Habituée à diriger Mélanie Laurent comme actrice principale (Jusqu'à toi en 2009 et Soudain, tout le monde me manque en 2011), et après une très longue absence en tant que réalisatrice, Jennifer Devoldère nous revient ici avec une comédie dramatique intéressante sur l'univers assez méconnu de l'obstétrique et des Sage-Femmes. Et c'est très bien traité, tant sous l'angle universitaire que celui de la pratique et des soins. Cette fois-ci, la réalisatrice nous propose Karin Viard comme actrice principale, qui disons-le tout de suite, "fait" le film par son personnage passionné, attachant, et dont on découvre tout au long du film la complexité, les secrets et les blessures.

L'intrigue, assez lente à se mettre en place, est centrée sur Léopold, un jeune étudiant très appliqué issu d'une famille de quartiers difficiles, une sorte d'OVNI dans son milieu, et qui, ayant raté Médecine plusieurs fois, est contraint d'accepter de rentrer en apprentissage de "Sage-Homme". Il conçoit cette formation uniquement comme une passerelle pour rejoindre le cursus de médecine au bout de deux ans. La vocation pour la médecine de ce jeune très méritant vient du fait qu'il a perdu sa mère d'un cancer du sein, après avoir eu 4 garçons. Ce contexte et les rebondissements qui vont en découler avec sa famille ne manquent pas d'originalité. Heureusement, il n'y a pas de militantisme affiché sur l'intégration ou les difficultés des jeunes de banlieue à réussir, ce qui est une bonne chose.

Jennifer Devoldère préfère ainsi concentrer son film sur ce secteur de la médecine où les Sages-Femmes jouent un rôle si important et où les "bonnes nouvelles sont plus fréquentes qu'ailleurs", selon une bonne formule assenée plusieurs fois dans le film !

Léopold est interprété par Melvin Boomer (dont c'est le premier film, vu dans la mini série Le Monde de demain où il incarne le jeune JoeyStarr), hélas pas suffisamment à la hauteur de son rôle, trop lisse et n'offrant pas assez de profondeur dans la palette des sentiments qu'il devrait nous délivrer, d'autant qu'il est déboussolé, habillé en rose, dans ce monde de femmes. C'est dommage, car dès lors c'est sur Nathalie, incarnée par Karin Viard, que le film repose, cette Sage-Femme expérimentée de 25 ans allant volontiers au-delà de sa fonction, et en conflit avec sa chef de service. Prenant Léopold sous son aile, Nathalie l'intéresse non sans mal à sa formation et le coache, tout en lui dévoilant ses failles et ses douloureux problèmes personnels, ce qui fait décoller le film dans sa deuxième partie, non sans une réelle intensité dramatique lorsqu'un grave problème survient à l'une de leurs patientes.

Assailli par le doute, alors que Nathalie doit s'éloigner de son activité, Leopold est perdu dans les choix qu'il doit faire, entre tout abandonner, continuer dans cette voie de Sage-Homme, ou profiter d'une opportunité d'aller faire sa médecine en Hongrie que lui offre finalement son père...

Mais c'est encore Nathalie qui arrive à le booster en lui demandant de "pousser son cri" comme l'enfant qui vient de naître, c'est à dire d'oser choisir SA voie, alors qu'elle lui fait une confidence dramatique sur sa vie : assurément un très beau moment du film !

Un film bien rythmé, offrant quelques scènes drôles et tendres, servi par une très belle musique; il manque hélas d'envergure avec Melvin Boomer, un "Homme trop sage" pour donner le change à Karin Viard, au jeu impeccable et multi-facettes dans ce rôle qui lui va très bien !

Histoire néanmoins intéressante pour comprendre la vie au quotidien d'un service d'obstétrique, et l'importance du métier de Sage-Femme en lien avec la médecine gynécologique.

Azur-Uno
6
Écrit par

Cet utilisateur l'a également mis dans ses coups de cœur et l'a ajouté à ses listes Films vus au cinéma depuis 2021 jusque fin 2023 et Ma cinémathèque avec Karin Viard

Créée

le 25 mars 2023

Critique lue 1.5K fois

8 j'aime

5 commentaires

Azur-Uno

Écrit par

Critique lue 1.5K fois

8
5

D'autres avis sur Sage-Homme

Sage-Homme
Azur-Uno
6

Un homme trop sage

Habituée à diriger Mélanie Laurent comme actrice principale (Jusqu'à toi en 2009 et Soudain, tout le monde me manque en 2011), et après une très longue absence en tant que réalisatrice, Jennifer...

le 25 mars 2023

8 j'aime

5

Sage-Homme
MonsieurScalp
8

Du rose pour le jeune homme

Alors déjà, une des premières raisons d'aller le voir, ce film, était que Karin Viard est dedans. Oui, on l'aime bien cette actrice. Elle n'a jamais (ou rarement déçu) dans ses rôles et c'est le cas...

le 23 mars 2023

5 j'aime

Sage-Homme
larchitect_
10

Une réalisation parfaite

J’ai eu la chance de voir Sage Homme en avant première, et j’ai été absorbé par l’équilibre maîtrisé entre enjeux du thème, stress des personnages et humour.L’image est belle, très belle. C’est bête...

le 27 févr. 2023

5 j'aime

Du même critique

Pas de vagues
Azur-Uno
7

La société aux trousses

Professeur de lettres, acteur et réalisateur, Teddy Lussi-Modeste nous offre avec ce film son troisième long-métrage, issu d'une fait réel qui lui est arrivé en 2020 : alors qu'il enseignait en...

le 31 mars 2024

21 j'aime

12

Boléro
Azur-Uno
7

Jamais 15' sans que ne soit joué le Boléro de Ravel dans le monde

Cette phrase, que l'on découvre dans le générique de fin, montre l'ambition que Anne Fontaine s'est fixée dans ce film, à savoir exposer la genèse particulièrement difficile de cette œuvre majeure,...

le 9 mars 2024

19 j'aime

15

La Tresse
Azur-Uno
10

(Dé)tresses et Espérances

Actrice, écrivaine et réalisatrice, Laetitia Colombani nous offre ici, avec grand bonheur, l'adaptation cinématographique, semble-t-il très fidèle, de son premier roman aux plus de 5 millions de...

le 8 déc. 2023

17 j'aime

9