Le dernier film de Gillo Pontecorvo, sans surprise tout aussi politique que tous les autres déjà vus, n'atteint pas l'intensité de "La Bataille d'Alger" ou "Queimada". La faute en grande partie à une dimension un peu téléfilm, renforcée sans doute en partie par le fait que j'ai regardé la version espagnole (et donc doublé) de cette coproduction italienne — avec entre autres Gian Maria Volontè et Nicole Garcia. Pourtant j'adore le contexte dans lequel se noue ce récit historique, l'Espagne franquiste du début des années 70 dans laquelle on voit des remous dans le régime autoritaire vieillissant, et "Opération Ogre" raconte le développement d'une cellule terroriste basque à l'origine de l'assassinat de Luis Carrero Blanco, le président du gouvernement — son assassinat avait fait beaucoup parler de lui, au-delà de la personne, car sa voiture avait décollé dans les airs à plusieurs dizaines de mètres suite à l'explosion d'une charge explosive placée sous la chaussée.


Les réflexions sur les agissements du mouvement indépendantiste sont intéressantes et brassent des thématiques habituelles chez Pontecorvo, la lutte contre la dictature, le questionnement des modes d'action, l'usure des voies classiques comme le syndicalisme et la grève, avec ici des échanges d'ordre moral sur la légitimité de la violence et de la mort. Même si le film traîne un peu la patte, avec quelques longueurs un peu dommageables, il y a tout de même beaucoup de matière à extraire des dialogues, notamment autour de la prise de conscience générale et des conditions conduisant à un soulèvement général (et sous quelles impulsions). Ces sujets ne sont qu'esquissés dans le film, et j'aurais bien aimé voir cela davantage développé. Je suis persuadé qu'avec plus de moyens, la pression qui s'exerce sur les membres du groupe et la tension générale auraient été tout autres. En l'état, ce film me paraît un peu trop froid, figé, même s'il sème sur son passage des éléments qui retiennent l'attention — c'est notamment le cas du fait que le groupe soit si peu surveillé par la police d'état, leur faisant penser qu'on pouvait les laisser faire, sans développer cette thèse. La question reste en suspens de savoir si cette action terroriste a précipité la fin du franquisme ou si le régime aurait périclité de lui-même.


Le message est énoncé sans élégance, mais reste pertinent. Beaucoup de personnages secondaires ne sont que des faire-valoir et le rythme est poussif.

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le 24 juil. 2023

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Morrinson

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