Michael Moore est originaire de Flint, Michigan, dont la principale activité dans les années 80 était l'automobile, via la gigantesque usine de General Motors, qui assurait à ses employés une certaine prospérité. Malheureusement, la chute des vente des véhicules et la concurrences a mené à une délocalisation de cette usine, menant du coup au licenciement de ses 30 000 employés (sur les 150 000 que comptait la ville !), et plongeant Flint dans un désastre économique dont elle ne se relèvera jamais, y compris aujourd'hui.


Alors qu'il travaillait pour des journaux sur la côte Ouest, Michael Moore décide de revenir sur ses terres, et, en revendant tout ce qu'il détenait, décide de produire et réaliser son premier documentaire, qui porte déjà la marque très engagée, à savoir la défense des dits faibles contre les puissants, et toute l'histoire de ce film est une traque, sur trois ans, du directeur de General Motors, Roger Smith, afin de le faire parler sur cette délocalisation.
On sent dans ce documentaire, contrairement à ses autres films qui sont plus des pamphlets, que le sujet touche au cœur son réalisateur, car travailler pour GM était une histoire familiale, et à qui à elle seule garantissait l'économie d'une ville. Étant déjà présent à l'image avec son côté rentre-dedans, Moore se veut la vox populi des laissés pour comptes, en allant rendre visite à des anciens employés de GM, dont un qui a fini dans un asile psychiatrique, ou des personnes qui se font virer de leurs locations car ils n'ont plus les moyens de payer. Dont une habitante de Flint qui vend des lapins, pour les manger, et qu'on la voit tuer, puis dépecer l'un d'entre eux, sous nos yeux.


En contre-champ, on a aussi les tentatives de Michael Moore de parler à des personnes de GM, plus particulièrement à Roger Smith, pour se heurter à chaque fois la barrière de la sécurité et de la bureaucratie sur le type On étudie votre demande... Il rencontre aussi des célébrités qui participent à certaines des publicités, et là aussi, les réponses sont bateau au possible.
Mais ce qui est effrayant, c'est de voir de telles personnes, gagnant des montagnes de fric, dire aux gens d'en bas, les pauvres, qu'ils doivent se débrouiller tout seuls, et que ça n'est pas leur problème.


Je dirais que tout Michael Moore est déjà là, où il est quand même un peu plus réservé que dans ses films suivants, et surtout, il ose pas mal de choses, car rappelons qu'à cette époque, il est inconnu, et donc peut enfoncer davantage de portes, et moins attirer la curiosité ou la méfiance de ses interlocuteurs. Le clou est bien entendu la rencontre avorté entre Moore et Smith, ce dernier étant totalement sourd aux suppliques du réalisateur, imbu de lui-même.
Ce qui achève de rendre ce film vraiment tragique, aussi bien pour la ville (qui n'aura pas pu se relancer après d'improbables opérations touristiques) que pour ses habitants, qui auront été sacrifiés sur le compte du capitalisme.


Avec Bowling for Columbine, c'est peut-être le meilleur de Michael Moore, pas encore sous les feux de sa starisation.

Boubakar
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le 7 mai 2019

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Boubakar

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