Les gentils pénibles

Depuis le rachat de la 20th Century Studios par Disney, ces derniers leur ont demandé d’accélérer la cadence pour les films afin de remplir le catalogue de Hulu (Disney+ dans le reste du monde) et d’apporter du contenu exclusif régulier. Ils travaillent donc sur un certain nombre de bobines, notamment le thriller à suspense No Exit avec Dennis Haysbert, le drame The Princess avec Joey King, la comédie romantique Rosaline avec Kaitlyn Dever ou encore la comédie pure avec Vacation Friends qui vient de sortir un peu partout dans le monde. Un film sorti sans aucune promotion, bien qu’il soit en chantier depuis 2005, sans grosse tête d’affiche, mais qui pourtant a cartonné, devenant le film « original » le plus regardé à ce jour lors de son week-end d’ouverture sur la plateforme Hulu. Mais soyons honnêtes, bien qu’il fasse passer un bon moment, Vacation Friends est loin d’être une réussite.

Lil Rey Howery et Yvonne Orji interprètent Marcus et Emily, un couple qui se rend dans une luxueuse station balnéaire mexicaine où Marcus a élaboré un plan pour faire sa demande en mariage. Marcus est quelqu’un de coincé, qui veut toujours tout contrôler afin que tout soit toujours parfait. Emily est droite, discrète, mais a toujours besoin de l’approbation de son père sévère. Aussi, lorsqu’ils croisent le chemin de Ron et Kyla, incarnés par John Cena et Meredith Hagner, ils sont d’abord consternés par l’esprit libre du couple qui ne pense qu’à s’amuser et faire la fête. Ron est costaud mais a un grand cœur, Kyla est guillerette et exubérante. Ils n’ont absolument aucun filtre, aucune retenue ni aucun scrupule à dépenser tout leur argent pour s’amuser le plus possible. Ron et Kyla sont si obstinés qu’ils ont vite fait d’épuiser Marcus et Emily et de les entrainer dans leur débauche. Bientôt, ils sirotent tous ensemble des margaritas, des tequilas, échouent un catamaran, font des courses de jet ski, se battent dans un bar et bien d’autres choses encore dans une semaine de folie finissant par une nuit particulièrement arrosée et mouvementée. Mais ce qui se passe au Mexique ne reste pas au Mexique, comme Marcus et Emily l’apprennent plus tard lorsque Ron et Kyla, alors qu’ils n’ont pas été invités, traversent le pays en voiture pour venir assister à leur mariage (et potentiellement le gâcher). Les personnages de Vacation Friends sont le point fort du film. Ils respirent la fraicheur, et plus particulièrement le duo Cena / Hagner qui sont en totale alchimie dans des rôles bien loufoques et agréables, incarnant la spontanéité poussée à l’extrême, virant parfois à la psychopathie. Mais, premier problème du film, notre double duo manque un peu de profondeur. Ils sont ce qu’ils sont tout ce temps, et dès la parenthèse vacances terminée, ils reprennent chacun leur tempérament.

Vacation Friends se divise clairement en deux parties et, nouveau problème, ces deux parties sont très inégales, pouvant presque être séparées en deux films distincts. La première, reprenant la semaine de vacances au Mexique, est la plus réussie. On rigole bien car le casting est charmant et le côté exubérant de Cena / Hagner et les réactions exaspérées de Howery / Orji qui en découlent fonctionnent bien. Cette première partie un peu folle monte crescendo en péripéties loufoques et bizarres et atteint son point culminant à la trentième minute. C’est là que la seconde partie commence et surtout que le soufflé retombe quasi immédiatement car ce qui s’engage est bien plus conventionnel avec même du sentimentalisme à la fin avec des notions un peu faciles sur le pouvoir de l’amitié. Il y a toujours des scènes un peu délirantes, comme la chasse au renard qui finit en trip hallucinogène mais la sauce prend beaucoup moins. Toute la folie du film a été concentrée dans la première partie plutôt que d’être distillée tout le long des 1h43 et du coup, Vacation Friends n’est pas un film homogène, trop déséquilibré. Les ingrédients sont là : le casting sympathique et comique, le choc culturel amusant, les décors idylliques, mais on a l’impression qu’ils ont tous été mis dans une boite, secoués, et négligemment jetés ensemble et mis en image tels qu’ils sortaient plutôt que d’essayer d’être combinés avec un minimum de réflexion. Étonnant que, avec pas moins de cinq scénaristes, aucun ne se soit dit que le scénario aurait dû être élaboré différemment, avec une montée en puissance du chaos sur toute la durée, pour un final explosif.

Bien qu’il permette de se vider le cerveau devant des gags parfois bien funs, Vacation Friends se prend les pieds dans le tapis après sa première demi-heure, réussie. Le résultat est un film un peu bâtard, pas désagréable malgré tout.

Critique originale avec images et anecdotes : DarkSideReviews.com