C’était très bien !


Je dois avouer avoir été très surpris par le film, que je n’imaginais pas du tout ainsi : je m’attendais, à la lecture de son pitch – des pêcheurs alors en pleine mer se retrouvent successivement frappés par un mal étrange –, à un huis clos tendu et impitoyable… Il n’en est rien ! De ce pitch emballant, Christian-Jaque nous livre au contraire une aventure internationale et d’un optimisme réjouissant.


Ceci puisque le film ne suit en fait pas tant les marins mal-en-point sur leur chalutier que la vingtaine de personnages « sur terre » qui vont répondre à leurs appels de détresse et participer à leur sauvetage (pas le choix : les marins empoisonnés n’ont que quelques heures pour s’injecter le sérum idoine alors qu’ils sont à deux jours de la côte la plus proche !). Des personnages aux profils variés (des hommes comme des femmes, des jeunes comme des vieux, des civils comme des militaires – et il y a même un aveugle !) et aux nationalités diverses (Togolais, Français, Allemands, Ricains, Russes, Norvégiens) qui vont tous, main dans la main, constituer une formidable chaîne de solidarité humaine pour sauver ces douze types qu’aucun d’eux ne connaît pourtant et ne connaîtra d’ailleurs jamais.


Une chaîne de solidarité spontanée, volontaire et complètement désintéressée donc, qui ne repose que sur la seule bonne volonté de ses membres (« tous les gars du monde » du titre, ce sont eux !) et se forme contre toute la bureaucratie, les protocoles et les frontières d’un monde alors en pleine guerre froide (ce qui a son importance à un moment précis).


Et franchement, si, présenté comme ça, le propos transpire la naïveté et l’angélisme dégueulasses, le film ne donne pourtant absolument pas dans la guimauve dégoulinante, bien au contraire (le patron Clouzot ayant co-écrit le film, l’inverse aurait au demeurant été étonnant). Non non, le film parvient à faire montre d’une bienveillance et d’un humanisme absolument désarmants sans jamais sombrer dans la niaiserie. A composer une ode à la fraternité universelle qui ne donne jamais envie de distribuer des claques. Les comportements et les réactions des personnages, ainsi que leurs échanges, sonnent toujours justes et on a en fait juste envie d’y croire... Même le coup du vilain Breton raciste (Jean Gaven, l’acteur le plus charismatique du film avec Trintignant) qui finit par se rabibocher avec le crouille (sic) qu’il accusait de tous les maux fonctionne ici. S’il n’y a pas du talent derrière cet exploit, que l’on me jette à la mer !


D’autant que le film regorge de qualités (écriture, mise en scène et distribution irréprochables) et de scènes marquantes (mon petit cœur se souviendra de celle du chat), qui lui permettent de rester captivant de bout en bout, sans jamais que la pression ne relâche et que le sentiment d’urgence ne faiblisse.


Je ne m’étends pas davantage : vous l’aurez compris, Si tous les gars du monde… est une éclatante réussite ; un bien beau film qui, derrière son récit de mission de sauvetage, cache une belle aventure collective. Bref, en deux mots : un film qui donne la pêche (ho ho) !

ServalReturns
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le 16 févr. 2022

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ServalReturns

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