• J'ai établi une correspondance entre ces séries de nombres et les dates des plus grandes catastrophes de ces 50 derniers des années dans un enchaînement parfait: tremblements de terre, incendies, tsunamis. D'après le prochain nombre dans la chaîne, demain, quelque part sur la planète, 81 personnes vont mourir dans des circonstances tragiques. 

  • Des systèmes qui trouvent un sens caché dans les nombres, il y en a à la pelle, tu sais pourquoi? Parce que les gens voient ce qu'ils veulent voir.

  • Les nombres sont un avertissement.



Prédictions de Alex Proyas est une science-fiction apocalyptique servie sur un thriller catastrophe glaçant, grisant, effrayant et mystérieux autour d'un concept rondement maîtrisé en matière de sciences, de mathématiques, de foi, et de deuil dans une vraisemblance étonnamment stable malgré le gros mélange. Une véritable proposition scénaristique s'essayant à quelque chose de différent à travers un récit imprévisible, ambitieux et divertissant sur un suspense haletant.


Les trois premiers quarts du film sont captivants avec une intrigue menée de main de maître dans laquelle une classe d'école déterre une capsule temporelle placée sur le terrain de l'établissement 50 ans plus tôt en 1959, pour être ouverte par les enfants de 2009 et voir ce que les enfants du passé ont légué à ceux du futur. Alors que l'ensemble des enfants héritent de dessins, le jeune Caleb Koestler ( Chandler Canterbury ), hérite d'une page avec une série de chiffres sans signification particulière pour celui-ci, jusqu'à ce que son père John Koestler ( Nicolas Cage ), un physicien de talent y déchiffre une série de catastrophes prophétisée avec des détails accablant sur le nombre de morts, la date, et le lieu où c'est censé arriver. Un spectre inquiétant et saisissant autour d'une numérologie qui donne matière à réflexion et qui va projeter le récit dans une frénésie débordante magnifiée par une ambiance menaçante avec de nombreuses séquences oppressantes qui tout du long prennent à contre-pied.


Le dernier quart représentant les 20 dernières minutes du film bascule le récit vers quelque chose de plus métaphorique en confrontant et en conjuguant la raisonnabilité scientifique avec le dogme de la foi par l'interrogation d'un personnage ébranlé dans sa croyance depuis la mort de sa femme. L’effondrement tragique des repères d'un homme qui essaye avec son fils de s’adapter au vide laissé par sa défunte bien-aimée à travers un deuil de résignation de foi exprimé dans le chagrin, la colère, le dépit, et l'incompréhension. Préférant s'écarter de l'ordre du divin pour préserver sa conscience de la violence d’une trop grande douleur. En cela, Nicolas Cage exprime magnifiquement cette dualité lors d'un cours de sciences où celui-ci explique à ses élèves l'art de la spéculation autour d'un sujet important sur la question de savoir si l'univers se déroule selon une contingence d'événements accidentelles ayant d'elle-même créée tout un axe de vie dans un concours de circonstances ou de manière étudiée selon un plan préconçu par une force supérieure. La probabilité d'une réflexion supérieure ou une prédestination aléatoire ? Plus intimement, sommes-nous libres de mouvements de pensées, ou sommes-nous condamnés à suivre un plan préconçu dont il est impossible de se détourner ? Des interrogations pleines de sens offrant toute la puissance dramatique de Prédictions.



Que se passe-t-il lorsque les chiffres sont épuisés ?



Malheureusement, le récit va opter pour le choix facile en répondant clairement à la question à travers cette liste numérotée qui n'est finalement qu'une prophétie cryptée sur la fin du monde et de la préservation de la vie à travers un nouveau jardin d'Éden guidée par une arche de Noé mettant en place les nouveaux Adam et Ève. Un choix qui va mettre à ce moment-là fin au message mixte dressé jusqu'alors par le récit entre la pensée rationnelle et la recherche spirituelle qui avant cela pouvait être interprétée de différentes manières. Néanmoins, le scénario laissera quelques significations en suspens avec des anges qui pourraient être des extraterrestres au service du Dieu véritable : '' le Soleil '', créateur de toutes choses ayant droit de vie et de mort sur tous comme pour ce cas avec l'éruption solaire. Une approche qui pourrait être pertinente par l'interprétation biaisée et fantasmée des hommes qui auraient pu façonner le concept du Dieu catholique par le biais des mystérieux inconnus chuchoteurs à travers l'histoire, et on sait à quel point l'être humain est doué pour construire des légendes à partir de peu de choses. La problématique avec cette idée aussi plaisante puisse-t-elle être, c'est que je soupçonne là une méthode pour y déverser les dogmes de la scientologie qui promeut une méthode pseudoscientifique par un ensemble de croyances et de pratiques relatives à la nature de l'être humain et de sa place dans l'Univers avec des histoires d’interventions extraterrestres dans des vies passées qui forment une partie des croyances de l'église de la scientologie. Heureusement, ce mélange d’inexactitudes et de distorsions apporte une ironie autour du partie pris de l'intrigue à savoir si finalement tout ceci ne serait pas depuis le départ le caprice arbitraire de la nature elle-même contre laquelle on ne peut rien faire malgré l'aide d'une intelligence supérieure.


Dogmes religieux christique ou scientologue ? Messages écologiques sur des images de fin du monde ? Véritable questionnement sur la foi et la science ? Chacun se fera son idée autour d'un script bien développé avec un point culminant à tendance biblique mais qui a le mérite de conserver une part intrigante.


Les effets spéciaux utilisés pour Prédictions sont d'un réalisme étonnant avec des séquences d'accidents aussi bluffantes qu'impressionnantes impliquant un crash d'avion, un métro qui déraille à toute vitesse pour se fracasser dans une rame, un cauchemar crépusculaire avec une forêt en feu, ou encore la destruction du monde par des aurores solaires offrant un des meilleurs effets de catastrophe qui m'a été donné de voir avec une destruction finale qui vous tétanise à votre fauteuil. La composition musicale fonctionne très bien avec Marco Beltrami aux commandes qui retrouve Alex Proyas après une première collaboration sur I, ROBOT. On retrouve à deux reprises un morceau de musique classique tirée de la 7eme Symphonie de Beethoven, un vrai régal.
Nicolas Cage sous les traits de John Koestler fait un excellent travail en assurant un spectacle frissonnant dans sa quête de compréhension des chiffres de la liste, et de par son positionnement scientifique ébranlé par le deuil qui via l'histoire va suivre un voyage spirituel de réconciliation par la voie de la destruction. Rose Byrne en tant que Diana Wayland, offre un rôle dramatique intéressant avec une conclusion inattendue et injuste pour elle. Les enfants de la prophétie représentés par Chandler Canterbury pour Caleb Koestler et Lara Robinson pour la petite Abby Wayland qui incarne également '' Lucinda '' la prophétesse, offrent un jeu intéressant sans pour autant offrir de grandes interprétations. Nadia Townsend pour Grace Koestler la petite sœur de John est attachante, Ben Mendelsohn pour Phil Beckman est intéressant de par son regard terre-à-terre.



CONCLUSION :



Prédictions de Alex Proyas est un thriller de science-fiction catastrophe à suspense sur une ambiance noire aux effets spéciaux impressionnants avec des scènes d'accidents spectaculaires appuyées par un Nicolas Cage excellent, pour une bande-son efficace autour d'un scénario étonnant à la conclusion inattendue, qui pose tout du long des tas de questions avec un semblant de réponses que le récit aurait pu volontairement omettre afin de maintenir l'intelligence de son propos autour de la place de Dieu pour un homme de science endeuillé ayant perdu la foi. Heureusement, la révélation finale permettra une conclusion à la hauteur.


Une petite merveille de science-fiction apocalyptique plus ou moins biblique !




  • Ce n'est pas la fin.

  • Je sais.


B_Jérémy
8
Écrit par

Cet utilisateur l'a également mis dans ses coups de cœur et l'a ajouté à sa liste Les meilleurs films de Nicolas Cage (dont j'ai fait une critique)

Créée

le 27 janv. 2022

Critique lue 1.2K fois

43 j'aime

43 commentaires

Critique lue 1.2K fois

43
43

D'autres avis sur Prédictions

Prédictions
Miloon
5

Chérie ? E.T. a envoyé un fax y'a 50 ans, on l'a reçu ?

John (Nicolas Cage) a perdu sa femme y'a un an. Depuis, il a pris l'habitude de s'en jeter de sévères derrière la cravate après s'être assuré que son fils Caleb fait bien dodo. Bouleversé par...

le 18 oct. 2010

55 j'aime

9

Prédictions
B_Jérémy
8

Garder la foi malgré le deuil ?

J'ai établi une correspondance entre ces séries de nombres et les dates des plus grandes catastrophes de ces 50 derniers des années dans un enchaînement parfait: tremblements de terre,...

le 27 janv. 2022

43 j'aime

43

Prédictions
SanFelice
7

Mettre en scène l'Apocalypse biblique

C’est bel et bien le texte qui clôt la Bible qui a popularisé l’idée d’une Apocalypse qui serait la fin spectaculaire du monde et le début d’une nouvelle vie pour une poignée d’élus. Dans son film...

le 23 sept. 2020

27 j'aime

5

Du même critique

Joker
B_Jérémy
10

INCROYABLE !!!

La vie est une comédie dont il vaut mieux rire. Sage, le sourire est sensible ; Fou, le rire est insensible, la seule différence entre un fou rire et un rire fou, c’est la camisole ! Avec le Joker...

le 5 oct. 2019

170 j'aime

140

Mourir peut attendre
B_Jérémy
8

...Il était une fin !

Quel crime ai-je commis avant de naître pour n'avoir inspiré d'amour à personne. Dès ma naissance étais-je donc un vieux débris destiné à échouer sur une grève aride. Je retrouve en mon âme les...

le 7 oct. 2021

132 j'aime

121