Un film intéressant qui mérite mieux que l’indifférence, malgré des aspects critiquables.

Les côtés négatifs d’abord. Il est sans doute un peu long. Et surtout, il peut décevoir en ne donnant jamais d’explication à la situation de départ. Une situation que le spectateur doit accepter pour entrer dans le film, malgré son invraisemblance. Enfin, il a le « tort » de donner une image bien négative du petit monde de la télé. Une image qui m’a néanmoins parue très crédible.
Un matin dans le métro, un inconnu assis regarde plusieurs fois une jeune femme qui lui plaît. Situation banale dont cet anonyme pas spécialement séduisant n’attend rien. Pourtant, avant de descendre, la femme lui adresse un petit sourire de connivence. Un gentil jeu de séduction ? Eh bien non, c’est juste le moment où tout bascule pour Martin Kazinski (Kad Merad) car tout le monde se met à le regarder, à le reconnaître en l’appelant par son nom et son prénom, à le tutoyer et à lui demander des autographes. Bref, on lui témoigne l’admiration habituellement réservée aux stars (cinéma ? chanson ? sport ?)
Martin est un travailleur célibataire sans histoire et absolument pas préparé à cette gloire aussi subite qu’inexpliquée. Le réalisateur Xavier Giannoli part d’une situation kafkaïenne pour montrer les conséquences qu’elle peut avoir. Martin est aussitôt filmé par les passagers du métro avec leurs portables. Ces films et de nombreuses photos sont dans la foulée placés sur Internet. Cela crée un buzz (Pourquoi ? Comment ?... mystère) qui attire l’attention des médias. Peu importe que ce buzz repose sur du vent. La curiosité du public est là, autant en profiter. Martin est placé sous l’aile protectrice de la charmante Fleur (Cécile de France) productrice d’un talk show dont a va voir les mécanismes. Malheureusement, lors de l’émission (en direct) Martin est confronté au rappeur Saïa qui, présent pour débattre de la violence, trouve rapidement l’occasion de récupérer la situation à son compte avec un peu de provocation. Bref, la vie de Martin devient un cauchemar.

Le film s’attache à montrer l’engrenage dans lequel Martin se trouve engagé à son corps défendant. Surtout, le film montre comment fonctionne le jeu de la notoriété. Démonstration par l’absurde certes, puisque Martin n’en veut pas de cette célébrité, contrairement à Alberto Sorbelli qui applique à sa façon la prophétie d’Andy Warhol qui disait que chacun peut avoir son quart d’heure de célébrité. Martin côtoie Alberto et les autres, ceux qui recherchent la célébrité et ceux qui contribuent à la créer, l’entretenir. Le public et les médias sont renvoyés dos à dos. Absence de complaisance intéressante illustrée par le propos d’un des journalistes disant que les gens regardent ce qu’ils méprisent. Cynisme ? Concrètement, qui résiste à la tentation de jeter un coup d’œil à ces émissions dont tout le monde parle (à partir de quand et pourquoi ??), au moins pour ne pas rester en dehors du coup, se faire son opinion. Sauf qu’à ce petit jeu on peut être amené à regarder n’importe quoi et rester devant pour voir jusqu’où on peut aller dans la bêtise humaine. Résultat, les journalistes ont beau jeu de prétendre servir au public ce qui lui plaît. On tourne ainsi en rond dans un système qui s’empare du moindre micro-événement pour entretenir la machine, quitte à se demander ensuite si cet événement n’a pas été créé de toutes pièces par un petit malin.

Le journaliste vedette du talk show a le malheur d’utiliser un mot qui déplaît au rappeur. Celui-ci fait monter la sauce en accusant le journaliste d’insulter Martin. C’est vrai qu’il faut faire attention avec les mots. Sauf que le rappeur se jette sur une maladresse franchement légère. Au départ, ce mot n’est une insulte qu’à ses yeux. Mais il a un certain « poids » et son accusation aura aussi des conséquences…

Ce film fait certes penser à d’autres, comme « Viva la vie » de Lelouch. Il est une sorte de contrepied à « Jean-Philippe » de Laurent Tuel. Enfin, il lorgne du côté du génial « Un homme dans la foule » d’Elia Kazan. Il n’en a pas la fulgurance. Mais, après le remarquable « A l’origine » Xavier Giannoli montre que le thème de « l’imposteur » l’inspire bien. Enfin, on peut ironiser en demandant pourquoi Kad Merad ? Le rôle lui convient parfaitement, même s’il passe son temps à demander qu’on lui foute la paix. Ses détracteurs en profiteront pour ignorer le film…
A signaler quelques scènes hilarantes parce que totalement incongrues (le présentateur qui se mouche, puis Martin qui ironise sur l’événement que constitue son petit-déjeuner).
Electron
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le 4 sept. 2012

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Electron

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