Un univers fantastique dans lequel se cache des êtres aux pouvoirs particuliers, un enfant introverti qui ignore en faire partie et qui jouera le rôle de sauveur, en soi l’histoire de « Mis Pellegrine et les enfants particuliers » fait partie de la tradition classique des enfants héros. Pourtant sous la pâte de Burton, le film parvient à éviter les clichés et les grosses ficelles caractéristiques de ce genre de production pour ado.


Depuis l’événement Harry Potter, les films de ce genre se sont multipliés, rarement pour le meilleur. Il faut dire que la formule a de quoi séduire à cet âge, et même après : pour un adolescent mal dans sa peau et manquant de confiance en lui, se découvrir en possession de pouvoirs et faire partie d’une illustre famille de sorciers ou de divinités, cela apporte un nouveau sens à la vie et permet d’enfin être qui on est vraiment. Cela permet également l’identification face aux doutes et questions existentielles qui assaillent les jeunes héros. Un genre qui parle aussi aux plus grands qui ont gardé la faculté de s’envoler dans des mondes imaginaires, qui aimeraient encore qu’un géant débarque sur une grosse moto nous délivrer d’un monde trop morne ou trop pénible (pour ma part c’est une cabine téléphonique se matérialisant de nulle part mais chacun son truc). Sauf que de Percy Jackson au Labyrinthe, ces films, adaptations d’œuvres littéraires ayant plus ou moins connu le succès, tombent souvent dans les gros clichés, entre héros niais, rival jaloux, triangles amoureux, univers pas très crédibles, obstacles permettant au héros de trouver le courage, discours sur l’amitié…


Miss Pellegrine évite donc ces écueils, tout en apportant une plongée dans un univers fantastique caché qui fait rêver. S’il y a bien un autre enfant jaloux de sa présence, l’élément est plutôt tourné en dérision, l’enfant en question étant plutôt bizarre et asocial. Et il apparaît bien vite qu’il est proche d’une autre fille, de sorte qu’aucun triangle amoureux ne subsiste. Les enfants, le héros comme les autres, ne paraissent pas niais et ne prennent pas des décisions particulièrement stupides qui mettent tout le monde en danger. Certes, il n’est pas particulièrement brave, mais quand il se lève face au danger pour protéger les autres, il y parvient à l’aide des autres enfants qui se révèlent tout autant courageux. Un garçon ordinaire qui ne se révèle pas pour autant du jour au lendemain un guerrier redoutable, et encore moins pour savoir viser avec une arbalète…


Samuel Jackson n’aurait pu être qu’un personnage incarné par un acteur de renom histoire d’avoir une star au casting, et se contenter de jouer le rôle du méchant menaçant avec une voie grave, mais Samuel Jackson parvient à rendre le méchant de l’histoire truculent, cynique et doté d’humour, menant son plan avec une délectation certaine. Et comme l’a dit un jour Hitchcock, « plus réussi le méchant est, plus réussi sera le film ».


Sous la pâte de Burton, c’est tout un univers fantastique qui se dévoile. Où une petite fille peut faire sortir une grosse carotte de la terre, une autre s’isoler dans un bateau englouti en expulsant l’air, des femmes remonter le temps et se transformant en oiseau… Mais qui dit fantastique, dit aussi inquiétant, car tous ces êtres particuliers ne sont pas tous bien intentionnés. Les Creux sont des monstres terrifiants qui réservent un sort particulièrement cruel aux enfants, et qui ont oublié toute humanité depuis longtemps.


Alors certes, il n’y a pas vraiment d’événements tragiques qui peuvent amener le film vers des tons plus adultes, mais toutefois le héros traverse des épreuves réelles, comme la disparition de son grand-père.


Tous les enfants apportent quelque chose et suscitent un certain attachement: de la fille à la force surhumaine qui joue les durs, du garçon étrange qui donne vie aux créatures inanimées, en passant par l’invisible exhibitionniste.


Niveau crédibilité cependant, on pourra facilement trouver certaines idées peu réalistes. Comment peut-on vouloir rester enfant éternellement, à l’écart du temps, rester avec les mêmes personnes et revivre la même journée encore et toujours? Une idée saugrenue que l’on finit rapidement par accepter cependant. Après la création de ces boucles temporelles situées partout dans le monde, ouvrant sur des époques différentes, et l’existence de ces êtres particuliers aux pouvoirs non expliqués ouvrent des tas de conséquences et de réflexions possibles, peut-être d’avantage détaillées dans les livres, mais pour ce genre d’univers, il convient parfois d’accepter les choses telles qu’elles sont sans chercher à tout comprendre. Toutefois, toujours en terme de manque de réalisme, citons l’affrontement dans la fête foraine devant des passants qui ne semblent pas si étonnés de ce qui se passe…


Merveilleux, dangers, humour (la bataille finale dans le parc d’attraction avec les squelettes est assez énorme) se mélangent ainsi judicieusement pour un film qui se situe au dessus de ses semblables.

Enlak
7
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le 31 oct. 2016

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Enlak

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