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C’est le visionnage l’autre jour d’Eva en août, film de Jonás Trueba sorti timidement en août 2020 dans l’entre-confinement, qui m’a donné envie de revenir en critique sur Stockholm, première réalisation de l’espagnol Rodrigo Sorogoyen.


J’ai plutôt pour habitude de rédiger mes critiques dans la foulée du visionnage (après quelques heures de réflexion), ou bien le lendemain après une bonne nuit de maturation. Petite exception donc ici, puisque j’ai découvert Stockholm au début du second confinement, il y a maintenant un peu plus de 4 mois.
Je ne me baserai donc pas tant sur de petits détails de réalisation ou sur une séquence en particulier, mais plutôt sur l’impression générale que m’a laissé le film, « à froid ». Car malgré les quelques mois écoulés et le visionnage d’au bas mot 200 autres longs métrages dans l’intervalle, je dois dire que Stockholm a durablement marqué mon esprit.


Avec un micro-budget de seulement 60 000 euros (crowdfunding, bonjour !), et 13 jours de tournage bénévoles pour la jeune équipe artistique, Stockholm révèle pour la première fois l’incroyable talent de Rodrigo Sorogoyen, qui, avec Que Dios nos perdone en 2016, El Reino en 2019, et le très beau Madre en 2020, fait aujourd’hui figure d’un des réalisateurs les plus en vue sur la scène cinématographique espagnole.


Revenons sur le parallèle avec Eva en août : tous deux se déroulent dans la moiteur de l’été madrilène (oui, rien à voir avec la capitale de la Suède, bien qu’on comprenne le choix du titre au visionnage), et trouvent leur inspiration dans la déambulation à travers une ville abandonnée par ses habitants, qu’ils soient partis en vacances à la recherche de fraîcheur dans Eva en août, ou bien endormis, au plus profond de la nuit, dans Stockholm.
Tous deux trouvent un socle commun dans cette rêverie aux hasards des rues, et de ses rencontres.


Dans Stockholm, c’est celle d’un jeune garçon, sobrement dénommé « Lui » (magnifique interprétation de Javier Pereira, qui lui vaudra le Goya du jeune espoir masculin en 2014 – l’équivalent espagnol de nos César) et d'une fille, « Elle », à la beauté troublante (incarnée par Aura Garrido).
Au sortir d’une boîte de nuit, ils se rencontrent, et déambulent dans la rue en discutant, moments de drague tendres et touchants, sensibles et drôles. Les dialogues sont d’une justesse sidérante, et m’ont vraiment transporté avec beaucoup d’émotion.


Puis, sans crier gare, vient la rupture : comme un coup de massue sur ce qui prenait la direction d’une jolie comédie romantique, la dure réalité des rapports humains et amoureux ressurgit, avec toute la violence qui va avec. C’était trop beau pour être vrai ! L’affiche espagnole indique qu’ « à la moitié, le film se rompt en deux avec élégance et subtilité » : c’est tout à fait ça. C’est je crois ce revirement dans le scénario, ainsi que l’ultime séquence du film, au petit matin, qui ont si durablement marqué mon expérience de cinéphile.


Nous n’en dévoilerons pas plus – c’est déjà beaucoup – mais je peux dire que Stockholm est un film qui m’a profondément marqué et qui, s’il est sans nul doute bien moins connu que ceux qui l’ont suivi, reste l’un de mes grands coups de cœur du cinéaste.

D-Styx
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le 19 mars 2021

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D. Styx

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