Certains d’entre vous sont peut-être tombés sur Disney+ sur la série japonaise de 2022 Sumo Do, Sumo Don’t, également appelée Sumo Education. Cette série est le reboot d’un film de 1992 du même nom qui est devenu un classique au Japon et qui avec Fancy Dance (1989) avant lui et Shall We Dance ? (1996) après lui forment une sorte de trilogie en reprenant le même schéma. Trois films dans la même mouvance, reprenant à peu près le même schéma narratif mais en changeant la thématique principale. Dans Fancy Dance, nous suivons les membres d’un groupe de rock dont le chanteur va devoir devenir un moine bouddhiste pour hériter du temple de son père. Dans Shall We Dance ?, on va assister à la transformation de plusieurs personnages qui se sont mis à la danse pour diverses raisons et pour qui cela va devenir un art de vivre. Dans Sumo Do, Sumo Don’t, comme son titre l’indique, le film va s’attarder sur ce sport ancestral typiquement japonais, le sumo, mais surtout à un groupe de personnages qui par la force des choses vont devoir se mettre à le pratiquer, et qui vont ressortir grandis de cette expérience. Et à l’instar de Shall We Dance ? dont je vous parlais récemment, c’était vraiment bien.


Une fois de plus, Masayuki Suo parle ici des gens. C’est un film sur le Sumo, certes, mais ce sont les gens qui sont au centre de tout. Ça parle de personnages qui vont vivre une expérience de vie et qui vont peu à peu se découvrir ; des personnages qui ne vont pas se mettre au sumo pour les bonnes raisons mais qui vont y trouver autre chose de bien plus profond. Ils sont stéréotypés, oui, avec par exemple celui qui va juste se mettre au sumo pour se rapprocher d’une fille présente au club (pas en temps que lutteuse), le timide qui n’a pas d’amis et qui vient là juste pour être accepté par les autres, … Des héros un peu marginaux, gentiment moqués au début pour mieux les mettre en valeur au fur et à mesure que le film avance, soit par la comédie, soit par des moments plus touchants (par exemple celui de Masako, jeune fille en surpoids, ou celui d’Aoki avec son regard plein de vie lorsqu’il s’aperçoit qu’il a surpassé ses peurs) sans que jamais cela ne tombe dans la sensiblerie. Sumo Do, Sumo Don’t est un film sincère, plein d’humanité, qui va constamment être dans le positif, même dans les moments un peu durs pour ses personnages, avec cette envie d’aller de l’avant, de se dépasser, de montrer qu’on peut tout faire lorsqu’on a une détermination de fer et qu’on est une équipe soudée. Cette équipe existe bien entendu grâce aux efforts individuels de ses membres, mais aussi et surtout grâce à l’effort collectif. Le casting est excellent, des premiers rôles aux moindres seconds rôles et les personnages le sont tout autant. Mais surtout ici, il n’y a pas réellement de héros. Le vrai héros, c’est le groupe, c’est l’équipe, et elle doit être soudée. Si on prend la « trilogie » dans son ensemble, les films montrent comment, pour les Japonais du moins, la dynamique de groupe est essentielle à la réussite. Tout le monde doit apprendre ensemble et personne ne doit être laissé pour compte.


Sumo Do, Sumo Don’t rentre directement dans le vif du sujet avec son personnage principal qui va se retrouver à faire du Sumo dans son école alors qu’il n’y connait rien du tout, pour éviter que le club mette la clé sous la porte. Il sera donc vite rejoint par quelques camarades tout aussi doués que lui. Sauf que ce sport est devenu presque ringard pour les jeunes qui préfèrent le football américain, le catch, le baseball, … ou tout simplement les filles. Je vous rassure, comme il n’est pas nécessaire de s’intéresser à la danse pour regarder Shall We Dance, il n’est pas nécessaire de d’aimer, voire de connaitre le sumo. Une fois de plus, Masayuki Suo parle avant tout des gens, du regard des autres, de la religion même, des traditions, de comment elles sont parfois moquées. Mais le film aborde aussi le dépassement de soi, la découverte de soi, ou d’autres thématiques universelles telles que la fraternité ou le courage. Il critique également parfois certains aspects de la société japonaise, par exemple via le personnage occidental qui n’obtient jamais de réponses à ses questions légitimes sur la société japonaise. Bien que Sumo Do Sumo Don’t soit plus japonais que Shall We Dance, le sumo étant bien plus local que la danse qui est plus universelle, le film de Masayuki Suo parlera malgré tout à tous les publics grâce à son histoire touchante où des personnages lambdas, parfois improbables, vont devenir des héros. Suo réfléchit parfaitement la composition de ses plans, sait mettre en valeur ce qui doit l’être et, bien que la mise en scène ne fasse jamais preuve de folie, elle est à l’image des personnages du film, simple. On pourra regretter quelques sous-entendus homosexuels pas de très bon goût, ainsi que des blagues pipi-caca (mais qui s’insèrent bien dans le contexte), mais l’humour fonctionne malgré tout grâce à des moments plus fins et surtout un humour et une ambiance bon enfant qui vont planer tout le long du film. On sourit souvent, on rit parfois à gorge déployée (merci Naoto Takenaka), et Suo évite la mièvrerie des amourettes de ce genre de films afin que l’ensemble reste tout le temps fluide et rythmé. Le résultat est certes plus classique que Shall We Dance, mais il n’en demeure pas moins une jolie petite réussite.


Avec Sumo Do, Sumo Don’t, Masayuki Suo brosse à nouveau le portrait de personnages qui arrivent dans un milieu dont ils ignorent tout mais qui finira par les subjuguer. Une nouvelle réussite pour un réalisateur décidément très intéressant.


Critique originale avec images et anecdotes : https://www.darksidereviews.com/film-sumo-do-sumo-dont-de-masayuki-suo-1992/

cherycok
7
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le 3 oct. 2023

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