Qu'il a été malin de la part de Miss Broccoli d'engager un réalisateur de talent pour traiter sa tant aimée franchise qui encore une fois battait de l'aile bien méchamment. Un soubresaut en 2006, pour retomber dans la nullité tant visuelle que scénaristique avec l'immondice bournesque de 2008. La productrice a bien su cerner ce qu'il manquait à son familial pupille, et parvint même à lui faire retrouver ce qu'il lui manquait depuis tant d'années.
Sam Mendes, bien que nombreux soient les gens qui exècrent son travail, est un homme intelligent et talentueux, qui sait pertinemment s'entourer. Ce qui fait de Skyfall, un florilège maîtrisé d'images fortes et d'éléments bien amenés. Sans partir dans les délires des maladresses scénaristiques dont pâtissent la plupart des gros films actuels, je préfèrerai parler de ce qui fonctionne. Un James Bond décédé qui résolu à se la couler douce en saoulant la gueule sur une plage méditerranéenne, qui finit par revenir d'outre-tombe quand il voit sa mère patrie malmenée par des terroristes peu scrupuleux. Ça fonctionne! Une relation mère/fils entre Bond et M qui prend enfin son ampleur après 17 ans de tergiversations peu claires. Ça fonctionne! Un Ancien du MI:6, qui ne veut pas dominer le monde, mais juste se venger de cette chère Judi Dench. C'est une variation sur un méchant déjà vu (Cf: Goldeneye), mais Ça Fonctionne! Un Q hypster délaissant gadgets abrutissants pour revenir à des bases utiles et simples. Ça Fonctionne! Un Futur M en la personne de Ralph Fiennes...ÇA FONCTIONNE!!! (Même s'ils mettent Michael Bay à la réalisation du prochain...J'irai Quand même). Après les flous dans l'intrigue, le côté Scottish Home Alone ...ce n'est pas grave, tout fonctionne quand même. C'est un film d'action sobre et maîtrisé qui ne se finit pas de manière complètement folle et ne met pas en jeu des missiles nucléaires!!!
Là où le film est une claque, c'est du côté de l'image. Parce des James Bond techniquement irréprochables, il n'y en a pas tant que ça, le dernier en date étant sans aucun doute Tomorrow Never Dies. Mais ce qui est encore plus fort avec Skyfall, c'est que c'est maîtrisé, original et parfois même foutrement couillu. Ça ne part pas dans tous les sens avec un caméra portée à vous faire gerber vos tripes dans le pop-corn du voisin, Non! C'est posé, joli, tout en restant assez bien monté et rythmé. James Bond n'est pas Jason Bourne, même s'il en a quelque peu l'allure de nos jours et c'est du spectacle grandiose et lisible qu'il nous faut nous offrir à chaque opus, et non pas un truc dégueulasse à la Quantum Of Salace. Et par dessus le marché, Roger Deakins, qui fait un travail admirablement propre, nous offre deux des séquences des plus audacieuses artistiquement parlant dans le paysage cinématographique du Blockbuster ampoulé contemporain. Cette fameuse séquence dans le gratte-ciel hong-kongais, qui est d'une beauté hallucinante, et ce final des plus plus travaillé dans lequel la lumière de certains plans vous flanquerait à la porte les trois quarts des chef-ops d'Hollywood.
Non-exempt de défauts, Skyfall pâtit de quelques tares non négligeables. Notamment ce sous-emploi de femme, préférant créer une attirance homosexuelle entre Bond et le méchant Silva, le temps d'une séquence bien cocasse. C'est dommage, parce qu'elles sont jolies la française et Naomi Harris. Cette dernière ré-invente intelligemment le rôle de Moneypenny, trop en retrait depuis les derniers Roger Moore. Et pour en revenir à Silva, Javier Bardem cabotin, fait une excellente composition, empruntant à Sean Bean, Christopher Walken et Christopher Lee, le meilleur de leurs performances passée. On regrettera aussi de l'intrigue un côté un peu fouilli, surtout dans le raisonnement des personnages (notamment Bond et Q, qui passent un peu pour des cons), mais étant donné que c'est au profit d'un spectacle de taille, gardons nous de cracher abusivement dans la soupe. Même si la "Nolanisation" du personnage, dont le passé était depuis 50 ans on ne peut plus flou, tend à donner une dimension actuelle et pas franchement justifiée à James Bond; sachant que ce n'est pas forcément fidèle au personnage de Fleming. Le film apporte tout de même un semblant de réflexion sur l'évolution du terrorisme mondial, réflexion aussi anecdotique qu'intéressante, dont il faut toutefois saluer la présence. D'autant plus qu'on appréciera allègrement l'intelligence des techniciens à avoir préférer les splendides maquettes à l'immonde CGI actuel pour rendre cette mission explosive.
Anniversaire de la franchise oblige, les références sont là, plus subtilement amenée que dix ans auparavant dans le très drôle Die Another Day. On retrouve l'arme à signature, précédemment vue dans Licence To Kill, mais aussi l'émetteur radio de Goldfinger. Et bien sûr, la splendide Aston Martin DB5! Offrant un gag bien drôle, M se plaignant de l'inconfort de l'automobile. Et quand Silva s'amuse à exploser ce joli Tacot, on sent bien que 007, n'est pas très content de voir son jouet favori partir en fumée.
Skyfall parvient redorer le blason de la franchise, sans doute grâce au bon goût de Sam Mendes et Roger Deakins. L'élégance perdue depuis les années 60 permet à l'espion de retrouver sa classe si caractéristique. Un divertissement intelligent et réussit, pour une année peuplée de déceptions en tous genres. Espérons que la franchise soit relancée durablement, nous préservant d'un prochain opus raté comme il en existe tant.