My Rembrandt
My Rembrandt

Documentaire de Oeke Hoogendijk (2019)

De la vraie dentelle: rencontres avec des passionnés et/ou connaisseurs et/ou collectionneurs.

J'aime bien et admire les films et documentaires qui arrivent à capturer 'sur la pellicule' des échantillons d'émotions et les conservent comme dans une boule à neige...

... un peu comme dans Vice Versa où les doubles de Riley dans sa tête créent une sorte d'agenda de ses émotions en sorte de liste Senscritique en les capturant dans des globes.

Je trouve ici qu'on ressent sans cesse la passion de certains interviewés comme une onde ou quasi parfum dans la pièce. Avec les années, leurs noms et même le sujet, s'estomperont peut-être, mais restera sans doute l'impression que les auteurs ont capté dans un globe la substantifique moelle au coeur de la passion et l'excitation (où je reconnais un peu de ma perversion cinéphilique).

Oeke Hoogendijk a capturé des regards énamourés qui rajeunissent certains des intervenants au point où on devine sous leur beau costume et marionnette de chair, l'enfant à la Stand By Me qui devait feuilleter des BDs quand enfants...puis des livres d'art.

Je n'avoue qu'une chose: sur le fond, je n'ai pas tout compris. Surtout l'embrouille et le retournement si touchant d'amitié à la fin. Je ne suis pas encore allé lire au sujet des intervenants. Et je ne l'ai pas encore revu donc sur sa forme, je n'ai pas non plus encore tout compris, notamment comment le montage m'a tant tenu en haleine.

Compris ou pas compris, le tout est passé très vite.

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Je ne sais pas comment le dire mais j'ai parfois eu l'impression d'être Nanouk...

ou l'invité de l'émission télé, Rendez-vous en terre inconnue, associé à une conférence TED.

En moment dément, on pénètre la vraie garçonnière d'un milliardaire à Paris où j'avais envie qu'on me parle de tous les objets dans les plans: j'ai cru reconnaître une sculpture de Camille Claudel, un tableau de Lucian Freund (je n'aime pas cette chair de cadavre du tout).

En parlant de chair, il y a un moment ma-gi-que où une restauratrice hélas non nommée et masquée comme Bane dans Batman, nettoie le contour d'un oeil gris et morne, qui devient soudain chair humaine rose...un oeil dans l'écran...ça donne des frissons.

Il y a un autre moment où un passionné éclaire à la toute simple torche un tableau avec lequel a pourtant longtemps vécu son propriétaire, et c'est comme découvrir une nouvelle dimension dans le tableau.

Les gros plans sur la fraise (vêtement autour du cou) donne presque envie qu'elles reviennent à la mode et remplacent nos cravates, bouts de tissu tout aussi ridicules mais moins beaux.

A un moment, ils déposent des portraits au sol et l'intervenant explique parfaitement comment ses sujets sont soudain devenus vivants devant lui à sa hauteur.

J'ai eu l'impression qu'il me parlait de téléportation Star-Trek, surtout que très très habilement, les auteurs insèrent des gros plans sur les dentelles sur pieds et chaussures...les doigts...sa description s'est faite chair.

Cet intervenant explique que le tableau enfin descendu à sa hauteur le fait expérimenter autrement; ce qui semble un lieux commun évident mais qui est aussi le témoignage de celui qui vit avec le tableau d'une vieille liseuse: il explique qu'il s'attend "à ce qu'elle lève les yeux". Et nous aussi.

Celui qui vivait et dormait avec deux tableaux (d'un couple, le mari sur l'un, la femme sur l'autre)

s'est convaincu à la longue et à leur contact que le peintre aimait "la femme sans doute cultivée et drôle" mais qu'il trouvait le mari "ennuyeux".

Je ne dis pas que ce sont des cas psychiatriques, mais s'ils étaient dans la rue ou salle d'attente d'urgences, ils ne dépareraient pas des autres patients et il vaut mieux pas qu'ils croisent l'infirmière Mildred Ratched.

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Vous trouverez, et je chercherai puis ajouterai, les vrais noms des interviewés (Rotschild, Kaplan etc.) : mais ce sont ici des archétypes; il y a des passionnés, des cupides, des connaisseurs et ces cercles ne se recoupent pas toujours.

Celui qui vit avec la liseuse d'un livre (dont semble venir la lumière qui lui éclaire le visage),

me rappelle mais en vrai Lord MacRashley dans mes Fantômas...on entend d'ailleurs au passage qu'il s'est fait voler "un Leonardo de Vinci". Il vit en Ecosse dans une maison comme celle de James Bond dans Skyfall mais en vrai.

Celui qui a dormi avec le couple dont il ne possède qu'un tableau et "son frère possède l'autre", et ils doivent les vendre à cause de "cette chose horrible que sont les impôts qui existent aussi aux Pays Bas", semble rajeunir quand il en parle: ses yeux s'éclairent et il a quasi le beau regard de gentillesse de Quentin de Montargis dans le Francis Veber passionné par l'idée "d'avoir un bar à lui". Leur regard émouvant est similaire.

Un autre passionné par l'idée d'avoir est plutôt le méchant du documentaire: le multi-millionaire qui admet vouloir posséder des tableaux de Rembrandt par pure envie matérielle (pure "materialistic joy")...et qui avoue même sans ambages avoir embrassé "une fois seul avec elle" "sur la bouche" la MILF qu'il a achetée...

ça contraste avec les gants que doivent porter tous les autres sbires et notamment les précautions que prennent tous les courbés autour d'eux (notamment ceux qu'on voit lors de la scène en Ecosse, où ils restent derrière le propriétaire lors de l'explication , une fois le tableau posé sur la table...ces hommes de main au second plan, sont à regarder aussi).

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Le plus émouvant pour moi est l'expert qui conteste qu'un tableau acheté aux enchères est de Rembrandt ,

dans un premier temps.

Cet expert a des airs d'un comique Anglais très gentil qui se donnait sur scène pendant des heures et un apôtre de la gentillesse et du bonheur: Ken Dodd.

Dans toutes ces rencontres au sein d'une tribu qui m'est très inconnue, c'est celui auquel je me suis le plus attaché et que j'ai le mieux reconnu: le vrai passionné désintéressé qui n'a aucune cheval ou chien dans la bataille ou course aux Rembrandt.

La scène la plus drôle est un vrai gag visuel qu'on retrouve dans Les Visiteurs, mais ici en vrai: c'est quand un des propriétaire du tableau se tient à côté et que c'est son portrait tout craché alors qu'on est des générations et des générations plus tard...comme quand Godefroy de Montmirail, Jean Reno , regarde tous les tableaux au mur et on le reconnait dans chacun!

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J'ai découvert ce doc au hasard sur UniversCiné.

Aucun de ses tableaux de Rembrandt n'apparaissent dans l'heure que lui consacre l'émission Une heure avec qui diffuse des expositions d'une durée d'une ...heure, d'un artiste en particulier.

J'ai commencé à aller voir sur internet qui sont ces vrais personnages.

Par exemple, celui que je compare à Lord McCrashley dans Fantômas est Richard Scott (10e duc de Buccleuch): il vit dans demeure Ecossaise de James Bond...il décide de changer de place son tableau...je croyais qu'il allait le descendre et le mettre à sa hauteur....donc suis déçu qu'il l'a juste changé de salle...il est toujours aussi haut...et pire, il l'a placé au dessus d'une cheminée?!

La vieille liseuse qu'il quasi croit vivante semble éclairée de l'intérieur de son livre.

Je découvre que ce duc est un évadeur fiscal.

PierreAmo
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le 27 juin 2023

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