Je me suis rendu à la projection de Simon Werner a disparu avec des appréhensions. J'avais lu un papier pas terrible sur le sujet et les références citées ici et là -mais pas par la production- faisaient peur. En effet, Simon Werner est un film découpé en quatre parties qui se recoupent et traite le jeunesse au lycée. On pense donc tout naturellement au culte mais pourtant très soporifique film de Gus Van Sant : Elephant. Heureusement, Simon Werner n'est pas Elephant et le jeune réalisateur Fabrice Gobert a, lui, quelque chose à raconter d'autre que du vide en attendant un dénouement final.

Simon Werner est donc une agréable surprise, à défaut d'être un film parfait. Et il est également plus éloigné des références que les critiques semblent y trouver. Effectivement, Gobert emprunte à Van Sant quelques idées comme celle de filmer le fameux Simon de dos quand il marche mais les histoires de destins croisés se sont déjà vues ailleurs heureusement.
Ici, on suivra donc quatre jeunes dont le premier a disparu. Les autres seront confrontés à sa disparition dans leur quotidien de lycéen de banlieue parisienne. Chaque séquence, minutieusement écrite pour éviter les incohérences, permettra au spectateur de découvrir les personnages mais aussi d'avancer dans l'histoire et le mystère de cette fugue potentielle mais aussi de le noyer dans quelques fausses pistes.

La minutie se sent aussi dans la reconstitution : le film se déroule en 1992 et fourmille de petits détails pour bien nous le rappeler, sans pour autant valser dans la facilité en nous montrant quelques clichés d'époques. Mais les vieilles consoles, les sweat-shirts comme on n'en porte plus et les blousons bombers sont de retour. L'ambiance, très réaliste, décrit parfaitement le quotidien d'une banlieue parisienne quelconque, partant du juste principe qu'elles se ressemblent toutes.
Il est donc évident que si vous avez fréquenté le lycée à cette période-là et que vous avez maintenant la trentaine ou plus, le film évoquera de nombreux souvenirs tant les comportements de l'époque semblent juste.

D'ailleurs, si vous trouvez que les personnages sont un peu caricaturaux (la jeune espèce de gothico-punk, la plus belle fille du bahut et sa copine discrète, l'intello qui se fait chahuter), notez que c'est fait exprès. Le réalisateur explique justement qu'à cet âge, on a tous cherché à un moment ou à un autre faire partie d'une communauté, à vivre comme au cinéma. Le trait n'est donc qu'à peine forcé.

L'ensemble est donc intéressant et, dès qu'on a bien situé qui était qui, on se laisse capter par l'histoire et ces jeunes dans leur lycée. Malheureusement, le film n'est non plus sans défaut. Ce n'est ni un thriller, ni un teen movie, ni même un drame avec des adolescents. C'est un mix de tout ça, ne forçant à tort jamais le trait et l'ensemble manque donc de tension. Plutot que de se choisir un genre, le réalisateur préfèrera raconter son histoire de disparition uniquement du point de vue des adolescents, ce qui n'est pas toujours passionnant à cet âge-là. Pas question d'ennui mais on ne s'accroche pas à son siège pour autant.

Par ailleurs, si l'ensemble est correctement filmé, l'image manque de travail et d'une photo un peu plus ingénieuse. Certains plans, accompagnés par des dialogues un peu maladroits et quelques acteurs pas terribles finiront par sembler issus de séries pour ados dont personne n'a cure.
A ce sujet, si les jeunes acteurs, pour la plupart débutants, s'en donnent à cœur joie comme il se doit, certains rôles adultes manquent de saveur. On retiendra les prestations des deux jeunes rélévations féminines, Ana Girardot, fille d'Hippolyte et la délicieuse Audrey Bastien qu'on espère revoir très vite.

Simon Werner a Disparu... est donc un premier film intéressant, à défaut d'être parfait, moins influencé qu'il n'y parait et bénéficiant de bonnes trouvailles. On suivra donc avec intérêt la carrière de Fabrice Gobert.
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le 20 juil. 2011

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