Un Cercle de Larme

Difficile de regarder le dernier long-métrage de la trilogie originale Ring sans appréhensions avant visionnage. Difficile encore était de se lancer dans cet exercice aussi ingrat que controversé que représente l'origine story. Souvent boudé, parfois même moqué, ce type de film a tout pour faire fuir les spectateurs de la première heure, et agacer les quelques curieux ayant cédé à son visionnage.

Qu'on se le dise franchement, l'origine story parfaite n'existe tout simplement pas. Pour autant, est-ce une raison de considérer que parce qu'un film est une origine story, il serait nécessairement mauvais ? Assurément pas !

Dans le cas de Ring 0 L'Anniversaire, ce film va clairement diviser ses spectateurs. La saga Ring au cinéma (à dissocier des livres originaux de Kôji Suzuki) est déjà une œuvre très difficile d'accès, encore plus quand on voit l'adaptation plus que discutable pour ne pas dire médiocre de sa version américaine The Ring - Le Cercle, ou encore ses futurs nanars indignes d'un tokusatsu de bas étage que sont les Sadako 3D, ce Ring 0 part aujourd'hui avec un handicape de taille malgré lui.

Clairement, ce film ne plaira pas à tout le monde. Il est même fort possible que beaucoup se retrouvent déçus aussi bien par sa mise en scène aussi scolaire que foutraque, mais surtout du fait qu'il ne suscite pas nécessairement les émotions recherchées dans un film d'horreur classique, bien qu'en reprenant les codes.

Non, ce film n'est pas réellement un film d'horreur, du moins, il n'est pas QU'UN film d'horreur. Ce film est avant tout une histoire d'amour qui va progressivement évoluer en un drame, aussi cruel que larmoyant.

Sans trop dévoiler le gros de l'intrigue pour les personnes désireuses de se lancer dans son visionnage, notre histoire nous surprend en premier lieu par le choix de son cadre, à savoir le théâtre. Si ce choix peut étonner au premier abord, cette idée s'avère être un premier coup de génie de ce film. Le théâtre étant un reflet de notre société, avec ses comédiens aux rôles inégaux, ses techniciens dont le travail ingrat les relègue au second plan pour s'assurer que la grande machine du spectacle puisse tourner sans désagrément et au centre de ces derniers, son metteur en scène, son maître à pensée exerçant sa domination sur cette assemblée et qui, à l’abri des regards, se permet d'abuser de son contrôle au détriment des plus démunis.

Notre petite Sadako n'est pas encore l'Onryô vengeresse que l'on connait des deux précédents films. Elle nous apparait ici sous les traits doux et chaleureux d'une jeune femme désireuse de trouver sa place dans cette société en dépit de son lourd passé, de trouver un "rôle" en son sein. Un évènement aussi étrange que soudain va propulser contre toute attente la petite Sadako sur le devant de la scène pour devenir le premier rôle de la dernière pièce de sa troupe. Incompréhensible pour l'équipe méprisant Sadako, la voyant comme une simple stagiaire aussi bizarre que parvenue, ses acteurs comme la plupart de ses techniciens ne manqueront pas de lui cracher leur mépris à la figure. Le théâtre sera alors le lieux privilégié d'évènements glaçants et inexplicables dont la majeure partie de ses membres ont la terrible certitude que son unique responsable n'est nulle autre que la jeune Sadako.

Si ce début d'intrigue comme sa suite s'avérera pour le moins classique, c'est bel et bien dans sa mise en scène et dans ses différentes grilles de lecture que Ring 0 peut aisément passer de simple origine story nanardesque à un véritable drame bouleversant et lourd de sens.

Pour mieux appuyer le tout, le jeu des acteurs s'avère aussi efficace que millimitré, en particulier le jeu de la jeune Yukie Nakama qui nous livre ici un rôle de Sadako aussi touchant qu'attachant. "Attachant", c'est ce qui qualifierait le mieux ses acteurs. Par l'appuie de leur jeu honorable et calculé, ainsi qu'une mise en scène réfléchie, Ring 0 L'Anniversaire nous offre une histoire jouant sur de multiples palettes d'émotion, allant de la joie au doute et de la crainte à la peine. En découle alors une fresque certes très étrange, voire parfois à la limite du grotesque, mais qui assume avec panache tous ses choix pour mieux nous conduire vers son final que l'on aurait souhaiter de toute nos forces ne jamais arriver tant ce film parvient à nous faire nous attacher à ses personnages et à leur souhaiter une échappatoire que l'on sait pourtant impossible...

Je ressors sincèrement bouleversée de ce visionnage de Ring 0 L'Anniversaire alors que j'avais déjà visionné tous les autres films de sa saga à l'exception de ce dernier il y a des années maintenant. Si vous parvenez à vous montrer attentifs aux choix de ce film, ses petits détails sauront vous apporter leur lot d'émotion, pour le meilleur comme pour le pire, mais surtout le meilleur !

Je ne vous garantis pas que vous apprécierez ce film. Comme exposé plus haut, la limite entre le génie et le grotesque est très mince dans ce Ring 0 L'Anniversaire. Mais si comme moi, vous êtes attaché à Sadako et la saga Ring, ce film peut cacher une pépite aussi grisante que tire-larme pour les personnes qui sauront s'y montrer un minimum attentives.

Pour ma part, ce fut une expérience qui m'aura autant marquée qu'elle m'aura fait pleurer à chaude larme. Je ne regrette en aucun cas mon visionnage.

Ce film mérite qu'on lui donne sa chance, tout comme Sadako méritait qu'on la lui accorde.