Un bon premier film n'excuse pas tout.

Scénario :
Alors, c'est un loser maigrichon avec des lunettes qui... heu... Bref, c'est Woody Allen, mais en braqueur de banque.

Ce film fait partie de mon "rattrapage culturel" version "un réalisateur = un film"

En tant que sujet d'étude :

Take the Money and Run est le film j'ai pris afin d'étudier le cinéma de Woody Allen un réalisateur dont j'ai vu au moins une dizaine de films, de chacune de ses périodes. J'ai pris ce film parce que c'était le préféré d'un copain.

Je me suis rendu compte aussi que c'était son premier film (son tout premier ne compte pas trop) ce qui me permet de ressortir une de mes théories : Les oeuvres de jeunesses sont souvent les plus foisonnantes. Ça se voit beaucoup dans la bd où pas mal d'auteurs ayant débuté par du strip, du gag et des oeuvres courtes, finissent par faire des bds très calmes qui s'étalent sur le temps (Larcenet par exemple, mais Trondheim, Blutch rentre dans ces cases.) Comme si la maitrise du temps et du sujet complexe demandait de la maturité.

Et c'est d'ailleurs le cas avec ce Prends l'Oseille et tire toi. Là où Woody Allen n'offre maintenant plus que des comédies de moeurs et de personnages, il y a dans ce film et ceux de sa période "pre-Manhattan" (je pense à Banana , Tout ce que vous avez voulu savoir sur le sexe ou Woody et les Robots) tout un tas d'idée hyper burlesque, de gags qui s'entrevéchent, de gags d'arrière plans ou visuels. Même trop des fois et malgré la bonne idée de raconter le tout sous forme d'un faux documentaire (le tout premier film d'Allen étant un doublage parodique) on échappe pas à une forme de redondance : Virgil tente un braquage, il se rate, il s'enfuit, il prend le large avec sa femme, il manque d'argent, il retente un braquage.

Le montage est quand même assez brouillon par moment. Pour la petite histoire, le montage original déplaisait tellement à la production, qu'on a adjoint Ralph Rosenblum, un monteur à Woody Allen. Rosenblum a créé de nouveaux gags avec le montage, au point de devenir monteur sur les films suivants d'Allen. (Le film est d'ailleurs rempli de bons gags de montages.) De plus, il y a eu une grosse part d'improvisation et le film a connu au moins 12 fins différentes, Allen ne sachant pas comment le finir. (Ce qui se voit grave dans la structure.)

Après, il est clair que Woody Allen avait déjà son personnage de loser qu'il déclinera de film en film toute sa vie : Peu sûr de lui, raté, frèle (le running gag des gens qui brisent ses lunettes) mais bavard, inventif et attachant. Virgil a beau être présenté comme un idiot qui ne sait pas qui est mozart, on sent quand même l'intellectuel chez lui, notamment dans la façon dont il parle de sa vie ou dans certains gags (comme l'entretient d'embauche.) A tel point que dans le scénario original, le personnage de Virgil s'appellait Woody.

On voit aussi des récurrences, avec les parents juifs dont le père est colérique et la mère trop gentille et le fait que le personnage principal... sort avec une belle fille, bien plus jeune que lui. Woody Allen fait parti de ces réalisateurs dont les blagues sur le cul deviennent totalement génante maintenant qu'on sait que c'est un violeur avec des tendances pédophile. Et ce film n'y échappe pas.

D'ailleurs, la pauvre Janet Margolin s'en sort très bien en jeune fille ingénue, sorte d'idéal de l'étudiante naïve, mais dès qu'elle sort de son rôle et passe en mode comique, on sent que c'était pas son truc, mais que Allen l'a prise parce qu'elle était juste très belle.

Mon avis personnel :

M'apercevant que j'avais vu quand même un bon nombre des films de Woody Allen, je me suis dit "tiens, je vais aussi faire le sondage Sens Critique sur ses films." Et je m'aperçois... qu'en fait, il y en a assez peu que j'aime. La plupart des films que j'ai vu se classe dans la catégorie : "ok, c'est bien sympathique, mais c'est pas son meilleur." Mis à part Annie Hall, Harry dans tous ses états et quelques sketchs du film tout ce que vous avez voulu savoir sur le sexe.

D'ailleurs moi qui trouve la période "burlesque" de Woody Allen vachement brouillonne et remplie de gags pas drôle (la palme revenant à Woody et les Robots qui n'arrive pas à se moquer de la sf) bah, j'ai vraiment bien aimé ce premier film. Certes, ça part sans arrêt dans tous les sens, mais certains gags font vraiment mouches et c'est totalement assumé. Moi qui adore l'absurde et les gags d'arrière plan, j'ai été servi. En plus, il y a une parodie de Fritz Lang dans ce film et moi ça me fait marrer.

En plus, avec le temps, il a bien vieilli et il s'inscrit au milieu d'autres films absurdes (je pense notamment à ceux des Monty Python) de cette période.