Critique originellement publiée le 30/01/2015 sur Filmosphere.


Rares sont les films que l’on peut acheter sur la base d’une seule image, et pourtant Pioneer en fait partie. Car il faut tout de même voir cet impressionnant photographe d’une équipe sous-marine en train de planter le drapeau norvégien dans les abîmes de l’océan… Convoquer la magie de l’imagerie de la conquête spatiale marche toujours fort bien sous l’eau. On se souvient encore du grandiose The Abyss de James Cameron. Malheureusement, le film du réalisateur de la version originale d’Insomnia, passé certaines surprises, déçoit.


L’introduction pose un univers visuellement fort et à l’atmosphère étouffante. La littérale plongée dans le travail de ces ingénieurs sous-marins norvégiens fonctionne et on reconnaît là éventuellement la patte qui créait l’efficacité de l’ambiance d’Insomnia. En alternant, pas toujours de manière équilibrée, phases de thriller à la surface et séquences en eaux profondes, Pioneer s’embourbe toutefois dans un faux-rythme. Au thriller paranoïaque se mêle un soupçon de politique, mettant en scène la rivalité entre les américains et les norvégiens, participant tous les deux à la conquête des profondeurs, le pétrole faisant office de mobile évidemment. L’intrigue peine toutefois à avancer, la faute également à un protagoniste principal peu entraînant et pas forcément bien caractérisé. L’atmosphère tendue s’effrite et laisse place, après le premier acte, à l’ennui d’un spectateur dubitatif qui pourtant était bien disposé à apprécier l’ambition mise en place au départ.


Ainsi de suite, de plus en plus distancié par l’action du film, on s’arrête sur les détails qui nous gênent : si on laissera à l’interprétation, bien que discutable, le bénéfice du doute, il sera difficile de passer outre cette constante caméra à l’épaule qui convoite trop souvent un style documentaire n’ayant pas forcément lieu d’être. Cette quête forcée d’un éventuel réalisme dénote hélas avec le potentiel surréaliste très intéressant de certaines séquences. C’est sans compter la partition du groupe français Air, aux airs (c’est le cas de le dire) tantôt fantastiques et intéressants, tantôt trop lourds et présents dans le montage musical.


Finalement, c’est surtout un goût d’inachevé que laisse Pioneer, le film délaissant trop rapidement le charme de son concept sous-marin, pourtant savamment maitrisé et aux images intrigantes. Bien rapidement, on se rend compte que le fameux photogramme qui nous a fait acheter le film n’est pas forcément son élément le plus représentatif. Et pourtant, force est de croire que l’essence la plus intéressante se trouvait bien là, et non dans un thriller politique quelque peu tiré par les cheveux, sous couvert « d’histoire vraie ». Reste tout de même à saluer l’ambition de cette co-production nordique qui, malgré ses défauts, prend la peine de s’intéresser à un univers singulier, au potentiel visuel fort.

Créée

le 25 mai 2016

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Lt Schaffer

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