Ce n’est pas une bouffée d’air, c’est un ouragan de fraîcheur, une déferlante d’optimisme, un tourbillon de bonheur qui t’emmène avec lui sans te demander ton avis.


On pourrait lui reprocher d’aller trop vite en besogne par un manque de réalisme. Le décor est en tout cas vite posé. Conor se met en tête de créer un groupe de musique pour impressionner une fille plus âgée. Un peu à la manière de Captain Fantastic, les gosses sont tout de suite extrêmement doués. On échappe en effet à l’étape préliminaire que ce genre de film à l’habitude de rencontrer. Le genre de scène où tu es forcé de détourner les yeux tellement le personnage s’humilie en public. Parce qu’il faut apprendre à tomber pour mieux se relever. Pas de ça ici et c'est tant mieux. Lui faire le reproche du réalisme, ce serait ne pas avoir compris le but de Sing Street.


John Carney n’est pas intéressé par le réalisme. C’est un romantique dans sa forme la plus pure, et avec son drame musical « Once » déjà, il est passé maître dans l’art de capturer la magie romantique de la musique.


Parce que Sing Street, c’est l’ultime embrassement de l’optimisme. Pas seulement par sa fin ou sa morale donc, mais tout au long du film. La ballade se déroule sans aucun accroc, les engrenages s’entrechoquent dans une symphonie parfaitement réglée.



Your problem is that you’re not happy being sad. But that’s what love is, Cosmo. Happy-Sad.



Un optimisme qui n'est pas entravé par les quelques événements fâcheux, lesquels sont directement adoucis par une morale indéfectible. Parce ce qu’il y a quelque chose de particulièrement beau dans le doux-amer, dans le bittersweet. Avec l’agilité de ses dialogues et la fluidité de son récit, John Carrey retranscrit cette émotion ambiguë avec brio.


Tout est épuré au maximum pour laisser place à la musique. Elle crée l’émotion et la transmet avec une facilité déconcertante. Elle en transmet tellement que la réaction physique est inévitable. Claquement de doigts, hochements de tête, dance moves improvisés, air guitare incontrôlée… impossible de résister à la contagion frénétique. Parce que la musique raconte l’histoire et qu’elle donne de la couleur. C’est une forme d’expression et ce qu’elle transfère parle à chacun d’entre nous.




  • What style would you say you were ?

  • I’m a futurist

  • Epic. See you in the future then.



Je ne pense pas qu’il y ait un public cible comme ça été dit. Ca rend hommage à la New Wave des ’80 mais le propos est universel, intemporel. La place à la nostalgie n'est ainsi pas primordiale. C’est au contraire, le processus créatif qui est célébré. Parce que chaque école, bar, mariage a une cover band. Et que dans chaque cover band, il y a quelqu’un qui ne saura jamais ce qu’il serait devenu s’il avait écrit des chansons originales.


J’ai pour habitude de dire qu’un film réussi est un film qui m’empêche de dormir la nuit. Mais je vais devoir revoir ma copie, parce que Sing Street se déroule comme un rêve. Un rêve contagieux qui se prolonge au réveil, en laissant un sourire et une joie de vivre ineffable.




Deuxième visionnage :


Je me rends compte que j'étais passé à côté de tout le propos du film dans ma critique. Ce n’est pas du tout vécu comme un rêve, ce n’est pas du tout 100% feel-good, c’est tout le contraire.


Tous les personnages vivent un calvaire constant, tous les personnages sont isolés, même quand ils sont ensemble. C’est même hyper violent à tous les niveaux (la brute qui se fait lui-même brutaliser, le directeur-prêtre hyper abusif, le frère en pleine crise existentielle, les parents en pleine relation destructrice, sans parler de l’absence des parents Raphina, des déceptions amoureuses de tous les côtés).


Et Connor va essayer de trouver le meilleur dans chaque situation, s’échapper du monde extérieur, ne pas se lamenter sur son sort, afin de vivre ses rêves. Je pense vraiment que c’est le propos du film, et c’est résumé par cette réplique.


« What does happy-sad even means » ?
« It means that i’m stuck in this shit hole, full of morons and rapist and bullies and i’m gonna deal with it. It’s just how life is ».

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le 7 nov. 2016

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Peaky

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