute, c'est la violence brutale qui surgit sans crier gare à de nombreuses reprises, avec un coup de poignard ou un coup de feu. L'absence d'hésitation peut surprendre — même si Rochefort sans moustache paraît beaucoup plus sadique que celui que l'on connaissait depuis longtemps. C'est anecdotique mais plutôt drôle : pour se déguiser, il se collera justement une fausse moustache et correspond à ce moment-là à lui-même des années plus tard.


Avec le cortège de seconds rôles qui criblaient les années 60 (Charles Vanel, Michèle Mercier, etc.), ce simili film noir manque un peu de fluidité par endroits, il surprend dans le recours assez fréquent et soudain à l'ellipse, mais demeure un minimum attachant jusque dans sa dernière ligne droite, fataliste et noire.

Créée

le 17 avr. 2020

Critique lue 1.3K fois

7 j'aime

8 commentaires

Morrinson

Écrit par

Critique lue 1.3K fois

7
8

D'autres avis sur Symphonie pour un massacre

Symphonie pour un massacre
Morrinson
6

La moustache

"Symphonie pour un massacre" est sans doute un poil opportuniste, tout du moins énormément dans l'air du temps, que ce soit dans le choix du titre, vraiment hasardeux (on cherche encore la métaphore...

le 17 avr. 2020

7 j'aime

8

Symphonie pour un massacre
estonius
6

Pas mal mais vraiment pas de quoi crier au miracle

Belle distribution, belle photographie de Claude Renoir, bonne direction d'acteur, mais petit polar assez original dans son traitement et dans son fond, mais pas toujours bien clair, si vous avez...

le 7 avr. 2019

5 j'aime

2

Symphonie pour un massacre
Boubakar
7

Un pour tous.

Après avoir récupéré un trafic de drogue, un des cinq truands décide de vouloir garder le magot pour lui seul, et a en tête d'éliminer les autres. Troisième film de Jacques Deray, suivant Du rififi à...

le 6 avr. 2019

5 j'aime

Du même critique

Boyhood
Morrinson
5

Boyhood, chronique d'une désillusion

Ceci n'est pas vraiment une critique, mais je n'ai pas trouvé le bouton "Écrire la chronique d'une désillusion" sur SC. Une question me hante depuis que les lumières se sont rallumées. Comment...

le 20 juil. 2014

142 j'aime

54

Birdman
Morrinson
5

Batman, évidemment

"Birdman", le film sur cet acteur en pleine rédemption à Broadway, des années après la gloire du super-héros qu'il incarnait, n'est pas si mal. Il ose, il expérimente, il questionne, pas toujours...

le 10 janv. 2015

138 j'aime

21

Her
Morrinson
9

Her

Her est un film américain réalisé par Spike Jonze, sorti aux États-Unis en 2013 et prévu en France pour le 19 mars 2014. Plutôt que de définir cette œuvre comme une "comédie de science-fiction", je...

le 8 mars 2014

125 j'aime

11