On part avec un excellent casting (entre autres Helena Bonham Carter, Eddie Marsan et Stéphane Rea) et un pitch qui tourne autour de Bernie, un juif anglais qui doit fêter sa Bar Mitzvah au moment de la coupe du monde de football de 1966.


Le film nous plonge tout de suite dans une esthétique et un humour qui fait penser à un mélange entre Jean-Pierre Jeunet et Wes Anderson, où la scène d'entrée est clairement un clin d'œil à la première scène d'Amélie Poulain. De cette manière, Bernie nous présente sa famille, et surtout son père, avant un turnaround à la Maman, j'ai raté l'avion qui lancera un court générique vintage puis l'intrigue du film.


Pendant que son père et son oncle doivent faire subsister leur épicerie face à l'ouverture d'une grande surface à deux pas, Bernie, lui, veut organiser la Bar Mitzvah la plus fantastique de tous les temps. En effet, Bernie manque à tel point de considération et de reconnaissance qu'il se tape des egotrips imaginaires géniaux sur le thème musical de Lawrence d'Arabie ou d'autres références musicales iconiques. Il se fait martyriser à l'école ou par son frère aîné qui va jusqu'à l'empêcher de marcher sur le tapis central de leur chambre commune. Dans sa famille éloignée, tout le monde l'appelle Bernard au lieu de Benjamin et ses parents le font toujours passer en arrière-plan ou l'oublient. Pour couronner le tout, Bernie a très honte de son père, joué par l'épatant Eddie Marsan, un père avec de nombreux toc et tellement pas drôle qu'il ridiculise sa famille à longueur de temps et fait crever de rire le spectateur. Tous ces éléments ont decidé Bernie à se dépasser dans l'organisation de sa Bar Mitzvah et à s'appuyer sur un Rabbin aveugle hilarant avec un accent mémorable qui fait des leçons de vie de bas étage. L'acteur méconnu qui joue le rabbin aurait mérité un gain de notoriété tellement il est bon.


S'en suivent de nombreux gags et détournements épiques autour du communautarisme religieux, comme la carte de visite du Ku Klux Klan ou la crise cardiaque parentale liée à une fraude fiscale. S'en suivent les crises d'asthme de Bernie et ses consultations chez Stephen Rea où ils reproduisent à deux les premiers matchs de coupe sur un plateau miniature (ces scènes sont entrecoupées d'images d'archives des vrais matchs et ça rend le tout très dynamique et ancré dans une époque). S'en suivent les rituels vaudou que Bernie entreprend pour faire perdre les anglais avant la finale qui doit avoir lieu le même jour que sa fête. S'en suit l'humiliation constante de son père par son oncle qui vient de vendre l'épicerie pour acheter un magasin de chaussures. Et ça y est, les derniers clous de la comédie dramatique familiale peuvent être enfoncés.


Ce moment où l'oncle rajoute le nom de son frère sur la devanture, ce moment où les parents de Bernie réalisent, après sa Bar Mitzvah ratée, qu'ils ont fait des préférences dans leurs enfants, ce moment où le médecin se fait quitter par sa femme. Des moments clés qui font comprendre que la réalité est toujours plus complexe que ce que nous transmet un regard d'enfant, que le sport fédère des peuples et des familles par les larmes et la joie, que chaque humain ne reste qu'un être humain.


Un film qui se clôture sur les belles paroles de Bernie : "Quand on devient un homme, on cesse d'en vouloir à son père d'être imparfait. On se rend compte que c'est juste un homme et on aime l'homme qu'il est."

Dagerwoman
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le 15 juil. 2020

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SeverineGodet
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Joliment fait mais tristoune

La reconstitution des années 60 est superbement bien faite et les acteurs excellent. Mais le pauvre petit héros est tellement dans la mouise pendant tout le film juste pour organiser sa bar mitsvah...

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