Un conseiller fiscal anglais, de grande réputation, est mariée à une jeune américaine, qui s'ennuie un peu durant les longues journées de travail de son époux. Du coup, elle sort de son côté dans Londres, et revient assez tardivement au domicile conjugal, ce qui étonne un peu son mari. De peur qu'elle ne voie un autre homme, il embauche un détective privé qui va la suivre en filature.
Avec Sentimentalement vôtre, on assiste là au dernier film de Carol Reed, revenu sur ses terres anglaises après 15 ans de hauts (Oliver et ses Oscars), et de bas (le renvoi par Marlon Brando du tournage des Révoltés du Bounty) qui vont le laisser dans un état exsangue, au point qu'une crise cardiaque le terrassera quelques années plus tard. Là, il revient à quelque chose de plus sobre, tiré d'une pièce en un acte de Peter Shaffer, où seuls trois personnages existent réellement à l'écran. Michael Jayston, le conseiller raide comme un piquet, Mia Farrow qui est son exact contraire et ne pense qu'à prendre du bon temps, et le génial acteur israélien Topol, un détective privé complètement fantasque, qui pourrait sortir de chez Blake Edwards, et qui va en quelque sorte révéler ce que sa femme est et doit être pour son mari.
D'où cette comédie romantique que je trouve merveilleuse, avec tout un flashback sur leur première rencontre, où le futur mari se montre un peu plus fantaisiste qu'il ne le montrera par la suite, ce qui charmera Mia Farrow. Et ensuite, comme pour l'ensemble des couples, c'est la vie professionnelle, sociale avec ces soirées business ennuyeuses à mourir, qui reprend le pas sur le rêve qu'inspire une belle rencontre. Jusqu'à la partie où Topol va suivre Mia Farrow que je trouve délicieuse à suivre, car là, on se croirait presque dans une comédie burlesque, et une conclusion ouverte, car au fond, l'amour dans un couple peut être signe de deuxième chance.
Ça a beau être court, c'est un bonheur visuel, avec ces plans de Londres en 1972 qui semblent presque volés, et une musique magnifique de John Barry, alors dans sa période romantique, qui va porter le film au pinacle de l'émotion, notamment avec la chanson-titre Follow me.
Carol Reed semble être un réalisateur anglais un peu oublié aujourd'hui, mais quand on sait les grands films réalisés en collaboration avec Graham Greene (8 heures de sursis, Le 3eme homme, Première désillusion,), ou même d'autres réussites comme Trapèze, et il faut désormais ajouter ce point final à son œuvre où il revient au fond à un cinéma plus romantique de ses débuts.