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Pieces of a Woman, c'est l'histoire d'une agonie intime, d'un deuil organique et brutal. La plateforme frappe fort et vise juste en ce début d'année avec ce drame racontant la reconstruction d'une jeune femme qui vient de perdre son bébé, à la naissance, lors d'un accouchement à domicile. Première réalisation anglophone du cinéaste hongrois Kornél Mundruczó, le film est en fait inspirée d'une pièce de théâtre osée qui a rencontré un grand succès dans les pays de l'Est. Et on comprend pourquoi quand on se plonge dans ce plan séquence éprouvant de plus de vingt minutes qui ouvre le film. D'une virtuosité écrasante, cet événement clé que traverse cette femme devient le détonateur d'un nouveau cycle : éprouver la mort pour renaitre à soi-même. Vanessa Kirby, que j'ai découvert en princesse gâtée dans The Crown, incarne cette figure féminine vidée de toute substance, de toute envie de comprendre et de se battre. Ce personnage martyr, qui lui a déjà valu le prix d'interprétation à la Mostra de Venise, dépasse l'état émotionnel des mélodrames habituels pour cerner l'indicible, l'innommable. Ça serait très surprenant de ne pas la voir figurer parmi les favorites aux prochains Oscars. Face à elle, son petit ami, Shia LaBeouf, tente tant bien que mal de la raccrocher aux habitudes de son couple d'antan tandis que sa mère, la vaillante Ellen Burstyn, rongée par les apparences et les qu'en-dira-t-on, lui soumet sa façon de traverser la tragédie. Les connaisseurs auront du mal à ne pas penser au génie d'"Une femme sous influence" de Cassavetes où une mère de famille sombre dans la folie, écrasée sous le poids des conventions de la société. Ici, Pieces of a Woman tente de recoller les morceaux en jouant avec la notion du temps qui passe et la symbolique de l'évolution. Comme tout bon film d'auteur qui se respecte, après avoir été happé, le film se dilue dans la contemplation, comme si la reconstruction devait passer par l'imperceptible et le subjectif. Mais la mise en scène préserve quelque chose d'étouffant, à l'image de l'accouchement traumatique qui poursuit sa résonance jusqu'à la toute fin. Les contractions sont symbolisées par des scènes puissantes et imprévues, où les personnage s'affrontent dans des échanges épineux et déchirants. Pas si lisse que ça, le film s'affranchit des codes mélodramatiques pour mieux nous interpeller.

alsacienparisien
8

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le 15 janv. 2021

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